«L’homme à abattre»
Agé de 50 ans cette année, il a déjà derrière lui un gros bagage professionnel. Son côté «patron serein» n’est donc pas un hasard. Durant les années 2000, il fut le DRH des contrôleurs aériens de Skyguide. Pendant son mandat, un nouveau CEO est engagé et lui annonce sa décision de ne plus inviter le DRH aux comités de direction. Frédéric Sudan dépose sa lettre de démission et s’envole vers de nouveaux horizons. Sans regrets? «Non pas du tout. J’ai beaucoup appris durant mes années chez Skyguide. J’y avais été engagé pour renégocier à la baisse les conventions collectives. Ce furent des négociations très dures. J’étais devenu l’homme à abattre de l’organisation.»
Un autre épisode illustre la lente maturation de sa fibre patronale. Nommé DRH d’EMC2 en 2008 (une société informatique américaine qui vient d’être rachetée par Dell), il doit licencier 15 % du personnel à peine entré en fonction. Il sert le poing et conteste l’ordre venu d’en haut en proposant de réduire les coûts de 15 %. Il gagne son bras de fer et organise un brainstorming avec les équipes de Zurich pour concrétiser ces économies. Résultats? Le personnel accepte une réduction de salaire de 5 % sur une durée limitée. L’entreprise favorise les congés sabbatiques non-payés en finançant les assurances sociales du collaborateur pendant son absence et encourage les temps partiels. «Toutes ces mesures nous ont permis au final de réduire les licenciements à 3% des effectifs», glisse Frédéric Sudan, le sourire modeste. Et de poursuivre: «J’estime qu’un DRH est là pour aider les collaborateurs et pour aider le business à développer sa stratégie. J’ai toujours refusé d’être uniquement considéré comme le gendarme de l’organisation et l’homme de main de la direction générale.»
Son arrivée à la tête de netplusFR est également un épisode mouvementé de sa carrière. Alors qu’il vient de quitter EMC2 pour fonder sa propre société de conseils RH (FS2B sàrl), il est mandaté pour coacher le directeur de netplusFR. L’entreprise vient de prendre son envol et déjà elle prend l’eau de toutes parts. Après quelques séances de coaching, Frédéric Sudan jette l’éponge. Deux mois plus tard, le président du conseil d’administration, Claude Thürler, est à nouveau au bout du fil: il cherche un directeur ad interim. Frédéric Sudan: «J’ai accepté le défi, mais la situation était critique. Le personnel me considérait comme un traître, car il pensait que j’avais manœuvré pour éjecter l’ancien directeur.» Ambiance. Il commence par faire le ménage et licencie un quart du personnel. Il mise aussi sur la transparence et la communication en organisant des séances d’informations trimestrielles pour partager les chiffres clés. «J’ai également instauré une culture du succès, un peu à l’américaine. Ainsi, deux à trois fois par mois, nous nous retrouvons autour d’un verre pour célébrer nos réussites», détaille-t-il. Trois ans plus tard, le voilà donc solidement établi à la barre avec tous les indicateurs au vert. Derrière nous, la brume se lève et le Moléson retrouve son éclat.
Nestlé, Mirador et Conforama
L’heure est au bilan de carrière. Après son enfance dorée dans la ville de Gruyères, Frédéric Sudan choisit l’Ecole hôtelière de Lausanne et une licence en économie à l’Université de Fribourg. Il entre ensuite chez Nestlé Suisse, comme assistant RH puis comme contrôleur de gestion. Cinq ans plus tard, il reprend la direction des finances, RH, achats et IT de l’hôtel Mirador au Mont-Pèlerin. En 2000, il est nommé directeur général du Golf de Pont-la-Ville (canton de Fribourg). Il se souvient: «C’était une entreprise de taille comparable. J’y assumais la direction, mais étais également l’homme à tout faire. Si une femme de ménage était malade, je montais nettoyer les chambres et refaire les lits...». En 2001, il rejoint le groupe Conforama où il devient directeur financier et RH de la centrale d’achats. Ce sera sa période d’expatriation puisqu’on lui demande d’ouvrir plusieurs bureaux de sourcing en Inde, Chine, Vietnam, Pologne, Roumanie, Italie et France. Dans chaque pays, il trouve des locaux, créé la société, engage les premières personnes et établit une politique RH. «Je voyageais quatre jours par semaine. C’était très éprouvant, mais passionnant de découvrir les différentes cultures et législations du travail. Si j’ose la comparaison, c’était clairement plus compliqué en France et en Italie.» Frédéric Sudan dit les choses sans trop se soucier des susceptibilités. C’est l’avantage des patrons posés.
Bio express
- 1991 Master en gestion hôtelière, Ecole Hôtelière de Lausanne
- 1993 Master en économie, Université de Fribourg
- 2001 Directeur administratif et financier chez IHTM (Conforama)
- 2005 DRH de Skyguide
- 2008 DRH EMC2
- 2009 Master en Développement du capital humain, HES Arc Neuchâtel
- 2013 Directeur netplusFR SA
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