Covid-19

Déconfinement progressif: entre soulagement et revendications

Le déconfinement progressif annoncé par les autorités fédérales est perçu comme un soulagement pour la majeure partie des acteurs économiques du pays. On devrait néanmoins aller plus loin, estiment la FER, l'Union patronale suisse et Swissmem.

La Fédération des Entreprises Romandes (FER) a salué dans un communiqué les décisions annoncées par le Conseil fédéral en faveur des indépendants. Elle comprend les mesures de reprises par étapes, qui permettent une adaptation à l’évolution de la situation sanitaire, mais aurait souhaité davantage de clarté quant à l’ouverture des magasins.

Lors de sa conférence de presse du 16 avril, le Conseil fédéral a enfin annoncé des mesures de soutien aux indépendants indirectement touchés par les restrictions imposées par les autorités dans le cadre de la pandémie du coronavirus. Les indépendants ayant un revenu soumis à l’AVS compris entre 10'000 et 90'000 francs pourront recevoir une aide plafonnée à 196 francs par jour. Cette extension de la couverture allocation perte de gain (APG), rétroactive au 17 mars, est prévue pour durer au maximum deux mois et s’éteindra avec la levée des restrictions.

Cette aide, anticipée sous différentes formes par certains cantons, était très attendue et demandée par la FER depuis de longues semaines. Elle couvre la grande majorité des indépendants, ce qui est une excellente nouvelle, même si l’effet de seuil induit est à déplorer. En revanche, la FER regrette que ses revendications en faveur des dirigeants salariés de leur propre entreprise n’aient pas été entendues. Ce point sera probablement réglé par la voie parlementaire, des travaux ayant d’ores et déjà été initiés à ce sujet. La FER les suivra avec attention.

La sortie de crise en trois étapes, telle que préconisée par le Conseil fédéral, permet une adaptation à l’évolution de la pandémie, ce qui est absolument indispensable, la santé de la population et des travailleurs étant prioritaire. La première étape, prévue le 27 avril, ouvre cependant un vaste champ de questions, notamment en lien avec les magasins alimentaires qui seraient désormais autorisés à vendre l’ensemble de leur assortiment, soit également des biens qui ne sont pas de première nécessité. La FER craint une distorsion de concurrence avec les autre magasins et commerces, qui sont parmi les premières victimes économiques de cette crise. Ceux-ci devront attendre le 11 mai pour ouvrir leurs portes, en présentant un concept de protection des clients, dont on ne connaît pas encore les prérequis. «Nous attendons de la part des autorités des précisions sur ces zones d’ombre avec une attention particulière en faveur des petits commerçants», demande Ivan Slatkine, président de la FER.

Pour mémoire, la FER met régulièrement à disposition des entreprises des documents en lien avec le Covid-19; sont notamment déjà disponibles:

- l'allocution vidéo du 16 avril de Blaise Matthey à destination des membres de la FER Genève

- un mémorandum sur le formulaire de demande et décompte d'indemnité en cas de RHT COVID-19

- une FAQ pour les employeurs

- des conseils en matière de télétravail

- une liste de liens utiles

La désescalade doit se poursuivre

Pour éviter une vague d'insolvabilité et de faillites, les employeurs estiment que le processus de normalisation qui a été entamé doit rapidement progresser. Les règles adoptées en faveur des personnes vulnérables et des indépendants doivent encore passer le test pratique, note l'Union patronale suisse (UPS) dans un communiqué.

Les mesures radicales prises pas la Confédération contre la propagation du coronavirus font leur effet. A la faveur d’un fléchissement de la courbe des cas de Covid-19, le Conseil fédéral veut normaliser progressivement la vie économique et sociale du pays. Le 27 avril, dans une première étape, les établissements qui ont été contraints de fermer par la Confédération seront rouverts. Le 11 mai, les magasins et les écoles obligatoires pourront reprendre leurs activités et le 8 juin, ce sera au tour des écoles professionnelles et du secondaire II, des hautes écoles ainsi que des établissements de divertissement et de loisirs. Si le Conseil fédéral n’avance pas de date pour la réouverture des restaurants, l'économie hôtelière et de la restauration peut toutefois lui soumettre ses propres plans d'ouverture.

Après ce premier pas vers la normalisation, l'UPS estime que la désescalade doit se poursuivre. L'économie a encore besoin de perspectives claires pour que la relance puisse être coordonnée, progressive et programmable. Les employeurs font leur part de l’effort en adaptant les mesures de protection de manière autonome à la situation spécifique de leurs branches.

Le gouvernement a précisé la protection des travailleurs pour les personnes vulnérables. D'abord, il a défini plus exactement les risques, qui étaient auparavant assez vagues. Ensuite, seules les personnes qui ne sont pas en mesure de travailler à domicile ou de travailler sur le site avec des mesures de protection adéquates, ou encore d’être temporairement transférées à un autre poste au sein de l'entreprise, peuvent être libérées de leurs obligations de travail. Cette réglementation pour les groupes à risque doit maintenant faire ses preuves dans la pratique.

Le Conseil fédéral a désormais intégré dans le dispositif d'aide d'urgence les indépendants, qui en étaient jusqu’ici exclus. Les personnes concernées ayant un revenu soumis à l’AVS compris entre 10 000 et 90 000 francs auront droit à la compensation d’une partie de leur perte de gain avec effet rétroactif, mais au plus tôt à partir du 17 mars. L’UPS reconnaît que cette solution fournit également une aide transitoire aux petits entrepreneurs indirectement touchés, ce qui contribue à atténuer le risque d'effet domino dans la grave crise économique actuelle. La réglementation temporaire qui, selon le Conseil fédéral, coûtera 1,3 milliard de francs pour deux mois, doit être mise en œuvre de manière pratique. L’UPS salue donc également le fait que les caisses de compensation pourront récupérer les prestations obtenues indûment.

Dans le domaine de la formation, le Conseil fédéral a donné son feu vert définitif à l'accord entre les partenaires du réseau de la formation professionnelle, soutenu par l’UPS. Ainsi, les examens de fin d'apprentissage peuvent désormais se dérouler dans toute la Suisse, en tenant compte de la situation spécifique des divers domaines professionnels.

Approche plutôt hésitante

Swissmem soutient la décision du Conseil fédéral d’assouplir progressivement les mesures introduites pour lutter contre la pandémie du coronavirus, mais regrette cependant l’approche plutôt hésitante. L’industrie respecte toujours les réglementations recommandées par l’OFSP et montre qu’il est possible de travailler tout en respectant les réglementations de l’OFSP, notamment pour les personnes vulnérables, écrit la faîtière dans un communiqué. Les nouvelles règles décidées pour les groupes à risque sont donc incompréhensibles. Pour permettre à l’industrie suisse des machines, des équipements électriques et des métaux (MEM), fortement orientée vers l’exportation, de retrouver le chemin de la normalité et de préserver les emplois, le transit frontalier des spécialistes doit à nouveau être autorisé à partir du mois de mai. Ce n’est qu’ainsi que les prestations de services nécessaires peuvent être fournies et que les produits peuvent être livrés.

L’ouverture progressive au niveau de l’économie est une mesure urgente et impérative pour éviter une nouvelle augmentation des dommages économiques déjà énormes et pour pe mettre à l’économie de se reprendre progressivement. Swissmem soutient ce premier pas du Conseil fédéral, mais regrette l’approche plutôt hésitante. Des mesures supplémentaires, telles que des tests généralisés et l’utilisation étendue de masques de protection et d’hygiène, permettraient une démarche plus rapide.
 
Le COVID-19 restera une menace pour la société et l’économie pendant au moins un an encore, jusqu’à ce que qu’un vaccin soit disponible.

Comme le Conseil fédéral, Swissmem veut aussi empêcher un nouveau lockdown.  Dans le contexte d’une nouvelle augmentation du nombre des cas prévisible, le Conseil fédéral ne devrait donc pas s’orienter sur les nouvelles infections, mais sur le nombre de places de soins intensifs disponibles dans toute la Suisse. En outre, il s’agit en priorité de renforcer les mesures de protection des groupes à risque, en particulier les personnes âgées, avant de limiter à nouveau les activités opérationnelles des entreprises et de leurs collaborateurs.

L’industrie suisse veut et peut aider à mettre un terme à la situation actuelle. L’industrie a prouvé au cours des dernières semaines qu’il est possible de poursuivre la production tout en respectant les réglementations de l’OFSP. L’industrie est prête à poursuivre ces mesures et à assurer le niveau de protection des employés et des clients.

Assouplissement ciblé des interdictions de transit

L’industrie MEM suisse exporte presque 80% de ses produits à l’étranger, poursuit Swissmem dans son communiqué. Les voyages à l’étranger sont donc essentiels pour fournir les prestations de services et assu-rer la vente et la réception des produits. Sans ces déplacements, les entreprises ne paieront pas leurs factures pour les machines commandées et livrées, ce qui entraînerait des problèmes de liquidités. De plus, des restrictions de voyage trop sévères mettent en péril la réputation de fiabilité de notre industrie.

En même temps, les spécialistes étrangers doivent être autorisés à entrer en Suisse pour effectuer les travaux d’entretien et de réparation nécessaires sur les installations. Une défaillance dans la production retarderait encore la reprise et mettrait en danger les emplois en Suisse. Dans la mesure du possible, cela devrait être coordonné avec le pays voisin respectif.
L’UE exige également une ouverture du transit pour les frontaliers et les spécialistes. En tant que pays à réseau mondial, la Suisse devrait permettre aux spécialistes de l’UE et des pays tiers d’entrer dans notre pays à partir du mois de mai. Si nécessaire, des mesures de protection spéciales doivent être prises, comme le port de masques de protection, afin d’exclure tout risque de contamination.

Des conditions de travail flexibles

En cette période de crise, chacun doit contribuer à réduire les dommages économiques et à assurer les places de travail. Une flexibilité supplémentaire du temps de travail est donc nécessaire pour tenir compte des différentes situations des entreprises. À cette fin, les conditions de travail doivent être temporairement assouplies. Concrètement, Swissmem demande un assouplissement des règles concernant le travail du dimanche et de nuit ainsi que le service de piquet afin que - dans la mesure du possible - les commandes puissent être traitées. Dans le même temps, il est nécessaire de porter la durée d’indemnisation du chômage partiel à 18 mois.

Une inégalité de traitement dangereuse pour les groupes à risque

Swissmem est également déçue par la nouvelle réglementation concernant les groupes à risque. Cela crée une inégalité de traitement entre les collaborateurs : malgré le respect des réglementations de l’OFSP, les personnes appartenant à des groupes à risque peuvent refuser de se rendre au travail sur la base de leur propre évaluation et recevoir un salaire complet pendant que leurs collègues travaillent ou reçoivent une indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail. Les personnes appartenant à des groupes à risque ne sont pas non plus obligées de réduire les heures supplémentaires ou le temps de travail supplémentaire et les jours de vacances accumulés pendant le créneau horaire pertinent. Swissmem s'attend à ce que ces personnes des groupes à risque contribuent, en accord avec leur entreprise et en fonction de la situation opérationnelle, à diminuer les énormes pertes économiques en rédusant leurs heures supplémentaires, le temps de travail supplémentaire ainsi que les jours de vacances accumulés.

De bonnes conditions-cadres restent essentielles

Grâce à ses solutions et à sa force d’innovation, l’industrie est un facteur important pour que l’économie suisse puisse à nouveau se renforcer. Il est donc essentiel de soulager les entreprises. Swissmem demande donc une amélioration générale des conditions-cadres. Notamment la suppression des droits de douane sur les produits industriels, qui réduira la charge de l’industrie de 125 millions de francs.  

 

commenter 0 commentaires HR Cosmos
Texte: hrtoday.ch
Plus d'articles de hrtoday.ch

Cela peut aussi vous intéresser