Dossier HRM

"Les nouvelles formes de travail sont un excellent test" pour les entreprises

Birgit Peeters est l’auteur du dernier Dossier HRM, consacré au jobsharing et au télétravail. Interview.

Vous venez de publier un Dossier HRM sur le télétravail et le jobsharing. Vous montrez que de nombreuses entreprises invoquent des mauvaises excuses pour ne pas implémenter ces nouvelles formes de travail. Quels sont les faux arguments les plus courants?

Birgit Peeters: Il est important d'être à l'écoute de chaque argument et de le prendre en considération. En écoutant un argument, je comprends la préoccupation et je peux déceler ce qui est éventuellement sous-jacent à l'objection. Dans le registre des "faux" arguments contre le télétravail, il y a notamment  la peur de la perte du lien social et de l'identité de l'entreprise, la crainte d'une confidentialité des données menacée et surtout la peur d'une perte de contrôle. Le jobsharing a du mal à s'instaurer à cause de l'argument du coût d'investissement initial mais surtout parce qu'il serait moins facile d'organiser cette forme de travail qu'un simple 100% exécuté par une seule personne. Dans un monde du travail qui évolue vers de la gestion de projet, un tel argument est à revoir. Le plus grand défi est l'attribution de la confiance. Sommes-nous désemparés car nous ne disposons pas d'outils pour inculquer la confiance ? Quelle culture d'entreprise pour les nouvelles formes de travail ? La confiance se gagne et les nouvelles formes de travail sont un excellent test.

Vous montrez qu'un dispositif de télétravail ou de jobsharing modifie la relation au temps. Qu'entendez-vous par là?

Dans l'organisation du travail, la notion du temps est omniprésente : le contrat de travail est basé sur l'échange de temps contre un salaire et une journée de travail est minutée à la seconde. Avec les nouvelles formes de travail, la relation au temps reste importante. Cependant, ce "poids" du temps sur l'organisation du travail devrait être allégé tout en maintenant un cadre clair.  Se détacher plus de cette notion limitante du temps permettrait de se concentrer sur ce qui est important, les résultats. Le temps de travail, grand facteur de stress, ne représente guère le travail effectif. Pouvoir travailler quand, comment et où on le souhaite, prend de l'importance.

Vous insistez sur le fait que tous les collaborateurs doivent avoir accès à ces nouvelles formes de travail. Mais sont-ils vraiment tous concernés?

Par principe d'équité qui conduit à éviter des inégalités, mon conseil est de prendre tous les collaborateurs en considération pour l'attribution des nouvelles formes de travail. Dans le cas contraire, l'organisation se précipite potentiellement vers l’exclusion des personnes qui en ont peut-être besoin et qui en sont capables. Ceci dit, tous ne seront peut-être pas concernés dans les faits, car le principe d'accessibilité pour tous ne signifie pas la mise en place effective pour tous. Il y a des droits et des devoirs à respecter et tout le monde n’en a pas envie ni n’en est capable. Le volontariat et la réversibilité de ces formes de travail sont d'autres valeurs à prendre en considération

En quoi le management de proximité doit-il changer son comportement avec ces nouvelles formes de travail?

Un manager de proximité peut être réticent à l'idée des nouvelles formes de travail car cela le renvoie à lui-même. Devient-il superflu, va-t-il perdre le contrôle ?  L'impliquer dans le projet en reconnaissant ces peurs est la base de la suite. Quelles attentes des collaborateurs, de sa hiérarchie et comment peut-il se comporter face à cela ? Il y a donc une clarification des intentions et des attentes à communiquer. Ensuite, il y a une évolution de son rôle vers un rôle de coordination et de communication. Dans les faits, le manager de proximité a un rôle très important à jouer.

Pouvez-vous nous résumer, en trois idées-clés, les avantages que ces nouvelles formes d'organisation du travail apportent aux entreprises?

Premièrement, l'accessibilité à des talents "dormants" en recherche d'une compréhension pour leur besoin organisationnel. Le profil du travailleur a changé, mais l'organisation du travail a de la peine à s'adapter. Ensuite, les nouvelles formes d'organisation permettent de réduire des coûts sur le long terme : moins de surface de bureau, diminution d'absentéisme, fidélisation des collaborateurs et donc diminution des coûts de recrutement.  Pour conclure, les chiffres et les témoignages des personnes interviewées dans mon livre sont la meilleure preuve que les nouvelles formes de travail allient performance et bien-être.  Identifions ensemble le potentiel des nouvelles formes de travail en entreprise au lieu de s'enfermer dans des préjugés !

Le dossier HRM réalisé par Birgit Peeters peut être obtenu ici.

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