Conseils pratiques

Le pour et le contre d'un Grand Oral

Inspiré des grands oraux de l’ENA ou Sciences Po, le Grand Oral est l’étape ultime du parcours de recrutement chez l’éditeur de logiciels RH français Lucca. Témoignage.

Généralement, un recrutement est considéré réussi dès lors que le collaborateur est pleinement intégré dans l’équipe, et plus largement dans l’entreprise. Plutôt que d’attendre les premières semaines ou mois que l’hypothèse se confirme, nous proposons aux candidats de se présenter à un Grand Oral d’une vingtaine de minutes.

4 étapes

Lorsqu’un candidat postule chez nous, il passe d’abord par les étapes d’un recrutement classique. Tout commence par le screening. L’équipe RH s’assure que le candidat a bien compris les attentes sur le poste et s’il répond aux critères du manager qui recrute. L’objectif est d’aligner le profil du candidat sur le poste proposé et de tester sa curiosité sur le fonctionnement de l’entreprise.

Si le screening est concluant, il passe ensuite un test technique dont le but est à la fois de s’assurer que le résultat est au niveau attendu et de valider le raisonnement du candidat. Le test peut ne pas être totalement réussi, si la démarche est pertinente, le processus continue. L’inverse n’est pas nécessairement vrai, surtout lorsqu’il s’agit de code informatique.

La validation du test technique entraîne la rencontre avec l’équipe. Aussi appelé Petit Oral, cet entretien est dédié au parcours du candidat et à l’analyse du test. C’est aussi l’occasion de tester la réaction du candidat face à l’erreur par exemple.

Enfin, le Grand Oral se déroule devant dix à quinze personnes issues des différents services de l’entreprise (R&D, marketing, commerciaux, customer success …).

Capacité à débattre, esprit d'équipe

La première difficulté rencontrée pour le futur collaborateur est le choix même du sujet. Ce dernier étant libre, il faut à la fois montrer que l’on maîtrise son sujet et être capable d’argumenter de façon convaincante si la prise de position est radicale ou polémique. La posture joue une part importante dans la réussite ou l’échec de l’exercice.

Plus de 90 personnes ont rejoint notre entreprise en 2019. La logistique inhérente à l’organisation de ces grands oraux aurait pu y mettre un terme. L’une des raisons principales pour lesquelles nous les maintenons, c’est qu’ils permettent de déceler ce que Netflix appelle les «brillant jerk». Des personnes intelligentes mais exerçant un pouvoir nocif et néfaste pour l’entreprise. Elles agissent comme des bulldozers prêts à tout écraser sur leur passage et représentent une menace pour la culture d’entreprise. Elles ne sont ni dans la collaboration, ni dans le partage et probablement pas davantage dans la transparence.

Les difficultés

La première difficulté est organisationnelle car le Grand Oral mobilise une douzaine de collaborateurs pendant près d’une heure. Si plusieurs grands oraux sont programmés pour un même poste, il faut pouvoir assister à tous. Le panel doit par ailleurs être le plus varié possible pour garantir un avis objectif sur le candidat. Ces conditions ne sont pas toujours faciles à réunir, mais il est important de les maintenir pour conserver l’intérêt de ce rituel.

La seconde difficulté concerne l’équipe et le manager qui recrute. Pour lui, le risque est de devoir renoncer à un candidat qui jusque là, avait su démontrer les qualités et les compétences demandées. Même si c’est lui qui a le dernier mot sur le recrutement, le regard des autres salariés peut l’influencer et l’amener à reconsidérer son opinion.

Enfin ce type de processus de recrutement original ne convient pas à tout le monde. Pour les candidats qui ne sont pas à l’aise avec la prise de parole en public, le procédé peut sembler effrayant. Il est arrivé que certains candidats renoncent au cours du processus. C’est toujours regrettable mais cela n’arrive pas suffisamment souvent pour remettre en cause le Grand Oral.

Le but de ce recrutement décalé n’est pas de déstabiliser la personne. Le Grand Oral se déroule dans une ambiance sérieuse mais détendue. Il s’agit véritablement d’en apprendre plus sur le candidat, de lui donner l’opportunité de montrer d’autres aspects de sa personnalité.

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Manon Silvain est Directrice des Ressources Humaines chez Lucca. Diplômée de la Kedge Business School et de l‘IAE d‘Aix-Marseille, Manon a commencé sa carrière RH chez IBM puis au sein d‘une Startup spécialisée dans le reconditionnement de produits high tech.

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