Quelles sont les différences majeures entre RH d’une administration publique et RH d’une entreprise privée?
Ludovic Bruchez, HR Manager et HR BPO Expert chez S&H interroge Yann Roduit, Responsable RH de la Ville de Sion.
Ludovic Bruchez (à gauche) interroge Yann Roduit (à droite). Photos: DR
Nous pouvons constater une tendance générale à vouloir rapprocher le secteur public du secteur privé. Mais la perception à l’égard de la fonction publique et, par conséquent, de la gestion de son capital humain, demeure ambigüe. Pour comprendre les distinctions, deux exemples peuvent illustrer certaines nuances et particularités objectives, en l’espèce la sécurité de l’emploi et le management des performances.
En premier lieu, la notion de sécurité de l’emploi, dont la conception est largement partagée lorsque la fonction publique est évoquée, suppose naturellement certains avantages en matière de stabilité. Là où le collaborateur gagnera en sécurité, l’employeur devra développer un outil de gestion RH adapté, incitatif et, idéalement, offrant une certaine mobilité interne propice à offrir de nouveaux défis, dénommée par ce néologisme qu’est la flexicurité.
Cette forme de protection du travailleur suppose des démarches plus contraignantes lors de de la résiliation des rapports de travail. Or, dans ce registre, il faut reconnaître que le RH issu d’un secteur privé et confronté à un environnement de droit administratif sera appelé à une phase de découverte et d’apprentissage.
En guise de second exemple, le management des performances constitue également un réel défi de gouvernance pour les organisations publiques. A ce titre, il faut rappeler que la gestion de la performance est l’expression du contrat de collaboration à l’origine de la relation entre l’employeur et le collaborateur.
A cet égard, il convient de relever que l’objectif de l’organisation publique vise à assurer un service de qualité et conforme aux dispositions légales. Or, si dans le secteur privé, les paramètres économiques peuvent fréquemment servir de cadre de discussion pour définir une performance, dans le secteur public, celle-ci sera hautement influencée par la configuration hiérarchique, la clarté des missions attribuées, les aptitudes du management ou encore les moyens à disposition pour signifier la reconnaissance. Partant, dans le secteur public, la fonction RH devra porter une attention particulière à l’élaboration des processus RH et des mécanismes qui l’animent.
Si l’on évoque la nécessité d’attirer de la main d’œuvre qualifiée, de permettre une gestion de la relève, de redéfinir les frontières de l’organisation, d’appréhender la juridicisation des rapports de travail ou encore d’intégrer les NTIC, comment déterminer qui du DRH public ou du DRH privé serait le plus - respectivement le moins – concerné ? Il peut dès lors être admis que les grands enjeux de la fonction RH se retrouveront de plus en plus alignés indifféremment aux secteurs privé et public.
Ainsi, l’environnement de la fonction publique, aujourd’hui passablement décloisonné, vit les mêmes mutations externes et internes que les entreprises privées et doit développer des principes de gouvernances modernes et compétitifs, y compris dans la gestion RH. En définitive, ce qui rapproche les RH du secteur public et du secteur privé est sensiblement plus déterminant que ce qui les sépare. Le positionnement de la fonction RH à un niveau de business partner et propice à la mesurabilité de ses actions constitue un même enjeu pour toutes organisations.