Des modèles pour adapter l’entreprise aux nouvelles attentes des salariés
Comment venir à l’encontre des nouveaux besoins des individus tout en maintenant la culture de la performance et du résultat? Voici une série de modèles d’aménagement du temps de travail. Plusieurs options qui sont autant d’opportunités pour un DRH de se positionner de manière proactive dans la relation employeur-employé.
Photomontage: Sabine Schritt et Ulrike Kobelius
Les modèles d’aménagement du temps de travail offrent une pluie de solutions pour adapter l’organisation aux besoins des collaborateurs. Très concrètement, il peut s’agir de diminuer le temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail (grâce au télétravail), d’adapter un horaire journalier aux contingences personnelles d’un collaborateur tout en maintenant l’excellence d’un service à la clientèle. Mais aussi de tenir compte du cycle de vie du collaborateur en variant sa charge de travail et ses responsabilités tout au long de sa vie (apprentis, expert, senior).
Et il y a les interruptions de carrières, ces congés non payés qui permettent à un collaborateur de réaliser une vieille passion, d’acquérir de nouvelles compétences ou simplement de changer d’air. Bref, ces modèles d’aménagement du temps de travail tiennent compte de la situation personnelle des collaborateurs. Avant d’aborder les scénarios possibles, précisons que ces adaptations de l’organisation du travail doivent aller de pair à une culture d’entreprise plus en phase avec les réalités de la société dans laquelle évolue l’organisation.
Plusieurs éléments nous semblent ici indispensables. Il faut tout d’abord accepter que la vie privée soit omniprésente, au travail comme ailleurs. Le contraire est vrai aussi: la vie professionnelle ne s’arrête pas au seuil du domicile privé du collaborateur. Le but est ensuite de créer un état d’esprit axé sur les résultats. Ce qui passe par la création d’un climat de confiance, porté par un management doué d’un sens du leadership et surtout d’une bonne capacité d’écoute. Tout cela augmente la motivation, l’efficacité et l’envie de travailler dur! On le voit bien: être en mesure de donner une place aux besoins individuels tout en gardant l’objectif du groupe est un art.
Les mesures dites «softs», car plus aisément applicables
L’annualisation du temps de travail est la fixation des heures dues pour une année plutôt que par mois ou par semaine. Ce système est souvent adapté à une organisation aux contraintes temporelles saisonnières (construction, restauration, agriculture) mais aussi aux industries qui travaillent avec zéro stocks, afin de diminuer les coûts. En cas de grosses commandes, la charge de travail peut augmenter considérablement et vice versa.
L’horaire mobile est la fixation d’un délai de temps pendant lequel le collaborateur est autorisé à arriver (ou partir) du bureau, avec des tranches horaires de présence obligatoire. Il permet de tenir compte des contraintes individuelles tout en gardant une continuité au travail grâce aux règles clairement communiquées. Il en va de même avec les constellations d’horaire réduit, d’horaire prolongé ou d’horaire échelonné. En fonction des exigences, ces modèles permettent d’être plus longuement atteignable pour la clientèle. Il est fortement recommandé de prévoir un règlement d’horaire mobile.
Le temps partiel consiste à réduire le taux d’activité. L’horaire dépendra des besoins des parties prenantes: un horaire réduit journalier, un horaire réduit mais conséquent sur quatre jours, un horaire hebdomadaire réduit. La périodicité compte également: fixe, flexible, graduel? Très apprécié par les femmes, le temps partiel intéresse de plus en plus les hommes.
Les interruptions de carrière. La plupart des grandes organisations de Suisse accordent des congés non payés à leurs collaborateurs. Il s’agit d’une suspension, convenue entre les parties, des obligations contractuelles pour une durée déterminée. Un congé sabbatique permet au collaborateur de réaliser un rêve (voyage), de soigner un membre de sa famille en fin de vie ou d’acquérir de nouvelles compétences (formation, stages). Des compétences qui reviennent ensuite dans l’organisation une fois le congé terminé. A noter que l’octroi d’un congé sabbatique est perçu comme un signe de reconnaissance et de confiance.
Les solutions plus conséquentes qui impliquent de changer l’organisation
Le temps partagé (jobsharing) consiste à répartir un poste à plein-temps entre deux personnes. L’objectif est de garantir la continuité de la fonction. Bien que la répartition d’un 100 pour cent soit le plus courant, on peut imaginer un 140 pour cent exécuté par 2 personnes.
Les possibilités sont illimitées dans le respect du contrat de travail, les besoins et la réglementation du secteur. A noter qu’il y a une différence entre le job-pairing et le job-splitting: dans un job-pairing, les job-sharers assument et maîtrisent conjointement une tâche. Les deux personnes maîtrisent donc toutes les tâches requises par la fonction.
Dans un job-splitting, chacun est responsable de la tâche qui lui est confiée, comme deux avocats qui géreraient leurs propres dossiers. Il y a plusieurs manières d’organiser un jobsharing: en mode hebdomadaire (chacun travaille une semaine); en combinant deux profils dont un en mode télétravail et l’autre sur place ou encore partager un poste entre un senior et un jeune qui souhaite se développer.
Le télétravail est le travail effectué à distance, lorsqu’une partie du cahier des charges est exécutable depuis un autre lieu que le bureau habituel. La périodicité du télétravail peut être modulable: en continu, quelques heures ou quelques jours par semaine. Parmi ses avantages: une concentration accrue, un gain de temps grâce à la réduction du temps de trajet, la réduction des surfaces de bureau et de la pollution.
La rédaction d’un avenant au contrat de travail est fortement conseillée. A noter que les demandes de télétravail sont souvent refusées à cause de problèmes d’organisation, d’un manque de confiance et d’un faible encadrement. Les nouveaux outils de travail permettent souvent de surmonter ces obstacles. L’être humain apprend vite à travailler autrement, surtout si les avantages sont identifiables pour tous.
Le respect du cycle de vie ou «la gestion des âges». L’âge ne devrait pas se limiter à un indicateur dans un tableau de bord RH. Intégrer le facteur «âge» dans un dispositif de gestion permet au contraire de répondre aux besoins variés de chaque collaborateur tout au long de sa trajectoire professionnelle. Il s’agit notamment de prendre en compte et d’anticiper l’organisation du travail aux différentes étapes de la vie. Transmission de savoir, premier emploi, réduction du temps de travail, plan senior, plan d’organisation du travail adapté, prise en compte de la santé du collaborateur… Mener une politique active de ce type exige un investissement continu et continuel
Le partage d’employés. Ce modèle d’aménagement de l’organisation du travail est une solution innovante bien adaptée à une période de crise. L’employé reste salarié auprès de son entreprise. Mais celle-ci le «prête» à une société demandeuse dans le respect des conditions de travail d’origine.
L’entreprise qui prête, facturera les services de ses collaborateurs à l’entreprise hôte. Cette transaction est limitée dans le temps et s’exécute de préférence dans la même région. En France, les entreprises vont encore plus loin: elles organisent des regroupements d’employeurs réunissant plusieurs sociétés d’un même secteur qui mettent à disposition leurs collaborateurs. Ces derniers partagent leur temps de travail entre différents employeurs dans un territoire géographique proche. Le groupement devient, juridiquement et socialement,l’interlocuteur unique de l’employé.