Crises et changement culturel
La Reka a adapté ses offres de prestations à la baisse des revenus de la population. D’où un indispensable changement de culture qui occupe également Christina Gnädinger en ce moment. Bien que la Reka soit une société à but non lucratif, elle ne peut se soustraire à la nécessité de rechercher la viabilité économique: «Les marchés financiers dégagent de moins en moins de bénéfices depuis quelques années.» Cela augmente significativement la pression économique. «On le ressent partout.» Ainsi, les villages de vacances ont été professionnalisés: ils ne sont plus gérés par des «administrateurs» mais par des «hôtes». Ceux-ci doivent tenter d’évaluer au plus près les revenus escomptables grâce aux nouvelles activités. Par exemple, les vacanciers «se voient maintenant proposer des soirées barbecue ou raclette, et ils peuvent participer à des excursions à vélo».
La pensée économique s’étend jusqu’au règlement de prévoyance: si, jusqu’à récemment, les employés de la Reka pouvaient partir en retraite anticipée dès 62 ans après quinze ans de services, la chose n’est actuellement plus possible. «Pour beaucoup, cela a été très décevant et difficile à accepter», reconnaît Christina Gnädinger. Une consultation téléphonique avait été organisée pour permettre aux employés de s’exprimer. Il y a eu des mots méchants. Mais il n’était pas question pour Christina Gnädinger de revenir en arrière: «C’était une décision sur laquelle je n’avais aucun contrôle et il n’y avait pas d’alternative.»
Une volonté de changer
Avant la Reka, la vie professionnelle de Christina Gnädinger n’a pas été de tout repos. En 1997, alors qu’elle est tout juste âgée de 26 ans et encore étudiante à la Faculté de psychologie de l’Université de Zurich, elle se voit confier la création du nouveau Centre de recherche sur la toxicomanie et la promotion de la santé du Département des affaires intérieures du canton de Schaffhouse. Elle met sur pied ce service en trois ans – et récolte au passage les compliments des milieux spécialisés. Pourtant, elle décide de changer de carrière parce que les choses ne bougent pas assez à son goût «et qu’il n’y avait pas de possibilités d’avancement au sein de l’administration». Pour elle, la promotion de la santé et la prévention de la toxicomanie en sont aujourd’hui «au même point qu’en 1999». En tant que responsable RH, ces questions lui tiennent toujours à cœur.
C’est une connaissance qui lui signale, en 2000, que l’entreprise Georg Fischer à Schaffhouse recherche quelqu’un pour diriger son département RH. Engagée comme assistante personnelle de Georg Fischer, elle effectue en parallèle une formation de responsable RH et est propulsée au bout de six mois à la tête des ressources humaines d’un département comptant 300 employés. Sa carrière fulgurante connaît un coup d’arrêt en 2003, lorsque Georg Fischer vend trois des quatre divisions confiées à Christina Gnädinger. Le nombre d’employés dont elle s’occupe est ramené à vingt.
Elle exerce ensuite en tant que consultante RH chez Propers, puis comme HR Development Manager chez Swisscom (où elle participe à la création d’un Shared Services Center), et en tant que HR Manager & Business Partner chez Deloitte (où elle dirige différents projets RH pour la Suisse). Mais Deloitte Suisse est repris par la succursale anglaise du groupe. «Les projets que je menais au niveau suisse ont été supprimés.» Ne lui restent que des tâches opérationnelles, qu’elle refuse avec grâce.
L’année 2010 est marquée par son arrivée aux CFF en tant que responsable du développement des ressources humaines et spécialiste technique. Trois ans plus tard, pour la première fois de sa vie, elle s’autorise une pause: «Jusqu’à mes quarante ans, je n’avais pas connu grand-chose en dehors du travail», confie-t-elle. «J’étais trop concentrée sur mon statut professionnel.» Christina Gnädinger se définit comme quelqu’un d’entreprenant qui ne fait pas les choses à moitié. Le travail l’aiguillonne. Pendant toutes ces années, il n’était pas rare de la voir s’affairer au bureau de six heures du matin jusqu’à onze heures du soir. «Mais on regarde la vie différemment quand on a pris quelques années et qu’on est devenu plus sage.» Une situation stressante sur le plan privé et la disparition prématurée d’une amie de son âge, qu’elle a accompagnée jusqu’au bout, l’ont obligée à reconsidérer sa façon de voir les choses. «Cela m’a appris que tout peut nous échapper très vite.» Le nombre d’heures passées au bureau a diminué. Il arrive que sa journée se termine à 17 heures. Paradoxalement, Christina Gnädinger est devenue plus productive: «Je me concentre sur ce qui est important.» Aujourd’hui est un jour spécial: «Cet après-midi, j’ai pris congé. Je vais m’occuper de mon jardin et planter des fleurs», dit-elle avec un air radieux.
Chef de file
Née en 1971 à Schaffhouse, Christina Gnädinger vit une enfance heureuse et se signale dans le quartier comme la «chef de file». Le goût des RH lui vient sans doute de son père, qui s’est hissé au rang de chef du personnel chez Alusuisse. Après avoir étudié la psychologie à l’Université de Zurich, Christina Gnädinger prend les commandes du Centre cantonal schaffhousois de recherche sur la toxicomanie et la promotion de la santé. Son saut dans les RH a lieu quelques années plus tard chez Georg Fischer. Elle devient ensuite consultante RH chez Swisscom, avant d’intégrer Deloitte en 2007 et les CFF en 2010. Parallèlement, elle enseigne à l’école de commerce KVS et à la Haute école d’économie de Schaffhouse. Depuis juin 2016, elle est responsable RH de la Reka.
La Reka en bref
Fondée en 1939 dans le but de permettre aux familles et aux personnes à faibles revenus de bénéficier de vacances gratuites ou très bon marché, la Reka emploie 657 collaborateurs. C’est l’une des entreprises touristiques les plus importantes de Suisse, avec un chiffre d’affaires de 629 millions de francs en 2016. La Reka exploite douze villages de vacances, onze résidences et un hôtel.