A l’origine de cette étude, le constat d’un manque d’information en Suisse sur les métiers de la transformation digitale et les profils recherchés en Suisse romande. Une première analyse de 200 offres d’emploi liées au digital confirme le besoin d’enquête: sur les 200 offres récoltées (de juin 2017 à février 2018), 160 comportent un intitulé de fonction différent. Parmi eux, quels sont donc les principaux «métiers du digital». Pour le préciser, ces intitulés ont été comparés aux métiers repérés dans des référentiels de métiers européens à l’aide des mots clés «digital» et «numérique». Enfin, des entretiens avec des experts du digital en Suisse romande ont complété l’identification des «métiers du digital»? Le recoupement de ces différentes sources a permis d’élaborer un corpus pertinent pour la Suisse romande (voir l’encadré ci-dessous).
Enquête quantitative
Afin de mesurer l’importance des métiers identifiés, l’étude s’est poursuivie par une enquête quantitative auprès des entreprises romandes. 538 d’entre elles ont répondu, les réponses émanant dans 85% des cas de la direction de l’entreprise – signe vraisemblable de l’intérêt porté à la question. Selon les résultats de cette enquête, les entreprises ont jusqu’à présent principalement investi dans des activités liées aux réseaux sociaux, à la création de contenu web et au traitement des données. Mais, selon leurs prévisions pour les trois prochaines années, l’emploi du digital se déplacerait vers d’autres activités: l’analyse des besoins clients et celles liées à la conception et à la mise en œuvre de la stratégie digitale – fonctions actuellement les plus difficiles à pourvoir. Les questions de sécurité de l’information prendront également de l’importance.
Formation
Quant aux profils de formation demandés dans les offres d’emploi, ils présentent un certain flou: 47% des offres ne formulent pas d’exigences en termes de niveau de qualification et 38% d’entre elles ne mentionnent aucune filière de formation. Cela étant, les collaborateurs et collaboratrices du digital disposent en général d’un niveau d’études supérieur (formation supérieure, bachelor ou master). Si les offres d’emploi exigent très rarement un certificat fédéral de capacité ou une maturité, les réponses à l’enquête quantitative laissent paraître une réalité différente: 23% des collaborateurs du digital possèdent une formation de ce niveau.
L’informatique et les technologies de l’information représentent des voies de formation majeures, mais la communication et le marketing digital sont tout aussi importants. Une demande de formations spécifiquement digitales transparaît dans les offres d’emploi, comme les filières en marketing digital, multimedia et design, ou «digital» sans autre précision.
La multidisciplinarité des connaissances demandées caractérise en outre les métiers du digital. Les compétences technologiques, de marketing et de business sont requises dans les trois grandes catégories de métiers du digital, tout particulièrement dans «communication au sens large» et «gestion du digital».
Compétences
Alors qu’on la croirait avant tout technologique, la transformation digitale exige plus que jamais de fortes compétences sociales et émotionnelles. Selon notre enquête quantitative, les entreprises romandes chercheront, ces trois prochaines années, des collaborateurs du digital ayant la capacité à comprendre le client et à amener des solutions nouvelles, tout en étant à l’aise avec les technologies de l’information. En termes de compétences techniques, les offres d’emploi expriment une demande de compétences en design, en traitement des données, en expérience utilisateur et dans les méthodes Agile. La demande de spécialistes de la blockchain y est pour le moment très faible.
Profil des collaborateurs
A l’instar des offres d’emploi recueillies, l’enquête quantitative auprès des entreprises romandes montre que les professionnels du digital travaillent principalement dans les cantons de Vaud et de Genève. Un tiers d’entre eux provient de l’Union européenne ou d’un pays hors de l’UE. Ils sont âgés en moyenne de 35 à 40 ans – les offres d’emploi confirment d’ailleurs l’intérêt des employeurs pour les jeunes diplômés (42% des offres). Les métiers du digital sont en outre majoritairement exercés par des hommes (deux tiers selon l’estimation de l’enquête).
Perspectives
La transformation digitale des entreprises est loin d’être achevée et le marché de l’emploi du digital est florissant: 88% des entreprises ayant déjà des activités digitales envisagent d’ouvrir des postes au cours des trois prochaines années. 73% des grandes entreprises pensent créer jusqu’à dix emplois, 14% jusqu’à cinquante.
Corollaire de l’évolution des tâches et des compétences, les habitudes de travail devraient aussi se modifier: davantage d’horizontalité dans les rapports de travail, des postes de travail mobiles et, par-dessus tout, une montée en puissance du travail en équipe, telles sont les évolutions prédites par l’enquête et par une étude de l’EPFZ.