RH en secteur public

«La qualité de vie au travail est un thème qui monte en puissance»

Lors de sa réorganisation de 2023, la Direction générale des ressources humaines de l'Etat de Vaud s'est dotée d'une direction dédiée à la «qualité de vie au travail», dirigée par Maria Undurraga. Depuis la pandémie, les problèmes de santé mentale et notamment les risques psycho-sociaux, augmentent. Elle analyse ici les enjeux à venir.

Quels sont les sujets liés à la qualité de vie des employés de l’État de Vaud qui vous préoccupent en ce moment? 

Maria Undurraga: Depuis la pandémie, nous mettons l’accent sur la santé mentale et les risques psycho-sociaux. L’autre grand sujet d’actualité concerne l’intégrité et l’atteinte à la personnalité. Le Conseil d’État vient d’adopter un nouveau règlement qui encadre cette protection contre les conflits et les harcèlements (depuis octobre 2024, ndlr). La conciliation entre la vie privée et la vie professionnelle reste aussi un sujet d’actualité. En parallèle, nous sensibilisons sur l’inclusion des personnes atteintes dans leur santé et les personnes en situation de handicap. Nous menons également plusieurs projets en santé et sécurité au travail, avec des analyses de risques, l’intervention de médecins du travail, et des actions pour améliorer l’ergonomie sur la place de travail par exemple. 

L’État de Vaud emploie environ 25000 personnes (sans compter le Centre hospitalier universitaire vaudois), comment faites-vous pour répondre à des besoins si variés? 

Chaque service de l’État dispose d’un ou une correspondant·e santé et sécurité au travail (SST) qui développe des offres spécifiques par rapport aux besoins du terrain. Avec autant de collaborateurs·trices, nous faisons face aux mêmes enjeux que la population. La qualité de vie au travail est un thème qui monte en puissance. En quelques années, notre secteur est passé de 6 à 18 personnes afin de répondre aux normes et exigences en la matière. 

Comment justifiez-vous cette augmentation de vos ressources?

C’est notre devoir en tant qu’État employeur de protéger la santé de nos employés·es. C’est inscrit dans la loi et cette priorité se reflète dans le programme de législature 2022-2027 du Conseil d’État et dans sa stratégie RH. Investir dans la qualité de vie au travail génère des retours indirects en termes de motivation, de productivité mais aussi en termes de marque employeur. Il s’agit certes d’un investissement, mais dans le domaine de la prévention, ces dépenses représentent aussi un retour indirect avec une diminution des absences et du turn- over. 

Quelles mesures donnent les meilleurs résultats? 

C’est difficile d’évaluer l’efficacité d’une seule mesure. Soigner la qualité de vie au travail est le fruit d’un ensemble de mesures. Le premier élément est sans doute de pouvoir s’appuyer sur une base légale. Notre règlement date de 2017 et garantit une égalité de traitement. Nous proposons différentes mesures telles que des e-learning pour prévenir l’épuisement professionnel, des accompagnements personnalisés comme des coachings, des formations et un renforcement de notre soutien sur le terrain à travers les correspondants SST. Nous avons aussi mis en place une semaine thématique SST avec des conférences et des ateliers sur des sujets qui touchent à la qualité de vie au travail ou encore des articles de sensibilisations publiés mensuellement. 

La prévention des risques est un axe prioritaire... 

Oui, ce travail de sensibilisation et de prise de conscience est clé dans la qualité de vie au travail. Nous communiquons beaucoup via La Gazette de l’État de Vaud. Les sujets sur la qualité de vie au travail rencontrent un fort succès. Des coachings pour prévenir les burnouts (4 à 5 séances réparties sur 3 à 4 mois, ndlr) sont aussi mis en place. Nous développons aussi des prestations plus spécifiques pour chaque service: identification des dangers avec un plan de mesures à mettre en place et des directives sur la protection de la maternité, mais aussi pour des thèmes plus techniques tels que la manipulation des produits chimiques ou les évacuations incendies par exemple. 

Le rapport des individus au travail est en train de changer. Le constatez-vous aussi à l’État de Vaud? 

Oui. Aujourd’hui, le travail ne nous définit plus autant qu’avant. La recherche de sens est devenue importante tout comme la recherche d’équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle. Les jeunes ont aussi d’autres attentes envers un employeur. Nous devons donc en permanence nous adapter à ces changements. C’est pour y répondre que nous développons et offrons des modes de travail variés répondant aussi aux besoins et contraintes des 400 métiers de l’État de Vaud. 

Vos prestations sont-elles devenues plus «à la carte», à l’image des pratiques RH du secteur privé?

C’est difficile de proposer des prestations à la carte car nous devons impérativement respecter l’égalité et l’équité de traitement envers chacune et chacun, qui est inscrite dans la loi. Cela dit, chaque service de l’État adapte son offre en fonction des métiers et des besoins spécifiques du terrain. Les besoins ne sont pas les mêmes qu’on soit gestionnaires de dossier, archiviste, éducateurs de la petite enfance ou agent d’exploitation. 

Quels sont les projets à venir? 

Nous allons renforcer la visibilité et l’accessibilité de nos prestations, avec des brochures et des guides de bonnes pratiques. L’objectif ici est de faciliter l’accès aux informations et aux prestations existantes à tous nos sites et publics cibles.

Et en termes de santé mentale? 

Nous allons développer une prestation de diagnostics des risques psycho-sociaux, conduits par une ou un psychologue du travail. Nous allons aussi former des secouristes en santé mentale et développer nos prestations de soutien social. 

Qu’allez-vous entreprendre concrètement pour ce soutien social?

Nous avons engagé des assistantes sociales pour soutenir les collaborateurs·trices rencontrant des difficultés pouvant impacter leur qualité de vie au travail. Le soutien social permet d’offrir une écoute attentive et des solutions concrètes, qu’il s’agisse de problématiques liées à la vie personnelle (problèmes familiaux, financiers, logement, etc.) ou à l’équilibre vie professionnelle-vie privée et qui engendrent alors un stress supplémentaire. 


Psychologue de formation 

Maria Undurraga dirige la direction «Qualité de vie au travail» à la Direction générale des ressources humaines (DGRH) de l’État de Vaud depuis janvier 2023 (elle est dans le service depuis 2014). Cette direction regroupe trois secteurs d’activité (santé & sécurité; réinsertion professionnelle et soutien psychosocial) ce qui représente 18 personnes. Elle est psychologue de formation et dispose d’un brevet fédéral en ressources humaines et d’un CAS en Case management. 

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Marc Benninger est le rédacteur en chef de la version française de HR Today depuis 2006.

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