La transversalité des ressources nécessite une coordination permanente
Diriger un groupe d’entreprise de trois PME aux missions distinctes requiert chaque jour une certaine remise en question dans l’organisation des projets et l’optimisation de mes équipes. Chaque projet est un nouveau challenge et même si la plupart du temps la problématique du client nous est connue, la mise en œuvre est toujours différente.
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En tant que CEO de trois sociétés aux métiers si différents, la chance pour moi est de bénéficier de collaborateurs d’une société pouvant contribuer à aider les collègues d’une autre société. Cette disponibilité immédiate des ressources est un formidable accélérateur de technologies et nous permet d’innover et réagir très rapidement aux attentes du marché.
Mais la transversalité des ressources nécessite une coordination permanente et le succès passe principalement par l’intérêt spontané que chacun voit d’entraider ses collègues et la fierté de faire partie d’une équipe gagnante, qui maîtrise des techniques comme nulle autre.
Mais ne nous y trompons pas, l’équilibre entre la performance et la rentabilité d’une entreprise dépend fortement de la contribution de chaque personne et du potentiel de développement des équipes. Dans mon cas, j’engage principalement des consultants et des experts, chaque personne est un entrepreneur au service des projets clients. Ce qui requiert d’avoir une forte personnalité, une immense créativité, une rigueur et un engagement au-delà des standards. Pour réussir à développer les talents, mon challenge est d’offrir un environnement de travail stimulant, favorable aux échanges, confortable et sans contrainte d’espaces ou d’ergonomie, d’horaires, qui se joue des limites en quelque sorte.
Le modèle de management que j’ai développé est orienté sur une liberté d’action maximale des consultants et intervenants. Ils connaissent parfaitement leur marge de manœuvre et, en cas de doute, font appel à l’équipe et en dernier recours à mon intervention, dans le cas par exemple d’une question d’ordre stratégique en lien avec l’analyse de risques, des questions éthiques ou encore financières.
Ce modèle privilégie l’initiative et l’autonomie à outrance, mais il n’est pas sans défis: pour certains caractères, il peut être déstabilisant car il réclame une forte confiance en soi. Les consultants engagent la marque de leur entreprise respective lors des interventions et les responsabilités sont conséquentes.
Je compte au minimum deux ans pour qu’un collaborateur, dans ce modèle, soit autonome et passe au degré senior, sans supervision d’un tiers. À partir de ce moment, l’organisation devient pour lui une boîte à outils pour conduire ses projets avec l’ensemble de l’équipe mise à sa disposition, tout comme il se rend disponible aux autres consultants ... Cette délégation croisée est l’une des clés de succès et règle d’emblée la question de la polyvalence et de la complémentarité. Ce mode de travail agile est supervisé par un ERP que nous avons développé et qui est le cœur de gestion des mandats, du planning et des données clients. C’est grâce à cet outil que nous pouvons conduire une centaine de projets par année, à distance et par délégation. Sans cette interface, nous serions dans une organisation du travail traditionnelle soumise à des contrôles permanents et des sources d’erreurs fréquentes. Ce serait impossible de travailler avec la vitesse de croisière actuelle!
Nos clients sont confrontés à des défis inouïs pour assurer la compétitivité et garantir leur pérennité, voire leur survie à court terme. Même si cette réalité est vraie depuis des années, des changements profonds vont avoir lieu dans le fonctionnement et dans les exigences qui leurs sont posées: augmentation des contraintes légales, concurrence des marques employeurs sur le marché du recrutement, surcharge chronique qui affecte la santé des collaborateurs, mondialisation et dématérialisation à outrance...
Il va falloir apprendre à travailler en réseau, utiliser les ressources avec beaucoup plus de rendement (les talents ne sont pas suffisamment captés), développer l’endurance des collaborateurs exposés au stress, rendre l’entreprise plus «friendly» pour supprimer au maximum les sources d’insatisfaction, autant de freins au potentiel... Notre travail sera de faire mûrir et réfléchir les dirigeants sur ces nouveaux modèles d’organisation. Cette vision est d’autant plus difficile à concrétiser que nous devons aussi assurer le quotidien de notre propre survie: convertir des idées et des convictions en produit tangibles et les commercialiser ne se fait pas du jour au lendemain!