Les psychologues du travail et le New Work
Ils sont de plus en plus indispensables en entreprise, sans que l'on connaisse très bien l'étendue de leurs compétences: les psychologues du travail et des organisations. Nous inaugurons ici une série de six chroniques sur le rôle de ces professionnels pour les RH, en nous intéressant au New Work.
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Les changements opérés dans les organisations pour répondre aux nouveaux défis sont en général désignés par le terme New Work. Cette expression ne se définit pas comme une nouvelle technique de travail, mais regroupe plusieurs concepts. Un exemple emblématique, que beaucoup de personnes ont expérimenté à cause ou grâce à la pandémie, est le télétravail. Cette expérience a accéléré l’introduction ou une utilisation accrue de nouveaux outils numériques permettant aux personnes de collaborer efficacement, où qu’elles se trouvent. D’autres exemples sont l’introduction de méthodes dites «agiles» qui permettent d’accélérer la mise en œuvre des projets et favorisent le développement d’idées innovantes. Être agile signifie procéder par étapes, plutôt que de préparer en détail et dès le début toutes les parties d’un projet.
Au niveau des structures, nous observons une volonté de déconstruire les silos afin de favoriser une collaboration plus transversale, décentralisée et en réseaux de cercles interconnectés. Cette transformation des structures se reflète également via l’aménagement d’espaces ouverts fournissant des endroits désignés et équipés selon les différents besoins.
De l’organisation traditionnelle au New Work
La transition d’une organisation traditionnelle vers le New Work n’est pas simplement une «mise à jour du système», mais un véritable changement de paradigme. Se cache derrière ce paradigme une vision de l’être humain très différente de celle qui imprègne encore la plupart des cultures organisationnelles actuelles, un lointain héritage du taylorisme. En effet, la pensée et l’action des organisations marquées par les croyances du taylorisme sont en général en décalage avec certaines conceptions liées à la confiance, au pouvoir et au droit à l’erreur telles que proposées dans le contexte du New Work. Les trans- formations vers des approches New Work modifient les tâches, les rôles et les fonctions ainsi que la collaboration collective. Une grande partie des responsabilités passe des cadres aux collaboratrices et collaborateurs, ce qui entraîne une nouvelle répartition du pouvoir et de l’influence. Cette mutation impacte fondamentalement la posture au niveau leadership. Les cadres ne sont plus les personnes qui décident et contrôlent, mais qui veillent essentiellement à ce que l’environnement de travail soit le plus optimal possible. Un leadership efficace se manifeste par l’autorisation des divergences, une acceptation de l’ambiguïté et la présence d’espaces de réflexion.
Transformer une organisation vers une approche New Work est une aventure passionnante, pour laquelle il n’existe pas de mode d’emploi. Chaque organisation va devoir évaluer ses besoins et possibilités en fonction de sa phase de développement et du marché. Elle initiera les changements en veillant à la cohérence entre culture, stratégie, leadership et environnement changeant. Elle vérifiera en permanence si la stratégie telle que conçue permet de faire les adaptations systématiques pour atteindre ses objectifs. Elle s’assurera que les structures permettent d’institutionnaliser les pratiques et lieux de réflexion afin de ne pas se laisser déporter par la vitesse des changements et d’épuiser ainsi ses équipes. Elle scrutera les processus pour garantir leur cohérence, soit par exemple: l’équilibre entre la valeur de la confiance et l’énergie dépensée dans des procédures de contrôle et de reporting ou encore la cohérence entre le système d’évaluation de performance respectivement l’importance déclarée du travail d’équipe.
À travers son leadership, l’organisation crée un environnement dans lequel les collaboratrices et collaborateurs évoluent dans un climat de sécurité psychologique. Face à l’augmentation des changements, les collaboratrices et collaborateurs sont amené·e·s à se développer en permanence, à acquérir de nouvelles compétences et à prendre l’initiative d’apprendre. Cela nécessite un soutien à travers des offres de formation adaptées de type 10-20-70 : 10% formation traditionnelle, 20% formation à travers l’échange (mentoring, coaching, groupes de réflexions et d’échanges de pratiques, feedback de pairs) et 70% expérience pratique enrichie (collaboration avec d’autres équipes, départements, job rotation).
PSY4WORK.CH est l’association suisse des psychologues du travail et des organisations. Sa mission est de promouvoir la psychologie du travail et des organisations et de fédérer ses membres afin de contribuer à leur développement professionnel. Cette chronique est tirée d’un guide pratique qui sera diffusé gratuitement dans sa version intégrale sur www.hrtoday.ch.
Adaptation: Francesca Sacco