Les séminaires de développement de cadres ont-ils franchi le Rubicon? Week-ends de survie en forêt, avec grimage et treillis de camouflages; deux/trois jours au chevet d’un malade du Sida; apprendre à marcher sur des braises…
Les entreprises vont-elles trop loin et comment justifier ces nouvelles pratiques managériales? C’est pour répondre à ces questions délicates que le sociologue et DRH Stéphane Haefliger (chroniqueur régulier de HR Today) est intervenu en juin dernier lors d’une réunion d’HR Valais au théâtre Baladin de Savièse (avec environ 120 personnes).
Réponse officielle: «Pour augmenter la motivation, resserrer les liens et sensibiliser ces managers au monde des émotions». «Il n’en est rien», claque Stéphane Haefliger. Selon lui, la grande mode de l’intelligence émotionnelle ne serait qu’un nouveau moyen pour développer l’engagement et l’adhésion des cadres aux valeurs de l’organisation.
Autrement dit, si Taylor découpait les gestes d’un ouvrier en séquences pour augmenter la productivité, les nouveaux gourous du management émotionnel entrent dans l’âme et le cœur des collaborateurs pour stimuler leur performance. Le raccourci est un peu court mais la critique est perceptible.
Car le hic, c’est que les collaborateurs n’ont pas tous envie de se retrouver en kimono, savonnette et linge de bains à la main, devant leur directeur général transformé en Maître d’Aikido. Et cette psychologisation des rapports de travail (aujourd’hui tous les moyens sont bons: méditation transcendentale, hypnose, taoïsme, etc.) brouille les frontières entre sphère privée et publique.
Comment sortir de l’impasse? La réponse est venue au moment des questions. Au final, c’est une affaire de contexte. La démarche doit être clairement expliquée pour que le participant s’y retrouve. Car comme l’a souligné une participante: «Les collaborateurs apprécient souvent ce genre de séminaire puisqu’ils y trouvent de quoi nourrir leur trajectoire personnelle.»