La femme connue comme inconnue
Confession. J’ai décidé que cette chronique devait être la dernière. Après? Années de provoc-actions. A cette occasion, j’aimerais dire les dons que j’ai reçus des personnes au féminin. Ce que je dois aux femmes et que je me dois de reconnaître et de célébrer. Avec dans l’idée qu’un mâle, une personne au masculin, doit se libérer de ses angoisses et de sa violence en se laissant apprivoiser et élever par un féminin pluriel.
«Vous les inconnues qui nous révèlent, vous êtes les ad-venir de l’homme.» Maxime Morand
A l’heure où les genres s’affichent et veulent se comparer pour mieux s’égaliser, j’aimerais partager un chemin de découverte. Le chemin, c’est «hodos», en grec, qui forme le mot méthode: le chemin que l’on prend. Découverte de la vérité, non pas comme définitive, en allemand: Wahrheit; mais comme une errance attentive: Wahrnehmung, prise de ce qui pourrait être vrai. Donc, je vais raconter un chemin de surprises à la recherche de la vérité du féminin.
Confession. J’ai longtemps considéré les femmes comme des êtres à part: sublimes, donc inatteignables, écervelées, donc méprisables. Il a fallu du temps pour concevoir qu’elles pouvaient naviguer sur ma planète dans les mêmes océans d’intelligence, de tendresse et de force.
Relisons la naissance du monde, la Genèse. Adam, administrateur, donc organisateur structurant le monde, avec Eve, la vie qui coule comme une source. Lorsqu’il la voit: le texte officiel dit qu’il s’écrie que c’est la chair de sa chair et l’os de ses os. Le texte hébreu original dit qu’Adam s’exclame: «C’est la chair mieux que ma chair et mes os mieux que mes os!!!» La langue hébraïque, étant plus concrète qu’abstraite, utilise deux pôles (chair et os) pour dire ce qui est au milieu (la personne). Cela veut donc dire que la structure (os) et la vie (chair) d’Eve, donc sa personne, est le parachèvement total d’Adam! Plus loin dans le texte, leur mise en relation leur fait changer de nom: ils quittent leurs différences et passent d’Eve et d’Adam à Ischa et Isch. La racine Isch voulant dire «Vis-à-Vis», Isha étant le féminin de Isch. Le regard échangé de l’homme et de la femme crée des personnes en vis-à-vis! Eve et Adam sont dans une relation qui les transfigure. Ils sont des vis-à-vis qui se donnent visage (figure) l’un vers l’autre. On pourrait relire Emmanuel Lévinas sur sa philosophie du visage qui ne peut jamais entièrement s’approprier, car tout visage contemplé dépasse toute capacité de le circonscrire exactement.
Imaginez que les relations femme-homme créent une trans-figuration des différences de genre pour accéder à un simple regard en vis-à-vis sans pouvoir sur l’autre.
Confession. Il a fallu que je passe par cette découverte pour que mes désirs et mes émotions se mettent en processus d’apprentissage pour un but final encore à atteindre.
Poursuivons les chemins de découvertes. Le créateur, dans le livre des livres, donc la bible, est caractérisé, dans son amour de la vie, par un féminin pluriel. Il est dit, du maître de l’univers, que, pour les humains, il a des entrailles qui se tordent de tendresse. Et l’expression, les «rarahmin» sont au féminin pluriel. Le Seigneur de l’Univers, figure donnée comme patriarcale, nous aime comme une femme aime. Dieu, est un féminin d’amour.
Confession. Cela m’a fait mesurer que cela ne valait pas la peine d’apprendre à ne pas pleurer et à ne pas demander de l’aide et de ne pas dire sa douleur, entrailles nouées.
Tout cela pour vous dire, gentes dames et demoiselles, que pour nous, les mâles, la vie est un chemin de révélation, (de velum: voile), de dévoilement. Nous sommes de vous fort curieux, nature oblige, mais à vos approches, nous sommes dévoilés, donc nus, vulnérables, à la merci de votre regard, de votre vis-à-vis ou de son absence.
Lorsque je parcours Facebook ou LinkedIn et que je me laisse entraîner sur des textes et des vidéos sur ce que les femmes savent mieux faire que les hommes, je me mets en mode humour et j’enclenche une sereine contemplation. Je considère tous les visages de toutes les femmes qui m’ont donné à voir, à entendre, à sentir, à ressentir, à comprendre, à déchiffrer, à toucher: la hauteur, la profondeur, la largeur et la longueur d’une vie qui ne serait pas une vie sans ces rencontres.
Confession. Merci à toutes celles qui m’ont enlevé les voiles de mes yeux, surtout le grand tissu d’arrogante fierté qui recouvrait mes peurs et mes faiblesses.
Bien sûr, comme disent Aristote et Thomas d’Aquin du Maître de l’Univers, chaque femme est connue comme... inconnue. Vous les inconnues qui nous révèlent, vous êtes les ad-venir de l’homme. Vous l’invitez au vis-à-vis, visage à visage, pour une intelligence, une force et une tendresse au féminin pluriel. Ma singularité s’ouvre à tout l’univers. Merci.