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Organisations apprenantes
L’échelle d’inférence pour mieux écouter l’autre
Nous construisons naturellement au fil du temps nos croyances, qui nous servent de clés de lecture pour comprendre le monde. Et si nous utilisions les clés des autres pour explorer leur univers?
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Qui d’entre nous ne s’est jamais posé des questions telles que: Comment mon message a-t-il pu être interprété de cette manière? Pourquoi a-t-il pris cette décision? Comment pouvons-nous avoir des ressentis si différents au cours de la même réunion? Les différences d’interprétations et leurs conséquences sont souvent sources de tensions, de résistances, voire de conflits.
L’échelle d’inférence: filtre des informations
Chris Argyris et Peter Senge ont respectivement défini et popularisé «l’échelle d’inférence»: une façon imagée de décrire le cheminement mental par lequel l’abstraction va grandissant et peut engendrer des croyances et des certitudes erronées. Chacun d’entre nous a tendance à penser que nos croyances constituent LA vérité, que cette vérité est évidente pour tous, que nos croyances sont basées sur des données objectives et réelles. Mais en fait, ces croyances sont basées sur des conclusions déduites de nos expériences personnelles et passées. Elles nous amènent rapidement – consciemment ou inconsciemment – à porter sélectivement notre attention sur certains éléments plutôt que sur d’autres. Nous les utilisons ensuite pour tirer des conclusions et prendre des décisions. Ainsi, nous développons et renforçons les croyances et les convictions qui continueront d’influencer notre façon de juger les situations. Prendre conscience de ce mécanisme et en comprendre le fonctionnement permet d’éviter de reproduire des schémas et de surmonter les résistances au changement, par exemple.
Exemple d’application
Trois ans après la mise en place d’une entité offshore, de très fortes tensions se sont manifestées entre cette entité et le siège de la société. Leurs sources étaient: une inadéquation entre les bénéfices escomptés et les résultats obtenus, et une incapacité à collaborer de façon efficace. En procédant à un diagnostic partagé et en suivant des ateliers de travail, les membres des équipes ont pu prendre conscience des divergences dans la façon d’analyser, d’interpréter et de juger les incidents et la situation.
Cette prise de conscience s’est faite lors d’une activité pendant le premier atelier. Chacune des équipes a répondu, de façon indépendante, à des questions identiques inspirées de l’échelle d’inférence, telles que: Quelles sont les choses que vous observez/remarquez dans le cadre de vos interactions? Comment interprétez-vous ces observations? Les différences sont devenues évidentes dans le travail qui a suivi (présentation croisée, dialogue). La discussion a également mis en évidence un écart considérable entre l’intention des membres des équipes et l’impact de ces derniers.
Cette étape fut décisive: elle permit de bâtir des fondations pour la suite de la démarche. Forts d’une compréhension mutuelle, les participants sont en effet parvenus à définir la façon dont ils souhaitaient collaborer pour atteindre les objectifs fixés tout en tenant compte des préférences culturelles, des impératifs opérationnels et des spécificités de chaque situation. Enfin, chose très importante, les deux équipes ont pu finir par s’entendre sur la manière dont elles évalueraient les résultats et la dynamique entre les deux équipes au cours de l’année suivante. Ceci dans un esprit de collaboration, d’«apprenance» et d’amélioration continue.
En pratique
L’échelle d’inférence peut être utilisée pour:
- devenir nous-mêmes plus conscients de notre façon de penser et de raisonner;
- rendre notre processus de raisonnement et de réflexion plus transparent aux autres;
- aider à résoudre les conflits et tensions entre personnes;
- amener les équipes à améliorer les interactions interpersonnelles entre leurs membres ainsi qu’avec les autres équipes, départements, entités.
Elle peut être appliquée seule ou en combinaison avec d’autres outils. Elle est très simple à utiliser dans des situations de coaching individuel, de développement d‘équipes ou d’organisations. Son impact augmente lorsqu’elle est reprise par les collaborateurs eux-mêmes au quotidien, comme support de réflexion et d’analyse.
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