Débat

Travailler pendant une maladie ou un accident ?

Tous les employés ne sont pas sont incapables de travailler quand ils sont en arrêt de travail, estime la spécialiste en communication Jelena Martinelli. Regina Gretener souligne toutefois que le retour anticipé au travail se fait généralement par crainte de perdre son emploi.

Pour : Jelena Martinelli

Mon collègue Kurt a eu un accident pendant les vacances de ski. Il a dû être soigné à l'hôpital et s’est absenté du bureau pendant plusieurs semaines. Le patron de l’époque, qui lui rendait régulièrement visite, m’a bientôt annoncé: «Bon, je vais voir Kurt et lui apporter son ordinateur portable.» J'ai été stupéfaite. Il lui apporte son ordinateur portable? Pour travailler? Mais Kurt est en arrêt de travail! Lorsqu'il s'agit de savoir si un collaborateur peut travailler pendant une absence pour cause de maladie ou d’accident, il faut se rappeler que toutes les situations ne sont pas pareilles. Par exemple, une grippe n’est pas assimilable à un lumbago, une douleur rhumatismale n’est pas semblable à une migraine. Le travail lui-même n'est pas simplement un travail. Un électricien ne peut pas grimper aux pylônes s'il s'est cassé la jambe. En revanche, un rédacteur peut écrire un article même avec un plâtre jusqu'à la hanche. En tant que rédacteur, Kurt n’avait pas besoin de quitter le lit pour faire son travail.

Les cas de maladie ou d'accident ne sont pas seulement stressants pour la personne concernée: les collègues doivent presque toujours compenser son absence. La charge de travail supplémentaire varie selon les situations. Parfois, il suffit d’annoncer à tout le monde que M. Untel répondra dès qu'il sera de retour. Parfois, des pans entiers du travail doivent être redistribués. Dans le pire des cas, les dossiers s’empilent, les clients ne sont pas servis et des gains sont perdus. La réduction de la durée des absences est une question d'intérêt général. Bien sûr, personne ne devrait se traîner pour aller au travail quand il est malade ou accidenté. Les employeurs ne doivent pas non plus forcer les personnes concernées à continuer à travailler, car la loi les oblige au contraire à prendre soin de leurs collaborateurs. Mais une maladie ou un accident n’est pas une interdiction de travail pure et simple. Le médecin peut établir un pronostic et déterminer ainsi la durée possible de l'absence. Cependant, bien que le patient puisse effectivement être inapte au travail pour certaines activités spécifiques comme les interventions sur des pylônes électriques, certaines tâches demeurent éventuellement à sa portée, comme classer des rapports de dommages depuis son domicile, avant ou après de faire les exercices qui lui ont été prescrits pour son dos. Dans le cas de Kurt, après un certain temps de convalescence, le temps lui a semblé de plus en plus long et ses pensées ont commencé à s’assombrir, malgré certaines distractions comme la télévision et des piles de magazines. Expert dans son travail, il se retrouvait dans la peau d’un patient qui ruminait toute la journée. Etre entouré de ses pairs et se sentir utile, voilà ce qui lui manquait. Kurt était donc tout heureux d'être productif au moins quelques heures par jour. C'était bon pour son psychisme et n'a aucunement nui à sa guérison. Autrement dit, pour autant que la situation s’y prête et que toutes les parties intéressées soient d'accord, les employés peuvent très bien travailler pendant un arrêt pour cause de maladie ou d’accident.

Contre : Regina Gretener

Je suis familiarisée avec les questions relatives à la poursuite du travail pendant un congé pour cause de maladie ou d’accident en raison de mes nombreuses années d’expérience dans le domaine des ressources humaines, ainsi qu’à mon activité de thérapeute et de coach. Pour moi, la question est de savoir pourquoi les employés veulent retourner au travail plus tôt. Se sont-ils vraiment remis sur pied plus vite que leur médecin l’avait prédit? Des pressions ont-elles exercées pour qu’ils se dépêchent de revenir? Ou craignent-ils de perdre leur emploi? Si les employés se sentent effectivement rétablis plus tôt que prévu, ils peuvent tout à fait reprendre le service malgré leur certificat médical. Cependant, dans de nombreux cas, leur état de santé n’est pas complètement revenu à la normale. Or, une reprise un peu trop anticipée a souvent des conséquences douleurs, rechute, aggravation ou chronicisation du problème (d’où une augmentation de l'absentéisme), baisse de motivation due à un manque d'énergie, risque accru d'accident....

Les employés sont souvent soumis à une pression extrême. Dans certaines entreprises, seule la rentabilité compte. Il y a un manque d’humanité. Les employés qui ont peur de perdre leur emploi ont donc tendance à se présenter au travail dans des conditions de santé plus que discutables. Le devoir de diligence se heurte au présentéisme. Le devoir de diligence se fonde sur l'article 328 du Code des obligations (CO), en vertu duquel l'employeur est tenu de respecter et de protéger la personnalité des employés et de veiller à leur santé psychique et physique. Ainsi, l'employeur s'engage à prendre des mesures appropriées pour s'assurer que des problèmes de santé ne surviennent pas et, s'ils surviennent, ne s'aggravent pas. Quant au présentéisme, il désigne le fait pour un salarié de venir travailler alors qu’il ne se porte pas bien. Or, en cas de maladie infectieuse, typiquement, le présentéisme met en danger la santé des collègues sains. Par conséquent, l’employé concerné doit être complètement guéri avant de reprendre son poste. Il est vrai que lors d'un arrêt de travail, l’intéressé est tenu de faire tout son possible pour favoriser son rétablissement. La gestion de ces situations nécessite une culture d'entreprise empreinte de confiance. Cela implique des conditions-cadres et une atmosphère de travail qui autorisent les employés à être absents de temps à autre pour des raisons indépendantes de leur volonté, et qui leur garantissent d'être pris au sérieux de manière à ne pas vivre dans la peur constante d'un licenciement.

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Jelena Martinelli hat als Abteilungsleiterin für SwissRe und Swisscom gearbeitet. Heute ist sie selbstständige Texterin, freie Journalistin und Autorin, und berät KMU zu Kommunikationsfragen. www.martinellitext.com

Jelena Martinelli hat als Abteilungsleiterin für SwissRe und Swisscom gearbeitet. Heute ist sie selbstständige Texterin, freie Journalistin und Autorin, und berät KMU zu Kommunikationsfragen. www.martinellitext.com

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Regina Gretener ist Therapeutin, Coach und Seminarleiterin. Sie hat sich mit ihrer Firma "Mensch Sein" auf Persönlichkeitsentwicklung spezialisiert und bietet therapeutische Begleitungen an.

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