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Croyances et organisations
To believe or not to believe
Nous sommes ce que nous croyons! C’est une incontournable évidence. Nos attitudes intérieures les plus profondes naissent de nos croyances. Ces «mouvements intimes» conditionnent ensuite, inconsciemment mais sûrement, nos comportements de tous les jours, avec tous les autres, dans chaque situation.
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Illustration: iStockphoto
Si mes croyances sont positives et bienveillantes, mes attitudes intérieures seront alors empruntes de liberté et de respect de l’autre, de tout autre. J’accueillerai spontanément chaque différence, chaque dissemblance, chaque divergence comme l’opportunité d’une indicible et émerveillante richesse. Et chaque obstacle comme un potentiel progrès. A l’inverse, toute croyance négative que je laisserais vivre au fond de moi conditionnera mes attitudes et mes comportements au refus, au rejet, à l’inertie, à l’antagonisme voire au conflit. L’empereur Marc-Aurèle, bien avant certaines histrionades psychologisantes, le décrivit jadis avec une pénétrante concision et une stupéfiante précision: «Les troubles de l’âme viennent de l’opinion intérieure.» Entendons ce mot «d’âme» au sens antique: il s’agit de ce que nous appelons aujourd’hui la personnalité. Et cette «opinion intérieure» désigne précisément nos jugements intimes, nés de nos croyances.
Si par exemple, je crois que celui qui est étranger à mes valeurs, loin de ma représentation du monde, de mes pensées ou de mes croyances, est indigne de s’exprimer ou de vivre, il n’y a alors aucune raison de le respecter, de lui laisser la parole ni même de le laisser vivre. Croyants dévots en l’hérédité de certaines «tares» sociales ou physiques, les «autorités» américaines ordonnèrent par exemple, pendant les années 40, la stérilisation forcée d’environ 600 000 de leurs concitoyens... Les troubles de comportement, dont hélas nous observons aujourd’hui une généralisation croissante dans toute activité professionnelle, mais premièrement et principalement salariale, ne prendraient-ils pas leur force délétère dans nos croyances inconscientes, dans nos jugements, même si souvent informulés? Le burn-out (amalgamant sous une désignation commune des souffrances très dissemblables) ne serait-il pas en fait comme un très révélateur cratère, trace douloureuse de l’impact psychique de toutes les croyances négatives, celles qui troublent nos âmes?
Rhabillés des meilleures des bonnes intentions, une pandémie de croyances ineptes, erronées ou obsolètes n’envahirait-elle pas nos entreprises et nos organisations? Quelques morceaux choisis, glanés au gré de rencontres avec des managers toxiques! L’entreprise comme le monde économique sont des arènes où seuls les plus forts survivent (il y est donc permis de tuer). Le contrôle évite tous les risques économiques (comme Enron l’a prouvé...). Les travailleurs sont des faibles et des paresseux, on ne peut leur faire confiance (peut-être, mais ils produisent la valeur ajoutée qui paie les cadres). L’innovation ne naît que dans l’imagination des hauts potentiels, surdoués à qui il faut laisser toute la place (alors que 90 pour cent des innovations utiles et rentables viennent de la base...).
Ces croyances intimes et indicibles constituent toute un terrible déni du réel. La réalité finit toujours par s’imposer, avec autant de violence que ce déni fut ample. Pour éviter que ce soit à notre détriment, ne pourrions-nous pas commencer d’éliminer sans cesse de notre intimité, chaque opinion intérieure négative, chaque croyance troublante? Deux maîtres à penser nous y invitent, à leur manière. Le premier, Lao Tseu, déclare que: «Celui qui croit savoir, même une seule chose, ne peut plus rien apprendre.» Deux siècles après, Socrate nous incitait à reconnaître avec lui qu’il ne savait qu’une seule chose: qu’il ne savait rien! En d’autres mots, à cultiver l’humilité véritable, comme la meilleure des aspirines psychiques, la plus puissante panacée psychologique, afin de revivre dans le monde réel, au sein même de nos entreprises.