Incompréhensions globales
"Think global, act local." Vraiment? C'est justement là, l'origine de ce que Serge Panczuk appelle la "global mistake".
Les Américains savent reconnaître les qualités de leur pays. Peu de nations disposent de cette capacité à afficher leur fierté. Ceci est sans conteste une force admirable. Ici en Californie, le «Made in USA» s’appelle Tesla (automobile), un des plus beaux exemples de la capacité des USA à intégrer, réagir et innover. Mais d’autres exemples – moins connus – apparaissent partout. Regardez par exemple ce que va devenir Shinola, une marque qui ose relancer l’horlogerie made in US.
Il y a un autre domaine où le «Made in USA» s’exporte parfaitement bien, et ceci depuis des décennies: le leadership et les «Human Resources». Les USA restent le centre du «leadership world». C’est en partant de ce constat que j’ai décidé de partager avec vous quelques réflexions, mélange d’admiration, de respect mais aussi de prise de recul. Parce que, qui aime bien châtie bien! Nos collègues américains sont en train de prendre conscience du poids du monde sur leur économie, mais aussi sur leur quotidien. En échangeant avec des amis, des collègues HR, étudiants d’UCI ou avec des consultants en leadership, je me rends compte du bouleversement qui s’annonce. Essayons d’en savoir plus.
Pour cela, je vous propose de reprendre quelques phrases qui ponctuent les échanges lors des meetings. Elles sont caractéristiques d’une culture managériale, et influencent bien des comportements. Elles semblent anodines, mais sont pourtant fortes de sens. Commençons ce voyage en «Made in USA» par un mot banal, qui s’affiche fièrement sur de nombreuses cartes de visite. Il n’y a pas une entreprise qui ne se qualifie comme telle. Et pourtant, ce simple mot est à l’origine de bien des incompréhensions: «global».
Global, c’est tout d’abord l’affirmation d’un pouvoir. Celui d’une présence partout dans le monde. C’est d’ailleurs l’origine du malentendu. Global reste un qualificatif géographique et non pas managérial. Tout du moins, pas complètement. Dans la bouche de nos collègues américains, «global» est avant tout le synonyme de «partout». Mais surtout de: «comme nous». Il est indéniable que les Américains sont les maîtres de la culture «corporate» autant que de la «world» culture. On ne compte plus les succès dans la capacité à exporter des modèles marketing, des marques ou des concepts. Global est justement un mot qui résume à lui seul cette capacité à imposer un modèle.
Pour beaucoup, il s’oppose à «local». «Think global, act local». Vraiment? C’est justement là, l’origine de ce que j’appelle la «global mistake». En effet, comment peut-on agir «local» si la pensée est unique? Les RH australiens, chinois, coréens et européens l’ont compris depuis longtemps. Le mot «global» ne reflète pas la réalité «managériale» du monde. Le vrai mot devrait être «international».
«Think international, act local». La différence est fondamentale. Je l’explique souvent à mes collègues avec un exemple très simple. Le local est une soupe: un mélange de légumes différents qui produisent un goût et une couleur. La fonction RH devient dans ce cas un mixeur et un broyeur! L’international est une salade. Les légumes restent séparés. Ici pas de «RH mixer», mais notre fonction RH devient la sauce. Car notre job est de donner du goût à la salade par une capacité à associer les bons ingrédients.
L'auteur
Serge Panczuk est Vice President Human Resources International chez Edwars Lifesciences, basé en Californie.