Conseils pratiques

Tout sur le licenciement ordinaire, abusif, immédiat ou collectif

Le principe de la liberté contractuelle implique que chaque partie peut mettre un terme à la relation de travail sans restriction et sans motif particulier. Ce principe souffre de nombreuses exceptions.

Le contrat de travail est fondé sur la confiance réciproque entre les parties. Personne n’est à l’abri d’un licenciement. En droit du travail, le principe de la liberté contractuelle prévaut. Chaque partie peut mettre un terme à la relation de travail sans restriction et sans motif particulier. Seule exception: le licenciement abusif.

Résiliation avant l’entrée en service

Il s’agit du congé donné par une partie entre la conclusion du contrat et l’entrée en fonction. Dans cet intervalle, il arrive que l’employeur renonce à l’engagement de l’employé parce qu’il a trouvé un meilleur candidat ou pour des raisons économiques, des difficultés peuvent alors surgir.

Temps d’essai

Le temps d’essai doit fournir aux parties l’occasion de préparer l’établissement de rapports de travail destinés à durer. Il doit leur permettre d’éprouver leur relation de confiance, de déterminer si elles se conviennent mutuellement et de réfléchir avant de s’engager pour une plus longue période. Les parties doivent pouvoir se libérer rapidement et disposent d’une grande liberté d’appréciation dans les motifs de résiliation. Même si le licenciement abusif est admis de manière restrictive durant le temps d’essai, la jurisprudence fixe certaines limites.

Résiliation ordinaire

Contrairement au contrat de durée indéterminée, le contrat de durée déterminée ne peut pas faire l’objet d’une résiliation ordinaire. Ces deux contrats ne sont pas forcément adaptés aux besoins de l’entreprise. L’employeur peut alors recourir à d’autres types de contrat.

Le contrat conclu «au moins jusqu’à la fin de l’année» est un contrat de durée minimale. Il s’agit du contrat que les parties ne peuvent pas résilier pour un terme échéant avant la fin d’une durée minimale. Pendant la durée minimale, le contrat déploie les effets propres au contrat de durée déterminée. Le contrat conclu «jusqu’au 31 décembre au plus tard» est un contrat de durée maximale. C’est un contrat qui, à défaut d’une résiliation anticipée, prend fin de lui-même à l’échéance maximale convenue entre les parties.

Résiliation abusive

Une résiliation est abusive lorsque les motifs sur lesquels elle se fonde heurtent notre sens de la justice parce qu’ils sont contraires aux valeurs reconnues par la société. L’article 336 CO énumère, de manière non exhaustive, huit cas de licenciements abusifs. Voyons quelques situations rencontrées fréquemment dans la pratique.

Congé discriminatoire

Le congé est abusif lorsqu’il est donné pour une raison inhérente à la personnalité du travailleur. Cette dernière englobe toutes les caractéristiques qui permettent d’individualiser une personne et qui sont dignes d’être protégés, soit notamment sexe, race, âge, grossesse, maladie, nationalité, homosexualité, religion et antécédents judiciaires.

L’employeur doit avoir des égards envers un travailleur âgé, proche de la retraite. Pour éviter un licenciement abusif, il doit fixer un délai à l’employé et lui assigner des objectifs pour lui laisser une dernière chance d’accomplir son travail de manière satisfaisante.

Le licenciement d’un travailleur en raison de son caractère est délicat. Le congé n’est pas abusif lorsque le mauvais caractère de l’employé crée une situation conflictuelle dans l’entreprise. Cependant, avant de le licencier, l’employeur doit avoir pris toutes les mesures que l’on peut raisonnablement attendre de lui pour désamorcer le conflit, telles que conciliation ou avertissement. A défaut, le licenciement sera abusif.

Droit constitutionnel

Le congé donné par une partie en raison de l’exercice par l’autre d’un droit constitutionnel est abusif. Le but est de protéger et garantir les libertés fondamentales de l’individu telles que libertés personnelles, d’expression et de croyance. Deux motifs objectifs permettant d’exclure un congé abusif. N’est pas abusif, le congé donné lorsque l’exercice du droit constitutionnel viole une obligation résultant du contrat ou porte un préjudice grave dans l’entreprise.

La liberté d’expression ne permet pas au travailleur de critiquer ouvertement l’employeur sur les réseaux sociaux. De même, la liberté personnelle, qui comprend le droit à la vie privée, n’est pas sans limite. Selon le Tribunal fédéral, le licenciement d’une collaboratrice d’une entreprise pharmaceutique qui entretient une relation amoureuse avec un employé d’une entreprise concurrente n’est pas abusif compte tenu de son accès aux données sensibles.

Congé-représailles

Le congé est abusif lorsqu’il est donné par une partie parce que l’autre fait valoir de bonne foi des prétentions découlant du contrat. Il s’agit d’éviter qu’une partie renonce à faire valoir ses droits par crainte d’être licenciée en représailles. Les prétentions peuvent découler du contrat, du règlement d’entreprise, de la loi ou d’une CCT. Constituent de telles prétentions: droit aux vacances, compensation des heures supplémentaires, droit au salaire en cas de maladie, plaintes suite à une atteinte à la personnalité ou à une discrimination sexuelle.

Résiliation immédiate

L’employeur peut résilier, immédiatement et en tout temps, le contrat pour de justes motifs (art. 337 CO). Fait propre à détruire la confiance qu’impliquent, dans leur essence, les rapports de travail. Il doit être impossible d’exiger de l’employeur qu’il garde à son service l’employé durant le délai de congé. Si le manquement est moins grave, il ne peut entraîner la résiliation immédiate que s’il a été précédé d’un avertissement. Peuvent constituer des motifs de résiliation immédiate, à certaines conditions, les situations suivantes: vol, sollicitation de pots-de-vin, harcèlement sexuel, mobbing, activité concurrente, utilisation abusive d’Internet, faux timbrages, fausses notes de frais, atteinte à la personnalité de collègues.

L’employeur doit signifier le congé immédiat dans un délai de deux à trois jours ouvrables dès la connaissance des faits. A défaut, la continuation des rapports de travail jusqu’au terme du délai de congé est présumée possible. Le congé immédiat sera considéré comme injustifié.

Infractions pénales

Les infractions pénales commises dans le cadre du travail au détriment de l’employeur, de collègues ou de clients justifient un licenciement immédiat, sans avertissement préalable. Il en va ainsi du vol d’une bouteille de vin, de la sollicitation de pots-de-vin, du vol d’argent par une infirmière dans la chambre d’un patient ou encore d’un blanchiment d’argent par un banquier. Le dépôt d’une plainte pénale ou les soupçons à l’encontre du travailleur ne suffisent pas à fonder le renvoi pour justes motifs. L’employeur doit établir la réalité objective des faits.

Atteintes à la personnalité

L’employeur doit prendre les mesures adéquates si la personnalité du travailleur fait l’objet d’atteintes. Lorsqu’un employé porte sérieusement atteinte aux droits de la personnalité d’un collègue, il viole gravement son devoir de diligence et fidélité. Dans un tel cas, une résiliation immédiate est justifiée. Il en va ainsi d’un employé qui menace un collègue de lui «faire la peau» ou d’une employée qui s’emporte à l’encontre de son supérieur et lève à la hauteur de ses yeux son cutter.

Licenciement collectif

Par licenciement collectif, il faut entendre les congés donnés par l’employeur à un nombre minimum de collaborateurs dans un délai de 30 jours pour des motifs économiques ou de rationalisation. Pour qu’il y ait licenciement collectif, la loi requiert un nombre minimum de congés qui varie en fonction de la taille de l’entreprise.

L’employeur qui entend procéder à un licenciement collectif est tenu au préalable de consulter la commission du personnel ou, à défaut, l’ensemble de ses collaborateurs. Il doit commencer la procédure de consultation dès qu’il envisage de procéder à un licenciement collectif. Le but est de permettre au personnel de formuler d’éventuelles propositions pour limiter le nombre de licenciements ou pour en atténuer les conséquences. Le non-respect de la procédure de consultation rend tous les licenciements abusifs.

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Marianne Favre Moreillon, spécialisée en droit du travail, est Directrice et Fondatrice du cabinet juridique DroitActif à Lausanne. 

Lien: www.droitactif.ch

 
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