Législation

Droit du travail: les changements à venir en 2024

Plusieurs dispositions du droit du travail suisse entrent en vigueur en début d'année. Tour d'horizon des nouveautés à venir en 2024. 

Décès d'un parent peu après la naissance d'un enfant

Le parent survivant bénéficiera d’une prolongation de son congé de maternité, respectivement de paternité, selon les modalités ci-dessous.

Décès de la mère

En cas de décès de la mère dans les 14 semaines qui suivent la naissance de l’enfant, le père, respectivement l’épouse de la mère, bénéficiera en plus de son congé de paternité de deux semaines, d’un congé supplémentaire de 14 semaines à prendre de manière ininterrompue immédiatement après le décès et de manière ininterrompue; il prendra fin de manière anticipée notamment en cas de reprise d’une activité lucrative pendant le congé supplémentaire.

Décès du père ou de l’épouse de la mère

En cas de décès du père ou de l’épouse de la mère au cours des six mois suivant la naissance de l’enfant, la mère aura droit en plus du congé de maternité de 14 semaines, à un congé supplémentaire de deux semaines à prendre selon les mêmes modalités que le congé de paternité.

Liste des professions soumises à l'obligation d'annonce

La liste des genres de professions soumises à l’obligation d’annonce est déterminée par le taux de chômage; s’il s’élève au moins à 5% dans un genre de profession, celui-ci est soumis à l’obligation d’annonce.

Le nombre des genres de professions soumis à l’obligation d’annoncer les postes vacants diminue en 2024, comme cela a été le cas pour 2023. L’année prochaine, plus que 3,2% des personnes actives travailleront dans des genres de professions soumis à l’obligation d’annonce. Notamment les aides de ménage et de nettoyage dans les bureaux, hôtels et autres établissements ne sont notamment plus concernés.

Salaires bruts minimaux cantonaux en 2024 

Genève

Chaque année, le salaire minimum est indexé au coût de la vie, sur la base de l'indice genevois des prix à la consommation. Pour l’année 2024, le salaire brut minimum genevois s'élève à CHF 24.32 de l'heure. Les employés des secteurs de l'agriculture et de la floriculture ont leur propre salaire horaire brut minimum qui sera de CHF 17.87 en 2024.

Neuchâtel

Pour l’année 2024, le salaire brut minimum de base se monte à CHF 21.09 de l’heure. Le montant du salaire brut minimum dans les secteurs de l’agriculture, de la viticulture et de l’horticulture sera de CHF 17.93 de l’heure.

Une vraie retraite flexible dès le 1er janvier 2024

La notion d’âge de la retraite laisse la place à celle d’âge de référence dès le 1er janvier 2024 dans la législation suisse. La réforme AVS 21 permet un passage à la retraite plus flexible par suite de l’acceptation en votation populaire en septembre 2022 de la réforme Stabilisation de l’AVS (AVS 21). Plusieurs mesures de la réforme AVS 21 entrent en vigueur le 1er janvier 2024. Nous passons ci-dessous en revue les principales d’entre elles qui ont une incidence également pour l’employeur.

Perception flexibilisée de la rente

Les personnes bénéficieront d’une plus large palette de possibilités pour aménager leur passage à la retraite entre 63 ans (62 pour les femmes de la «génération transitoire» – voir ci-dessous) et 70 ans. Les taux actuels de réduction, respectivement d’augmentation, seront adaptés par le Conseil fédéral, au plus tôt pour 2027, selon l’espérance de vie qui augmente.

Anticipation

La principale nouveauté permet à l’assuré d’anticiper la rente non plus seulement en années, mais désormais en mois, la rente étant réduite selon un taux déterminé par le nombre de mois qui séparent la date d’anticipation et l’âge de référence.

Ajournement

Dans l’autre sens, l’assuré peut demander l’ajournement de la rente entre 66 et 70 ans. La durée de l’ajournement doit être au moins d’une année et ensuite, son versement peut être demandé pour n’importe quel mois. La rente est alors augmentée selon un taux déterminé par le nombre d’années et de mois séparant l’âge de retraite et la date de perception effective de la rente.

Retraite partielle

La flexibilisation est également améliorée par la possibilité d’anticiper ou d’ajourner une partie seulement de la rente, indépendamment de la poursuite ou non d’une activité lucrative. Le bénéficiaire peut donc, par exemple, choisir de réduire son taux d’activité et de compenser la perte de revenus en percevant une partie seulement de sa rente AVS. La fourchette possible de perception de la rente est fixée entre 20% pour la limite inférieure et 80% pour la limite supérieure. Les nouvelles dispositions permettent en outre de combiner anticipation et ajournement. Ainsi, le versement d’une partie de la rente peut être anticipé, tandis que la partie restante peut être ajournée.

Exonération pour les personnes qui continuent de travail- ler après l’âge de référence

Les cotisations des personnes qui continuent de travailler après l’âge de référence ne sont perçues que sur la part de revenu qui excède CHF 1'400.- par mois, CHF 16'800.- par année civile. Il est désormais possible pour le collaborateur de renoncer à l’exonération mentionnée ci-dessus. Le collaborateur qui y renonce doit informer son employeur avant le versement du premier salaire suivant l’âge de référence. Le choix demeure valable pour tout le reste de l’année civile et il peut être reconduit, ou non, avant le premier salaire de chaque année civile. L’information devra figurer sur la déclaration de salaires à la caisse de compensation.

Harmonisation de l'âge de référence femmes - hommes 

Le relèvement de l’âge de la retraite des femmes, de 64 à 65 ans, prend effectivement effet le 1er janvier 2025, par tranches de trois mois par année, pour atteindre l’harmonisation en 2028. Ainsi, les femmes nées en 1960 ne sont pas concernées. Ensuite, l’âge de référence est relevé comme suit:

  • 2024, femmes nées en 1960, âge de référence: 64 ans

  • 2025, femmes nées en 1961, âge de référence: 64 ans et 3 mois

  • 2026, femmes nées en 1962, âge de référence: 64ans et 6 mois

  • 2027, femmes nées en 1963, âge de référence: 64 ans et 9 mois

  • 2028, femmes nées en 1964, âge de référence: 65 ans

Régime spécifique pour les femmes de la «génération transitoire»

Des mesures compensatoires sont prévues pour les femmes nées entre 1961 et 1969 qui partiront à la retraite dans les 10 prochaines années. Elles continueront à pouvoir partir à la retraite à 62 ans. Dans cette hypothèse, la rente sera moins réduite que celle des autres assurées. Les femmes de cette génération qui choisissent de ne pas anticiper leur retraite recevront à vie un supplément mensuel de rente AVS.

Âge de référence de la prévoyance professionnelle (LPP, 2ème pilier) 

L’âge de référence de la prévoyance professionnelle, également fixé à 65 ans, s’effectuera au même rythme que celui mentionné ci-dessus pour l’AVS. La réforme AVS 21 introduit une offre minimale de possibilités qui correspond dans les grandes lignes aux possibilités offertes par l’AVS (retraite entre 63 et 70 ans et retraite partielle).

Hausse de la TVA 

Afin d’apporter une nouvelle source de financement à l’AVS, le taux ordinaire de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) augmente en 2024 de 0,4 point pour atteindre 8,1%. Le taux réduit passe à 2,6% et le taux spécial à 3,8%.

Contingents d'autorisations pour les ressortissants d'états tiers 

Lors de sa séance du 29 novembre 2023, le Conseil fédéral a adopté la révision partielle de l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative (OASA) pour 2024. Les nombres maximums pour les ressortissants d’États tiers et les prestataires de services en provenance de pays de l’UE ou de l’AELE sont maintenus, de même que le contingent spécial pour les travailleurs originaires du Royaume-Uni. En 2024, 8500 travailleurs qualifiés en provenance d'États tiers pourront à nouveau être recrutés: 4500 bénéficieront d'une autorisation de séjour (permis B) et 4000 d'une autorisation de séjour de courte durée (permis L). On peut encore mentionner à ce sujet que les contingents n’ont jamais été entièrement utilisés au cours des dernières années.

Télétravail des frontaliers 

Suisse – Italie

Les frontaliers auront la possibilité à compter du 1er janvier 2024 d’accomplir jusqu’à 25% de leur temps de travail à domicile, sans remettre en cause ni le statut de frontaliers, ni les règles d’imposition. Ils continueront à être imposés par voie d’imposition à la source au lieu de l’exercice de leur activité professionnelle. Des règles spéciales doivent encore être arrêtées par les deux pays concernant la période allant du 1er février au 31 décembre 2023. Par ailleurs, le télétravail jusqu’à 24,9% du temps de travail n’a aucune incidence en matière de sécurité sociale.

Suisse – France

Pour rappel, l’occupation en télétravail jusqu’à 40% d’un collaborateur résident en France n’a aucune incidence fiscale ni de sécurité sociale.

commenter 0 commentaires HR Cosmos

Pierre Matile, avocat, dirige depuis sa création en 1997 CJE Sàrl, Avocats, Conseillers d'Entreprises, spécialiste dans le conseil aux employeurs et le réglement des différends en travail du travail. Lien: www.cje.ch

 

Plus d'articles de Pierre Matile

Cela peut vous intéresser