Le coup de génie

Censé nous apporter richesse et bien-être, le capitalisme d'aujourd’hui est malade. La crise économique de 2008 a amplifié plusieurs phénomènes difficiles à résoudre tant ils sont enchevêtrés les uns aux autres. Citons pêle-mêle le vieillissement de la population, les caisses de pension en difficulté, l’augmentation des coûts de la santé, les taux négatifs, ainsi que l’endettement élevé des ménages et des États. Au final, le monde est dans la tourmente, la croissance est en berne et nous sommes emprisonnés dans une «grande stagnation1» où le génie se fait rare.

Dans les entreprises, le stress et le burn out affectent un nombre croissant de collaborateurs. Dans ces conditions, il devient difficile d’être audacieux ou créatif. Les situations prolongées de stress conduisent à un sentiment d’insécurité qui active le cerveau reptilien chargé de la survie au détriment du cortex préfrontal, lieu de notre intelligence créative supérieure. Pourtant, le génie sommeille en nous et n’attend que d’être réveillé, ainsi que le démontre l’histoire suivante.

Considéré comme mauvais élève, le jeune Albert Einstein est renvoyé à 16 ans du Luitpold Gymnasium de Munich. Dépités, ses parents déménagent à Zurich et vont inscrire leur fils dans une école novatrice à Aarau, où l’on applique les méthodes d’Henri Pestalozzi, l’un des pères de la pédagogie moderne. Là, Einstein entre en éveil. Il peut enfin s’épanouir et ouvrir son esprit grâce à des techniques pédagogiques innovantes, comme l’auto-apprentissage par observation, qui lui permettent de développer rapidement son intuition et sa créativité. Grâce à cet environnement favorable, Albert Einstein va accéder à une révélation. Une image se dessine dans son esprit et y restera gravée à jamais. Tel un cavalier de la lumière, il s'imagine chevauchant un énorme rayon lumineux pour en découvrir les secrets.

Plus tard, il reviendra sur cette vision onirique à l’occasion de ses études à l’école polytechnique de Zurich. Et si, allant à la vitesse de la lumière, on se regardait dans un miroir, que deviendrait notre propre image? Après dix années passées à résoudre ce paradoxe qui l’obsède, il publie des écrits extraordinaires sur la relativité ainsi que la fameuse formule E = mc2. Ce coup de génie est une révolution scientifique. En 1921, il obtient la reconnaissance ultime avec le prix Nobel de physique, accédant ainsi à la notoriété mondiale.

La trajectoire exceptionnelle d’Albert Einstein est inspirante à plus d’un titre. Tout d’abord, elle met en évidence que certains changements radicaux peuvent s’avérer au final très bénéfiques. Le jeune Albert a été forcé de changer d’école et cette rupture l’a conduit à la réussite. Ensuite, grâce aux méthodes pédagogiques avant-gardistes de Pestalozzi, Einstein a pu s’éveiller et avoir par la suite un coup de génie. Enfin, l’histoire d’Einstein met en évidence la nécessaire réalisation de soi. Dans sa théorie du surhomme, Nietzsche nous dit «Deviens ce que tu es!». Une invitation à se libérer de ses carcans pour aller au-delà de ses propres limites en plein accord avec ses valeurs et ses aspirations profondes.

Pour faire face aux défis qui nous attendent, le monde et les entreprises ont plus que jamais besoin du génie de chacun. En développant notre créativité, notre passion et une vision enthousiasmante de l'avenir, nous pourrons avoir plus de plaisir dans notre travail en contribuant au progrès humain et à la croissance économique. Comme des étoiles dans le ciel, les génies ont le pouvoir de nous émerveiller et nous inspirer en vue d’un monde meilleur. Nous n’avons qu’à lever les yeux pour les contempler et les laisser nous guider, même dans la nuit.