Formation et carrière

Les mutations de l’apprentissage intégré frappent à la porte

Le progrès technologique va de pair avec la formation et la formation va de pair avec le progrès technologique. Plus ce progrès est rapide, plus il faut acquérir rapidement de nouvelles qualifications. Aujourd’hui, la séparation entre travail et apprentissage s’est effacée: «travailler» c’est apprendre, et «apprendre» c’est travailler.

Notre société a subi une incroyable accélération au fil des siècles. S’il a fallu plus de 21500 ans entre l’utilisation de la première aiguille et le premier métier à tisser programmé vers 1805, la durée est déjà passée à 2300 ans entre le premier «télégraphe optique» des Grecs (425 avant JC, signaux avec un flambeau d’une montagne à l’autre) et le premier téléphone utilisable en 1876. L’ère de la radiodiffusion débute en 1906 avec la première transmission sans fil d’un message oral et fait place à la société de l’information. En 1981, le premier ordinateur voit le jour et l’ARPANET (prédécesseur d’Internet) devient plus accessible. Le mot Internet est utilisé pour la première fois en 1987; 27000 ordinateurs sont reliés entre eux. En 2000, 375 millions de personnes utilisent Internet dans le monde; en 2005, le chiffre est passé à 770 millions.

La seule constante, c’est le changement. Le passage de la société industrielle à la société de l’information a modifié les opinions, les valeurs et les comportements des individus, qui se répercutent sur l’état social. L’économie basée sur la société moderne de l’information et de la communication est marquée par la dématérialisation, l’accélération, la décentralisation et la globalisation. 

Il reste aujourd’hui peu de domaines de formation qui ne soient pas en plein bouleversement. Depuis les années quatre-vingt, une vague de réformes submerge les pays industrialisés: réforme de la formation universitaire, nouveaux systèmes d’évaluation et de qualification, réorientation du secteur tertiaire, adaptation des lois et ordonnances de la formation professionnelle, nouveaux certificats de qualité et apprentissage précoce de l’anglais. 

Il n’appartient pas à l’école d’engager des changements sociaux, de définir et d’essayer de nouvelles formes de vie en commun. Au contraire, l’école devrait réagir aux changements sociaux et répondre aux nouveaux besoins de l’état social et de l’économie. Les problèmes se situent au niveau du timing. Avec l’accélération croissante de la société du savoir, les écoles doivent adapter leurs structures et stratégies afin de ne pas se retrouver un pas derrière les nouveaux besoins parfois temporaires de la société et du marché.

Apprendre pour la vie se transforme en apprendre tout au long de la vie. Le passage d’une formation pour la vie à une formation tout au long de la vie conduit à la nécessité de promouvoir ce nouveau type de formation: le renouvellement très rapide des techniques modifie en permanence le profil des compétences requis dans les différentes activités. Nos systèmes de formation doivent intégrer la formation initiale et la formation continue en un tout cohérent et équilibré. Dans ce contexte et grâce aux nouvelles technologies de communication, la formation à distance permet de jouer un rôle déterminant. Un nouveau type d’apprentissage voit en outre le jour: l’apprentissage informel. Celui-ci va gagner en importance à l’avenir. Les capacités acquises de manière informelle devront être accréditées au même titre que les connaissances acquises en milieu scolaire.

Si l’on considère qu’aujourd’hui, seulement quelque 40% de la population1 suit régulièrement une formation continue et que ces 40% représentent la partie de la population qui a déjà un haut niveau de formation, nous sommes encore loin du life long learning si prisé. Lorsque la formation est un investissement social et donc un facteur qui détermine la puissance économique et lorsque l’économie demande de nouvelles qualités telles que la capacité de se former, de travailler en équipe et d’être critique, la politique éducative doit aborder la question de la formation continue avec plus d’engagement. 

Apprendre à apprendre – le défi d’une profonde mutation. Parmi les savoirs, savoir-faire, savoir-être et les compétences clés à privilégier pour les formations du futur, on cite notamment: apprendre à apprendre. La quantité de connaissances importe moins que les compétences et aptitudes que l’on a développées. Apprendre à apprendre est une compétence active gérée par les apprenants eux-mêmes. Elle vise une meilleure préparation aux exigences toujours plus élevées du monde du travail.

Développer l’entrepreneuriat. Enfin, l’esprit d’entreprise s’impose comme une exigence incontournable. Les futurs entrepreneurs ont trois défis majeurs à relever: maîtriser la complexité, percevoir les attentes et mobiliser les énergies. S’y ajoutent des compétences de conduite et de communication.

Il semble que notre société n’ait pas compris, faute sans doute de connexion suffisante entre l’économique et le politique, que développer l’entrepreneuriat est aujourd’hui aussi vital que d’enseigner la lecture et l’écriture aux enfants du siècle dernier.

La question de savoir si, à l’avenir, nous réussirons à adapter la formation professionnelle aux développements techniques croissants et toujours plus rapides dépend uniquement de notre capacité à travailler en partenariat avec les politiques, l’économie et les services publics.

 

commenter 0 commentaires HR Cosmos

Serge Imboden est vice-directeur de l'Office fédéral de la formation professionnelle et de la technologie, où il dirige la Formation professionnelle.

Plus d'articles de Serge Imboden