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Photo:123RF
Dans les dictionnaires de français, le premier critère de définition du substantif «recrutement» renvoie généralement à l’univers militaire: action de recruter, c’est-à-dire de lever des recrues, d’enrôler des troupes. L’action «d’engager des gens pour tenir certains emplois» n’apparaît dans le Larousse qu’en troisième position...
Sans doute cet ancrage sémantique explique-t-il pourquoi le recrutement professionnel demeure dans nos sociétés contemporaines un exercice protocolaire et froid: aux descriptions de poste stéréotypées font écho des CV et lettres de motivation tout aussi lissés, la rencontre recruteur-candidat obéissant à une séquence stricte, cadencée, normée; tant et si bien d’ailleurs que le tout semble parfois relever du jeu de rôle, réglé au métronome, chacun s’efforçant de se conformer aux attitudes et discours attendus.
Rien d’étonnant, dans ce contexte-ci, à ce que de nombreuses embauches échouent à très court terme. Si l’essence de la démarche consiste en effet à profiler le meilleur candidat dans un univers idéalisé, à gonfler les exigences de façon à écrémer, alors la réponse équitable du recruté ne peut être autre que celle de la surenchère: l’excès de compétences. Voilà une porte grande ouverte aux erreurs de casting.
Ce jeu de dupes mutuel, où chacun ment un peu à l’autre, est-ce donc là la meilleure façon de réussir un recrutement?
Aujourd’hui, il y a lieu de s’interroger sérieusement sur les processus de recrutement en se posant la question suivante: un dialogue qualitatif, vrai, peut-il s’engager de part et d’autre qui permette d’aboutir à la conclusion simple: avons- nous envie – ou non – de nous projeter ensemble? Utiles en ce sens qu’ils résument la situation et permettent un premier débroussaillage, job descriptions, CV et lettres de motivation, dès lors qu’ils deviennent l’unique instrument du recrutement, sont nocifs: ils concentrent la discussion sur la dialectique exigence-compétence. Or c’est bien d’humains, d’affinités, qu’il s’agit de parler: si nous ne nous comprenons pas dans nos histoires respectives, pouvons-nous jamais travailler – et vivre – ensemble?
Depuis quelques années, les outils de «matching» ont ouvert la voie de la rénovation en proposant ouvertement de repenser le recrutement en faisant fi de tout CV ou lettre de motivation; un petit pavé jeté dans la mare RH. Mais, même dans ces plateformes, l’exercice reste protocolaire: les employeurs postent «des annonces» et les candidats des «souhaits»; il n’y a que peu de dialogue.
Dans cette voie – fertile – du matching, il faut donc continuer l’exploration: comment faire en sorte que ce dialogue de vérité s’instaure plus tôt dans le processus de recrutement? Et il n’est pas tant question ici d’un dialogue au sens premier, d’un échange verbal face-à-face, que d’une meilleure intégration de critères plus qualitatifs tout au long de la démarche.
Recruter, c’est constituer le bon groupe, trouver l’alchimie qui fera le succès. Cela passe par différentes étapes, mais l’humain arrive généralement trop tard. Peut-être l’entreprise devrait-elle déjà de son côté apprendre à se raconter, d’emblée, avec franchise, de sorte à éviter tout malentendu? Comment sinon jauger l’empreinte potentielle du candidat dans son dessein et sa dynamique?
4HumanBeing
4HumanBeing est un think tank (sans visées commerciales) constitué en 2013 par un groupe d’entrepreneurs de PME romandes autour d’un axe principal de réflexion: la meilleure promotion de l’humain dans l’entreprise et la proposition d’une alternative à la pensée RH dominante.
Membres fondateurs: Penda Coulibaly (Ampersand World SA), Claire Matias (Expert’Eyes), Pascal Mino (Mino SA), Damien Gentilhomme (GR Creative SA), Cyrill Borgeaud (Metrisis SA), David Gerosa (Rhônalia SA) et Raphaël Bennour (Rhônalia SA). En partenariat avec HR Today, 4HumanBeing souhaite diffuser ses idées et stimuler le débat dans la communauté RH de Suisse romande.