Conseils pratiques

Les effets de l’intelligence émotionnelle sur la qualité du travail

Quel acteur offrant des activités de services ne s’est pas déjà demandé comment définir la qualité et surtout quels sont les facteurs qui l’engendrent?
Dans une vision simplifiée des choses, nous pouvons dire que: «Qualité du travail perçue par le client» = «Qualité intrinsèque du travail» x «Qualité de la relation avec le client». Certains se demanderont peut-être pourquoi cette équation fait appel à un produit et non pas à une somme. La raison est la suivante: si la «Qualité de la relation avec le client» est égale à zéro alors la qualité perçue est aussi égale à zéro, et ce, quelle que soit la «Qualité intrinsèque du travail». Or dans le travail de consultant qui est le nôtre (et dans bien d’autres activités) seule la qualité perçue compte, puisque que c’est le client qui évalue la qualité de la prestation fournie et donc la transforme en réelle valeur ajoutée. Il est dès lors crucial d’investir dans la «Qualité de la relation avec le client» et ne pas commettre l’erreur de se focaliser uniquement sur le facteur «Qualité intrinsèque du travail» fourni. 
 
Mais de quoi dépendent ces deux facteurs clés? On peut raisonnablement affirmer que la «Qualité intrinsèque du travail» dépend essentiellement de l’intelligence que j’appellerais «intellectuelle». Alors que de l’autre côté, la qualité de la relation dépend essentiellement de ce que d’aucuns appellent «l’intelligence émotionnelle». S’il est relativement aisé de comprendre ce qu’est l’intelligence «intellectuelle» (connaissances, capacité d’abstraction, habileté à cerner les interactions entre différents paramètres), il faut se poser la question de ce qu’est l’intelligence émotionnelle pour pouvoir la développer et l’utiliser. 
 

Définir l’intelligence émotionnelle 

Selon le Docteur Travis Bradberry (coauteur du livre «Emotional Intelligence 2.0»), l’intelligence émotionnelle se composerait de quatre facteurs: premièrement, la connaissance de soi (selfawareness), qui est la capacité à comprendre ses propres émotions au moment où elles se produisent et la capacité à comprendre ce qui «a tendance» à nous pousser dans nos limites. Deuxièmement, la gestion de soi (selfmanagement) qui représente ce que l’on fait de ses émotions lorsque l’on en a pris conscience. En effet, puisqu’on ne peut pas nécessairement faire disparaître nos émotions, il faut savoir les canaliser pour produire le comportement recherché. Troisièmement, la conscience sociale (social awareness) qui définit la capacité à comprendre les émotions et expériences que vivent les autres (ce qui nécessite de savoir décoder aussi le langage non verbal). Et quatrièmement la gestion des relations (relationship management) qui est la capacité à intégrer les trois premiers facteurs et les traiter de concert pour améliorer la manière d’interagir avec les autres.
 
Chez Chappuis Halder & Co nous considérons que la bataille pour la qualité (perçue!) se gagne aussi en amont, lors du recrutement. Pour ce faire, nous abordons concrètement la question sous plusieurs angles. 
 
Tout d’abord, pour le recrutement des consultants, nos grilles d’évaluations des candidats intègrent non seulement des critères tels que: structure et logique, rigueur, orientation vers les résultats, mais aussi la «gestion des relations», la capacité à travailler en équipe, la «capacité d’écoute», l’«énergie» et la «ténacité». Cela pousse les personnes impliquées dans le recrutement à clairement évaluer ces traits de personnalité. 
 

«Prendrais-tu ce candidat dans ton équipe?» 

D’autre part, nous impliquons énormément les consultants dans le recrutement de leurs futurs pairs. Les deux questions fondamentales que l’équipe de recrutement se pose sont: «Prendrais-tu ce candidat dans ton équipe?» et «Enverrais-tu ce candidat chez un de tes clients?». Ce qui implique de prendre en compte l’intelligence émotionnelle (qui aimerait prendre dans son équipe un candidat avec qui il ne réussirait pas à bien communiquer et à bâtir une bonne relation?). 
 
De plus, pour les recrutements de jeunes diplômés, nous impliquons des représentants de toute la pyramide hiérarchique, y compris des strates les plus juniors. Cela permet de prendre en compte des sensibilités très diverses et d’observer dans quelle mesure le candidat réussit à gérer la relation avec des profils variés. 
 
Enfin, nous demandons à tous les candidats (même pour les postes de stagiaires) de résoudre un cas pratique. Le candidat a 24 heures pour le préparer et le présenter comme s’il se trouvait devant un client. Cette manière de faire permet de voir comment le candidat gère, dans une situation stressante, la relation avec ses interlocuteurs et quelles sont ses réactions à des questions difficiles sur un sujet qu’il connaît mal. 
 
Certes, l’évaluation de «l’intelligence émotionnelle» lors du recrutement ne fait pas tout; il faut ensuite savoir l’utiliser à bon escient au quotidien, dans notre travail de consultant. Mais la prise en compte, en amont de la chaîne, de compétences émotionnelles en plus de celles intellectuelles et cognitives, permet de contribuer à la qualité perçue de notre travail. Cette qualité est, nous l’espérons, démultipliée par la qualité de nos relations, ce qui nous permet de faire la différence sur le long terme face à nos concurrents. 
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Luc-Olivier Suter est manager chez Chappuis Halder & Co à Genève, spécialisée dans le Management Consulting pour le secteur financier.
 
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