Le travail obstrué

Pot-pourri des ingrédients qui empêchent le travail de qualité

Tour d'horizon subjectif des dysfonctionnements organisationnels et managériaux, toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ne serait être que fortuite.

Messages à consulter dans la boîte de réception, sur WhatsApp, SMS, Teams, Skype, Messenger ou LinkedIn; ordres puis contre ordres; rapport non rendu à temps; projet arrêté; interruptions multiples; réponse sauvée précipitamment dans «brouillons» et oubliée; appel téléphonique non retourné; conflits d’agenda; meetings inutiles mais multipliés; imprimante en panne; saisie non enregistrée; connexion impossible à établir... À l’issue d’une journée, pouvoir se féliciter d’avoir fait du bon travail relève du miracle.

Les attentes irréconciliables

Comment rester sain d’esprit et donc de corps quand nous avons deux responsables hiérarchiques qui nous fixent des objectifs contradictoires? Le responsable opérationnel attend de nous que nous soyons présent sur le terrain, disponible pour les membres de notre équipe, impliqué dans la marche des affaires alors que notre responsable fonctionnel ne rêve que de conformité aux attentes du «siège» et de tableaux Excel dûment remplis.

Le micro-management

Ceux qui nous dirigent confondent compétences et différences et ont encore quelques difficultés à intégrer des principes de base:

  1. Les êtres humains ne sont pas tous taillés dans le même bois! Il y a les introvertis, les extravertis, les conceptuels, ceux qui sont concentrés sur les détails, ceux qui prennent leurs décisions de façon rationnelle, les autres qui sont plus sensibles aux affects, ceux qui sont structurés et assertifs, ceux qui gardent toutes leurs options ouvertes...etc. En synthèse, selon la psychologie des types, quinze autres manières que la nôtre de voir les choses et de réussir.
  2. La nature profonde de leur motivation évolue avec le temps: entre 30 et 35 ans, leur moteur est d’exprimer leur créativité, de percer professionnellement. Entre 35 et 40 ans, de se concentrer sur l’essentiel de se perfectionner. Entre 40 et 50, de de rechercher un équilibre, d’investir dans l’idéal, le travail en équipe, le partage. Enfin entre 50 et 65 ans, de gérer des équipes, d’enseigner aux autres, de transmettre leurs connaissances.
  3. Quel que soit leur métier et leur position dans l’organisation, ils connaissent leur travail et sont les mieux placés pour suggérer ou faire des améliorations...
  4. Leur fixer des objectifs est important, les laisser libres quant aux moyens pour les atteindre l’est encore plus!

Gestion des priorités: mission impossible!

Comme notre coach professionnel (que nous voyons chaque semaine depuis que nous avons perdu le sommeil) nous l’a recommandé, nous écrivons sur un post-it les trois/quatre objectifs que nous avons à atteindre. Sauf que, ce que nous pensions être nos priorités passent à la trappe et nous voici happé par d’autres urgences, d’autres situations à gérer...

Les collègues toxiques

Certains jours, nous rentrons drainés à la maison et pourtant notre charge de travail n’était pas si importante. Non, mais nos collègues étaient en grande forme! Jalousie, sarcasmes, cynisme, critique systématique des autres dans leur dos, jugements à l’emporte-pièce, commérages... Tous ces comportements prospèrent en entreprise sans y être sanctionnés.

L’ère du «reporting»

De rapports d’activité en suivi d’indicateurs de performance clés, de «time sheet» en extractions de data base, dans tous les métiers, si nous n’y prenons pas garde, nous pouvons nous retrouver à passer plus de temps à justifier de notre travail qu’à faire notre travail et ceci toujours au détriment de l’écoute, de la communication, de l’attention portée aux l’autres, des soins prodigués, des conseils donnés...

Les diktats du marketing

Leurs intentions sont très très bonnes: homogénéité des couleurs, cohérence des messages, protection et renforcement de la «marque». Dans la pratique ils nous dictent tout! De la couleur des sofas dès l’entrée dans l’entreprise; le look de la réceptionniste; la forme, les couleurs du logo, sa position sur un drapeau, un t-shirt, une casquette, une gourde, un parapluie...; la taille de la police pour notre signature électronique, papier à lettre, format standard des présentations powerpoint... Sans le vouloir, ils tuent toute forme d’expression personnelle, de créativité.

RH et Finances dans le même bateau

Sous prétexte de simplification, d’optimisation, de digitalisation, ces deux-là font la paire quand il s’agit de formaliser de nouveaux process ou de faire appliquer de nouvelles règles. C’est bien connu: L’Homme naît mauvais, il faut le rééduquer. Réductions budgétaires et contrôle des coûts par ci, contrôle des effectifs, des absences, des évaluations de performance, des formations obligatoires par là... Formulaires à remplir, signatures à obtenir... Modification du règlement d’entreprise, du contrat de travail... Ces départements semblent chercher à se rendre la vie plus facile au détriment des employés.

Les promesses non tenues de l’IT

Ah l’IT! qui nous faisait rêver à un monde meilleur où nous serions libérés de «l’Admin», concentrés sur «l’Humain» et où la qualité de nos données nous permettrait de prendre de meilleures décisions! Dure réalité: softs qui ne communiquent pas entre eux et obligent à la double ou triple ou quadruple saisie, informations impossibles à sauvegarder, serveur au tapis, «dashboard» inutilisable car remplis d’erreurs... Tout aussi enfermant et contrôlant que les process, il nous semble, certains jours, que les outils se liguent contre nous. C’est officiel: l’intelligence n’est pas artificielle!

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Agnès Gabirout est Directrice des Ressources Humaines au Collège de Champittet à Pully.

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