Dossier

Cinq idées reçues à propos du pouvoir en organisation

Le directeur général des Hôpitaux universitaires de Genève, Betrand Levrat, pointe du doigt les cinq fausses idées les plus courantes concernant les hommes et les femmes de pouvoir.

Depuis qu’il a repris l’an dernier la direction générale des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), qui comptent plus de 10’000 collaborateurs, l’emploi du temps de Christian Levrat est devenu très serré. Pour HR Today, il a trouvé le temps de livrer sa vision des idées reçues les plus courantes, selon lui, sur le pouvoir en organisation. Avec un clin d’oeil aux mauvaises langues qui estiment que le secteur public et le secteur privé ne sont pas comparables.

«C’est le titre qui fait la fonction»: Faux

«Le pouvoir en organisation n’est pas donné par la fonction, il doit être conquis. L’étiquette ne suffit pas. Le leadership, les compétences et la volonté du dirigeant sont plus importants que son titre. On pense souvent que le pouvoir est donné à la hiérarchie. Mais la décision d’aller de l’avant n’est pas la plus importante. C’est la capacité de mettre en œuvre qui prime.»

«Le dirigeant tire les autres en avant»: Partiellement faux


«Il est exact que «The one at the top» est déterminant pour donner une philosophie de travail et dans ce cadre, le dirigeant porte la responsabilité de la dynamique de travail en vigueur. Cependant, entre le pouvoir perçu et le pouvoir réel, il y a toujours un hiatus. Le pouvoir s’exerce quand on peut compter sur une équipe. La façon d’interagir avec l’équipe est donc déterminante. La capacité de fédérer une équipe autour d’un but commun et d’une philosophie de travail est cruciale afin que cette dernière puisse donner une dynamique d’entreprise.»

«De toute façon, on ne peut rien changer»: Faux


«C’est heureusement faux, à défaut, le job de dirigeant n’aurait aucun intérêt! Le changement est permanent. C’est au dirigeant de porter cet état d’esprit dans son organisation. Il doit donner les impulsions et montrer aux autres comment appréhender les nouveaux défis qui viendront adapter la bonne conduite des opérations. Il est attendu d’un dirigeant qu’il fixe les priorités des changements à venir. Une des difficultés actuelles est de réussir à tenir un cap dans un environnement en mutation rapide qui dicte en parallèle un agenda parfois différent de celui que le dirigeant pense être opportun pour l’entreprise.»

«Impossible de modifier la culture d’entreprise»: Faux

«Je ne suis pas d’accord avec ce poncif souvent entendu. La culture d’entreprise évolue lentement, mais elle évolue. Le dirigeant est celui qui peut probablement le plus contribuer à modifier une culture d’entreprise. L’exemplarité du chef joue ici un grand rôle. Un dirigeant représente son organisation et la vision stratégique de cette dernière. Il est donc responsable de l’image de son entreprise 24 heures sur 24, et non juste durant les heures de bureau. Comme il est en mesure d’incarner l’image de l’entreprise, il est à même de véhiculer les valeurs qui représentent la culture d’entreprise et son évolution. Les racines sont fortes et essentielles à la stabilité, elles permettent à l’arbre de s’épanouir, pas de le figer.»

«Une entreprise publique est très différente»: Faux

«Je pense que les différences ne sont pas aussi grandes que l’on veut bien parfois le faire croire. La différence majeure réside sans doute dans l’éthique que doit respecter une entreprise publique, par rapport aux services qu’elle doit rendre à la communauté et par rapport à sa redevabilité publique et donc, son exposition médiatique. A part cela, la qualité du travail et la pression liée à nos missions sont les mêmes. Le secteur public, tout comme le secteur privé, entretient une relation complexe avec son environnement. Nous sommes perpétuellement en train de nous adapter à la réalité. Et on attend de nous la même rigueur dans la gestion et le même professionnalisme dans nos attitudes. Il n’y a aucune raison de baisser les exigences, c’est au contraire une question de crédibilité que nous devons assumer parce que c’est notre bien à tous. Les HUG que je dirige aujourd’hui sont une magnifique institution, crédible et professionnelle, ce n’est pas « mon » hôpital, c’est le nôtre, le vôtre. Votre attente d’exigence est donc légitime et je m’y emploie avec la même détermination et rigueur que si j’étais dans le secteur privé.»

Bertrand Levrat

Bertrand Levrat est le directeur général des Hôpitaux universitaires de Genève (plus de 10’000 collaborateurs) depuis le 1er juin 2013. Avocat de formation, Bertrand Levrat a dirigé auparavant l’Hospice général de Genève (2004-2013). Il a commencé sa carrière comme délégué au Comité international de la Croix-Rouge.

 

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Marc Benninger est le rédacteur en chef de la version française de HR Today depuis 2006.

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