Management

Les femmes ont de la peine à s'imposer dans l'économie

Si les filles ont souvent des meilleurs résultats scolaires que les garçons, les femmes font moins souvent carrière que les hommes. L'arrivée d'enfants est un frein, tout comme le choix de la profession.

(ats) Les chiffres sont éloquents: dans les directions des 100 plus grandes entreprises de Suisse, la part des femmes ne se monte qu'à 8%. Dans les administrations publiques, la situation est un peu meilleure avec 14% de femmes occupant des positions dirigeantes.

Selon une étude du spécialiste du recrutement Guido Schilling, la part des femmes dans les conseils d'administration atteignait 17% en 2016. Depuis 20 ans, la part des femmes qui occupent une fonction hiérarchique de cadre ou dirigeante reste bloquée à un tiers, selon des chiffres de l'Office fédéral de la statistique (OFS).

Sans surprise, les femmes sans enfants font plus facilement carrière, explique la sociologue zurichoise Katja Rost. Selon elle, les femmes peuvent certes gravir les échelons professionnels et avoir une famille, mais souvent au détriment d'une vie privée.

Temps partiel féminin

En Suisse, pour concilier vie professionnelle et familiale, 80% des mères travaillent à temps partiel. Ce modèle de travail est d'ailleurs typiquement féminin. Environ 60% des femmes travaillent à temps partiel en Suisse, contre 17% des hommes.

Selon l'OFS, la part de la gent féminine qui réduit son pensum à moins de 50%, se monte à un bon quart, contre seulement 6% des employés masculins.

Le temps partiel signifie souvent une plus grande précarité des conditions de travail et une plus mauvaise couverture sociale. Et surtout de plus faibles possibilités de formation continue et de chances de carrière.

La sous-représentation de la gent féminine dans les postes de cadres est due à la faible proportion d'hommes travaillant à temps partiel, estime le leader mondial du travail temporaire Adecco. Les femmes s'occupent déjà de la gestion familiale la plupart du temps et c'est pourquoi elles s'intéressent à des postes à temps partiel, avec des fonctions non dirigeantes.

Choix de profession

A l'échelon national, il manque en Suisse des structures d'accueil accessibles et avec des horaires compatibles avec les exigences professionnelles. Adecco est convaincu que la pénurie imminente de main-d'oeuvre qualifiée va engendrer une amélioration des conditions cadre pour les parents qui travaillent.

La situation des femmes peine toutefois à s'améliorer. Dans une récente interview, la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga estime que si le rythme se poursuit, la parité entre hommes et femmes dans les conseils d'administration des entreprises cotées en Suisse ne s'atteindra qu'en 2150.

L'affirmation, selon laquelle un poste de cadre n'est pas possible à temps partiel, a la vie dure. La conseillère fédérale plaide pour que les mères et les pères aient un vrai choix pour organiser leur vie privée et professionnelle. Actuellement, quatre pères sur cinq avec des enfants en bas âge travaillent à 100%.

Selon l'OFS, avec un niveau de formation similaire, les femmes ont généralement une situation professionnelle plus basse. Il faut aussi agir sur le plan du choix de la profession de la gent féminine. Les hommes choisissent des études avec plus de prestige et avec des meilleures perspectives de salaires, explique Stefan Wolter, directeur du Centre suisse de coordination pour la recherche en éducation.

Où sont les cadres féminines?

Une seule main suffit pour énumérer le nombre de femmes dans les hautes sphères des 100 plus grandes entreprises suisses. Elles siègent davantage dans les comités d'associations. Une représentation équitable serait possible et dans de nombreuses branches, la gent féminine est dans les starting-blocks.

Actuellement, seules quatre femmes sont à la tête d'une grande société suisse: Susanne Ruoff dirige La Poste, Jasmin Staiblin Alpiq, Susanne Thoma BKW Energie et Philomena Colatrella la CSS.

D'après le spécialiste du recrutement Guido Schilling, la part des cadres féminines, dans l'économie suisse, croît fortement. L'origine de cet optimisme: un cinquième des nouveaux membres des directions et des conseils d'administration était des femmes en 2016.

Pourtant, rares sont les talents féminins connus du grand public. Pour des raisons de protection des personnes et de frilosité helvétique, les associations et surtout les entreprises rechignent à les mettre en avant et à les nommer.

Même dans leurs propres rangs, les femmes brillantes sont plutôt en retrait et citées avec fierté que partiellement. Ainsi, le groupe pharmaceutique bâlois Novartis indique avoir un "nombre significatif" de cadres féminines, juste en dessous de Monika Jänicke, qui dirige la division pharma, et de Rebecca Guntern à la tête de Sandoz.

Potentiel féminin

Dans la finance, certains établissements ont, ces dernières années, découvert le leadership féminin et son potentiel. Voici sept ans, Marianne Wildi a pris la direction de la Banque hypothécaire Lenzburg: elle était la première femme à diriger un institut bancaire coté à la Bourse suisse.

Depuis juin, Sandra Lienhart est à la tête de Banque Cler (ex-Banque Coop). UBS compte, pour sa part, deux membres de la direction féminines: Sabine Keller-Busse et Kathryn Shih.

Une douzaine de femmes occupent les échelons supérieurs. A l'instar de Christine Novakovic, responsable de la clientèle d'entreprises et institutionnelle et d'UBS Investment Banque Suisse, et de Karin Oertli Küng, à la tête de la division Asset Management pour les marchés helvétique et la zone EMEA (Europe, Moyen-Orient et Afrique). Susanne Thellung est la seule responsable régionale de la grande banque: elle est en charge des affaires en Suisse centrale.

Peu connue du public, Anke Bridge dirige le département Digital Solutions & Delivery de Credit Suisse sur le territoire helvétique. Etoile montante du numéro deux bancaire suisse, Jin Yee Young est responsable de l'important marché de Singapour.

En juillet, Annika Falkengren s'est retrouvée sous le feu des projecteurs. Directrice de la grande banque suédoise SEB, elle a rejoint les associés de l'établissement genevois Lombard Odier.

Au sein de la direction de La Poste, outre la patronne Susanne Ruoff, Valérie Schelker se trouve à la tête des ressources humaines et Claudia Pletscher est cheffe du développement.

Nicole Burth dirige, pour sa part, Adecco Suisse. Natalie Rüedi tient les rênes du numéro un helvétique des produits laitiers, le groupe lucernois Emmi. Chez Coop, quatre femmes occupent actuellement des fonctions dirigeantes.

Plus de femmes dans les associations

Manifestement, les associations mettent davantage en valeur les femmes. La Fédération de l'industrie textile suisse compte parmi ses membres Caroline Forster, codirigeante du groupe Forster Rohner, et Manuela Beer, cheffe de PKZ.

Même le secteur de la construction compte d'éminentes femmes. Daniela Spuhler-Hofmann, l'épouse du président du conseil d'administration de Stadler, Peter Spuhler, préside l'organe de surveillance des entreprises zurichoises Esslinger et Barizzi. Andrea Wucher dirige, elle, la société bernoise Weiss+Appetito depuis la mi-2016.

Selon l'Association suisse des brasseries, les plus influentes femmes de la branche sont, outre les trois membres féminines de la direction de Feldschlösschen (Gaby Gerber, Regina Wurz-Janssens et Silvia Keller), Claudia Graf et Anita Tremi, directrices respectivement de Sonnenbräu et de Brauerei Fischerstube.

Associations: meilleures opportunités

Les associations semblent offrir aux femmes de bonnes opportunités de carrière interne. Au sein d'economiesuisse, organisation faîtière des entreprises helvétiques, quatre bureaux administratifs sur cinq ainsi que la direction opérationnelle sont en mains féminines.

La Société suisse des pharmaciens (pharmaSuisse) a nommé Martine Ruggli membre de la direction stratégique. Elle est également présidente de la Commission fédérale des médicaments. Maria Hitziger, fondatrice de ApoDoc, et Julie Schappler, vice-présidente de PharmaGenève, sont d'autres nouvelles venues dans les hautes sphères de la branche.

Dans le secteur agricole, Christine Bühler, présidente de l'Union suisse des paysannes et des femmes rurales, est vice-présidente depuis 2013 de l'Union suisse des paysans.

Depuis six mois, Monique Bourquin préside l'Union suisse de l'article de marque Promarca. Elle a travaillé pendant quatorze ans pour Unilever, chez qui elle a dirigé notamment les affaires suisses quatre ans durant.

 

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