Construire un département RH

«J’ai sous-estimé les enjeux politiques»

«Je venais d’accompagner plusieurs acquisitions en Afrique du Sud pour une grande société industrielle suisse. Comme cela faisait plusieurs années que j’étais à l’étranger, j’ai demandé au siège à Genève de me trouver quelque chose en Suisse. J’étais prêt à faire n’importe quoi. Quelques mois plus tard, on m’a offert le poste de DRH Europe, Afrique et Moyen-Orient. Je leur ai dit: «Mais je n’ai jamais fait de RH!». Ils m’ont répondu: «Justement, on cherche quelqu’un de la ligne». Cela a fait du bien à mon égo. J’ai dit oui. Comme j’avais pris des habitudes d’indépendant durant mes différentes missions à l’étranger, mon seul souci était les luttes de pouvoir et les enjeux politiques qui sont monnaie courante dans les sièges mondiaux des grands groupes. Ces enjeux causeront d’ailleurs ma chute.

En arrivant dans mes nouvelles fonctions à Genève, j’ai très vite été confronté à plusieurs difficultés. J’ai constaté par exemple que la Fonction RH était un service bureaucratique qui fonctionnait en vase clos. De plus, les RH ne se rendaient pas compte du confort dans lequel ils travaillaient. Et avaient tendance à porter des jugements sur les équipes à l’international. La plupart des collaborateurs de mon équipe n’étaient jamais allés travailler à l’étranger et pourtant ils prenaient des décisions RH pour l’Europe, l’Afrique et le Moyen-Orient.

Mon approche très business de la fonction RH n’a pas plu au premier abord. A 43 ans, j’étais encore un novice dans les enjeux politiques d’une organisation. Je pensais qu’avec mon enthousiasme et mon dynamisme, j’allais changer les mentalités mais j’ai dû me rendre à l’évidence: on ne change pas si vite les mentalités suisses (rires). Mon erreur a été de sous- estimer le temps qu’il faut pour comprendre les dynamiques d’une organisation et pour embarquer le management de la ligne avec moi dans les changements que j’avais l’intention d’introduire.

La fin a été assez abrupte. Six mois après mon entrée en fonction, le DRH du groupe est venu me trouver. Il m’a dit: «Tu as brisé trop de ponts. Plus personne ne te soutient. Il m’a ensuite proposé de retourner dans mon ancienne unité et de poursuivre l’aventure. Mais j’étais blessé dans mon orgueil. Je leur ai demandé de me faire une bonne offre et je suis parti deux jours plus tard. Après une pause de trois mois j’ai changé d’orientation.»

Peter Stämpfli

Peter Stämpfli dirige les services généraux de la société CRIF (logiciels informatiques) depuis 2006.
 

 

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