Etude de cas

Déception et dépression

ATF 4A.329/2011 du 11 octobre 2011

L’affaire

Paul (prénom fictif) entre au service d’une banque dès le 1er novembre 2007 en qualité de juriste, à temps partiel. Il s’engage alors par écrit à la discrétion la plus stricte vis-à-vis des tiers sur toute information portée à sa connaissance dans le cadre de ses activités. Il lui est précisé qu’une violation de cette obligation entraînerait un licenciement sans délai. Au cours de son emploi, Paul souffre du comportement hostile de l’un de ses supérieurs, qui use avec lui d’un ton méprisant, critique son travail sans justification et le décrit comme incompétent à ses collaborateurs. Alerté de la situation, un autre supérieur ne prend aucune mesure pour y remédier. En juillet 2008, Paul exprime le souhait d’être nommé au comité de direction de la banque, sans succès. Dès décembre 2008 et pour une année environ, il est en arrêt maladie. En mai 2009, la banque résilie son contrat en respectant le délai de congé contractuel. Elle libère par ailleurs Paul de l’obligation de travailler. Lors d’un entretien, la banque se rend cependant compte que son employé détenait des copies de documents internes en violation de ses obligations. Sommé de restituer les documents mais refusant de le faire, Paul est licencié avec effet immédiat.

Le jugement

Cet arrêt est intéressant à double titre. D’une part, le Tribunal fédéral confirme la validité du licenciement avec effet immédiat. Il n’a pas suivi l’argument de Paul, lequel a fait plaider qu’il n’a gardé que quelques documents sans importance stratégique dans l’unique but de prouver que son employeur l’avait nommé au comité de direction. Pour les juges de Mon Repos, l’obligation de discrétion était absolue et le projet d’entreprendre une action judiciaire ne justifiait pas sa violation, l’employé étant libre d’établir et de conserver une liste des documents qu’il croyait utiles à sa cause puis de requérir leur production dans le cadre du procès.

Sous l’angle du congé abusif d’autre part, le Tribunal fédéral constate que Paul a bien subi un harcèlement psychologique. En revanche, les autorités précédentes n’ont pas constaté de lien de cause à effet entre ce harcèlement et la maladie, en l’occurrence un état dépressif. Reprenant les déclarations du médecin psychiatre, le Tribunal fédéral constate que si Paul a consulté, ce n’était guère pour se plaindre des actes d’hostilité de son supérieur, mais bien davantage parce qu’il avait souffert d’une grande déception pour ne pas avoir été nommé au comité de direction de la banque. En conséquence, la jurisprudence selon laquelle est abusif un congé donné au retour d’une maladie elle même conséquence d’un harcèlement ne s’applique pas in casu.
 

commenter 0 commentaires HR Cosmos
Plus d'articles de Alexandre Curchod