«Dans le secteur IT, le rapport de force employeur-employé a changé»
Directeur opérationnel d’une société IT, Pascal Meyrat décrit ici ses priorités RH et organisationnelles. L’agilité et la transparence sont devenus incontournables.
"Chacun doit connaître les implications de son travail sur les autres fonctions. Cela nous permet de nous réajuster sans cesse." Photo: 123RF
«Aujourd’hui, dans le secteur informatique, nous faisons face à une pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Les gros acteurs du marché s’arrachent les bons profils et le rapport de force employeur-employé a changé. L’employé est devenu entrepreneur de sa carrière et c’est lui qui dicte les règles du jeu. Dans ce contexte, j’ai besoin du soutien de la fonction RH pour affiner notre stratégie de recrutement et de marque employeur.
Sur le terrain, je suis confronté à plusieurs défis. Notre entreprise offre principalement deux types de service. La délégation de personnel chez nos clients et le développement de projets sur mesure à des prix forfaitaires, travail que nous effectuons en interne. Sur les 40 ingénieurs que nous employons, 25 travaillent à l’externe. Cela correspond à la demande du marché. Nous devons nous adapter en permanence aux attentes de nos clients et réajuster notre organisation du travail en fonction.
En tant que COO, ma priorité est de trouver les bonnes personnes – sur un marché de l’emploi très tendu – et de retenir les employés déjà en place. Comment? Il y a une dizaine d’années, il suffisait d’offrir de bons salaires. Cette époque est révolue. Nos ingénieurs reçoivent quotidiennement des offres alléchantes de chasseurs de têtes. Nous avons donc dû revoir de fond en comble notre Employer Value Proposition.
Désormais, nous mettons en avant notre offre en formation. Avec ce message: venez travailler chez nous, nous vous aiderons à grandir. Un autre argument est de proposer beaucoup de diversité dans le cahier des charges. Enfin, nous avons étayé nos rémunérations, avec la possibilité d’acheter des vacances et de diminuer son temps de travail. Aujourd’hui, ces prestations RH sont un minimum vital.
Le deuxième enjeu est notre organisation du travail. Le monde des affaires est devenu extrêmement volatil. Nos clients viennent avec des demandes ambigües qui peuvent évoluer rapidement. C’est dû à la complexité de l’environnement économique. De plus, nos clients exigent beaucoup de réactivité. Le rythme est devenu plus soutenu. Et si nous ne sommes pas en mesure de nous adapter à ces demandes, nous perdons des clients et la survie de l’entreprise est en jeu.
L’agilité organisationnelle fera donc la différence à l’avenir. Si ces méthodes de travail flexibles (SCRUM) étaient surtout l’affaire de nos équipes de développeurs, aujourd’hui nous les avons diffusées dans toute l’entreprise. Nous avons supprimé les silos et introduit beaucoup plus de transparence dans toute l’organisation. Chacun doit connaître les implications de son travail sur les autres fonctions. Cela nous permet de nous réajuster sans cesse. Cela implique aussi d’améliorer la communication et de considérer les compétences de manière plus transversale.
Quelques exemples. La finance est devenue plus agile, car elle doit livrer des bilans financiers en temps réel. Les RH s’adaptent en permanence aux besoins de l’organisation dans sa globalité. La vente est devenue beaucoup plus agile elle aussi. Par nature, un vendeur est sur le terrain, chez le client, à l’affût d’une nouvelle affaire. Le problème du vendeur, c’est qu’il aura tendance à vendre des services que nous ne sommes pas en mesure de livrer. Nous avons donc impliqué les développeurs et les opérations dans la vente et vice-versa. Ainsi, le vendeur sera obligé de communiquer avec la production pour vérifier si l’entreprise est bien en mesure de délivrer la prestation. De leur côté, les développeurs participent à la rédaction des offres de vente.
D’où l’importance de la transparence et de la communication. Ce sont elles qui donneront du sens à nos activités. De plus en plus, nous rendons nos collaborateurs responsables jusqu’au bout. Ils ont besoin de cette transparence pour décider seuls. Dans ce contexte, le rôle du manager change. Il définit la vision pour éviter que ses équipes ne se dispersent. Il veille à la transparence et à la communication et adopte une posture de support de ses équipes.»