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«Les employés attendent des marques de soutien plus fréquents»
Philippe Salomon est chef de service à la commune de Fully. Il vient de rédiger un mémoire intitulé: «Facteurs influençant l’ajustement du contrat psychologique lors de l’entretien d’évaluation», sous la direction du professeur Yves Emery de l’IDHEAP.
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Votre recherche montre que l’ancienneté joue un rôle prépondérant lors de l’entretien d’évaluation. Pouvez-vous nous en dire un peu plus?
Philippe Salomon: Si l’ancienneté est influente lors de cette pratique RH, elle exerce également un rôle important dans les relations de travail de manière plus globale. L’influence de l’âge dans la gestion des ressources humaines a largement été étudiée ces dernières années. Or, cette recherche démontre que c’est plutôt l’ancienneté, et non l’âge, qui joue un rôle prépondérant dans la perception du contenu du contrat psychologique et la dynamique de la relation d’emploi. En effet, d’une part, la recherche met en lumière que le contenu du contrat psychologique est plus maléable durant sa période de formation. D’autre part, les attentes des plus anciens envers l’organisation diffèrent passablement de celles des collaborateurs récemment engagés. Cette caractéristique individuelle peut donc s’avérer très utile pour la conduite d’entretien d’évaluation.
Les marques de soutien de la part du supérieur sont également très attendus. Faute de temps, ces signaux ont tendance à diminuer, écrivez-vous. Avez-vous des conseils pratiques pour les réintroduire?
Dans un premier temps, il faut replacer ces attentes de soutien dans leur contexte. Nous évoluons dans un environnement où l’accélération sociale et la rationalisation des ressources prédominent. C’est pourquoi la logique financière s’impose autant dans l’environnement externe que dans tous les processus concernant les relations de travail. Ainsi, de toute évidence, les exigences des supérieurs sont plus élevées. Selon un principe de réciprocité, les employés attendent de leur côté des marques de soutien plus fréquentes. Afin de rendre leurs équipes plus performantes, les supérieurs devraient ainsi prendre en compte que le temps passé à entretenir des relations informelles est primordial. Ces liens se créent tout simplement par de l’écoute et des signes d’intérêt manifestés lors de moments informels, en partageant le café par exemple. Les remerciements pour un travail bien effectué ainsi que la consultation avant une prise de décision sont également des marques de reconnaissance très appréciées.
Vous montrez aussi que la responsabilité des mesures discutées lors de l’entretien n’est souvent pas clairement attribuée, à l’employeur ou à l’employé. Avez-vous un exemple?
Lors de l’entretien d’évaluation, l’employé attend de son supérieur que celui-ci échange sur des thèmes tels que la rémunération ou le soutien, car ceux-ci ne s’inscrivent pas directement dans sa sphère d’influence. Cependant, en ce qui concerne la formation continue, ce n’est pas le cas. En effet, dans le champ de cette étude, j’ai été surpris que les avis des participants différaient considérablement sur la responsabilité d’aborder ce thème. Ainsi, d’aucuns sont d’avis que cette responsabilité est individuelle alors que d’autres avancent que celle-ci incombe à l’employeur.
Votre mémoire montre également qu’un «système de management des performances suppose généralement une contribution plus importante de la part des collaborateurs». Du coup, le ratio entre les contributions et les rétributions est souvent déséquilibré. Vous proposez un rééquilibrage par des mesures de soutien au niveau du management et de l’organisation. Qu’entendez-vous par là concrètement?
Le modèle actuel et classique de management des performances se centre essentiellement sur l’employé. C’est vraisemblablement parce que la plupart des études défendent le postulat que l’origine de la performance est ancrée dans l’individu. Or l’organisation joue un rôle signifiant dans la recherche de performance. Ainsi, lors de la mise en œuvre de ce processus, l’organisation doit également être invitée à se questionner sur les mesures de soutien et de management qui seront mises en place en parallèle afin de viser un équilibre entre les contributions et les rétributions. Ce questionnement devrait, à mon avis, porter sur la qualité de l’échange attendue entre les supérieurs et leurs employés, de même que sur le soutien apporté au niveau du groupe et des différentes pratiques RH.
La recherche utile à la pratique
La rubrique Recherche est dédiée à des travaux de mémoire, réalisés en cours d’emploi par des cadres des la fonction RH. Ces travaux portent sur des pratiques RH innovantes dans des entreprises internationales et locales actives en Suisse romande. Cette rubrique est réalisée en partenariat avec les Universités de Genève, Lausanne, Neuchâtel et Fribourg ainsi que l’IDHEAP de Lausanne.