Débat

Peut-on pleurer au travail?

Montrer ses émotions au travail est un sujet qui divise. Quelqu’un qui pleure est particulièrement mal vu. Mais interdire de montrer ses émotions dans la sphère professionnelle n’est pas la solution non plus. S’autoriser à verser une larme va dépendre de la situation et du moment, s’accordent nos deux intervenants.

Pour : Stefan Sohst

Les émotions n’ont pas bonne presse au bureau. La joie, la colère et la détermination passent encore. Mais versez une larme et c’est un coup (mortel?) porté à votre carrière. Les femmes qui se montrent émotionnelles sont souvent raillées: «Encore une qui n’est pas faite pour le monde sans pitié des affaires!» Un homme qui pleure, c’est encore pire. Il ne sera plus pris au sérieux pendant une année au moins. Quel dommage!

Refouler ses émotions réduit considérablement l'authenticité. D’ailleurs, ce n’est guère possible d’éteindre nos émotions au moment d’entrer au bureau. C’est bien mieux de les intégrer dans la vie professionnelle. Les émotions sont une force. Toutes les informations que nous recevons passent d’abord à travers le filtre de la partie émotionnelle de notre cerveau. Ce qui est considéré comme étant du ressort de notre raison sera traité par notre rationalité. Les personnes qui sont en mesure d’écouter leurs émotions ont donc un grand avantage. Car des émotions refoulées vont gripper ce filtrage subtil et c’est ainsi tout notre système qui sera grippé. Celui qui cache ses déceptions et ses blessures derrière un sourire de façade va diminuer sa capacité à sentir et ordonner les bonnes impulsions perceptibles autour de lui. En clair: celui qui refoule et bloque sans cesse diminue sa performance. C’est pour cette raison que les discussions émotionnelles sont importantes, et oui, oser pleurer fait partie de ces situations. Cela permettra une bien meilleure collaboration. Plus important encore: nous resterons en bonne santé. Car celui qui refoule ses problèmes augmente son risque de maladie psychique ou physique.

Cela dit, la plupart des collaborateurs n’osent pas montrer leurs émotions au bureau. Pour changer cela, il s’agit de modifier la culture d’entreprise en autorisant les émotions, voire même les encourager. Et c’est à l’encadrement de montrer l’exemple. Un manager qui est autant compétent émotionnellement qu’en matière de processus et de stratégie fera toute la différence. Malheureusement, ces managers-là sont encore trop rares dans nos entreprises. La bonne nouvelle c’est qu’il est possible d’entraîner ces compétences – et même de manière relativement simple. Les bénéfices d’une culture qui autorise et qui encourage les émotions sont énormes: des séances plus courtes et plus efficaces; une meilleure communication; moins de conflits; plus de productivité et un turnover plus bas. Les émotions renforcent les relations. Un collaborateur qui se sent émotionnellement attaché à une équipe sera plus créatif et contribuera plus.

Contre : Nora Schütte

Vous êtes énervé par les bouchons du matin ou euphorique après votre week-end particulièrement réussi: chacun amène avec lui ses émotions au bureau le lundi matin. Car c’est très difficile de les laisser à la maison. Plusieurs études montrent que les émotions sont utiles pour stimuler la créativité et dans le processus décisionnel.

Mais comme souvent, tout est affaire de mesure. La capacité à parler de ses émotions ou de les cacher participe à ce qu’on appelle l’intelligence émotionnelle. Cela ne sous-entend pas qu’afficher ses émotions est négatif – pensez par exemple à un manager qui doit motiver son équipe à se lancer dans un nouveau projet. Ce qui importe, c’est d’être en mesure de montrer la «bonne» émotion au bon moment, et de rester sincère dans sa communication. Evidemment, les discussions au bureau sont parfois chargées émotionnellement. Savoir se montrer authentique est donc primordial. Etre capable de parler de situations difficiles est important: évoquer une séparation ou un deuil ne va pas forcément submerger votre interlocuteur d’émotions négatives. Je pense néanmoins qu’il faut toujours être attentif aux effets que peuvent avoir nos propos sur les autres. Etre très émotionnel est souvent perçu comme un signe de vulnérabilité. Ce qui peut contraster avec le rôle que vous tenez en organisation. Un manager devrait se montrer serein. Les relations avec les collègues devraient être inscrites dans la durée. Cette posture est aussi exigée des collaborateurs: ils devraient exprimer leurs émotions de manière mesurée et s’adapter aux différentes situations.

Au cas où vous devriez exprimer votre stress ou votre énervement de manière incontrôlée, je vous conseille de vous en excuser. Cela renforcera votre stature et montrera que vous avez intégré et que vous respectez les règles et les normes de l’organisation.

Cela dit, les émotions négatives au bureau ne sont pas toujours à proscrire. Les émotions sont souvent des moteurs et cette énergie est quelque chose de positif. C’est par contre une mauvaise idée de laisser la jalousie, la colère et l’énervement devenir vos maîtres.

Pour éviter ce travers, l’humour est souvent un outil précieux. La bonne humeur est aussi un allié de taille – elle devrait par contre être sincère. Si vous voulez diffuser un sentiment d’optimisme dans votre équipe, je vous conseille de ne pas faire semblant. Car instrumentaliser vos émotions sera contre-productif: une colère mise en scène provoquera des sourires en coin; faire semblant d’être de bonne humeur laissera un sentiment mitigé.

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Stefan Sohst ist mit Christoph Theile Geschäftsführer der EQTing GmbH mit Sitz in Hamburg. Die beiden Coaches haben die EQTing-Trainingsmethode entwickelt, die Führungskräfte und Mitarbeitende befähigt, ihre eigenen Emotionen zu erkennen, zu benennen und bewusst zu steuern.

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Nora Schütte, Psychologin und Coach, arbeitet als HR Consultant mit den Schwerpunkten Eignungsdiagnostik und Führungskräfte-Entwicklung bei der ITB Consulting GmbH in Bonn. Die Firma entwickelt seit Jahren innovative, wissenschaftlich fundierte Lösungen für Firmen und Hochschulen.

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