Conseils pratiques

Les responsabilités RH face à la crise et les nouveaux défis pour se repositionner

La fonction RH n’est pas sans responsabilité dans le désastre économique qui s’annonce. C’est le prix à payer de quinze ans d’allégeance trop marquée au business et d’une mauvaise interprétation de la très en vogue notion de «HR business partner». Tour d’horizon des fourvoiements de la fonction RH et regards prospectifs sur les chantiers d’avenir. 

 

C'est désormais clair. La situation économique ne va pas cesser de s'aggraver en 2009. Mais au-delà d'une «simple» crise, nous sommes en face d'un tremblement de terre qui remet en cause les bases mêmes de ce que beaucoup pensaient être un modèle parfait. La panique latente a deux conséquences: sauver les meubles et trouver des coupables. Pour les meubles, nous verrons bien si les milliards injectés auront un quelconque effet. Pour les coupables, ils semblent clairement identifiés: ce sont les «Docteur Folamour» de la finance internationale, maîtres d'un monde virtuel détaché des réalités économiques et n'ayant pour seule motivation que la génération d'un «profit  pour le profit»... Mais n'est-ce pas trop simple? En effet, la fonction RH n'est pas sans responsabilité dans ce désastre qui s'annonce. Explications. 

Quel a été le prix à payer de notre trop forte allégeance aux managers?

Petit retour en arrière: depuis une quinzaine d'années, la motivation principale de la fonction RH a été de se faire respecter par «le business». Cette mutation nous a certes été bénéfique, nous faisant passer de simples exécutants administratifs en «business partners». Mais quel a été le prix à payer? Car en acceptant ces nouvelles règles du jeu, nous n'avons pas vu que nous remettions aussi en cause certains de nos principes fondamentaux:

  • Notre relation au temps: Dans un monde de plus en plus myope, qui ne nous voyait plus, nous avons renoncé à notre rapport au temps en recherchant la visibilité à court terme, seule garante de la reconnaissance (au sens visuel du terme).

 

  • Notre relation à l'argent: Oui la fonction RH est une fonction d'investissement et même de coût. Accepter la notion de ROI est une erreur, car cette notion n'est pas basée sur le même référentiel temporel et les mêmes valeurs.

 

  • Notre relation aux valeurs de l'entreprise: en période de crise, elle permet à l'organisation de se recentrer sur ses principes et sur ses forces. Pour la fonction RH, la culture d'entreprise est aussi une raison d'être, qui nourrit nos actions. Nous sommes des garants et des véhicules de cette culture. Mais parfois nous nous sommes compromis en acceptant une différence grandissante entre le déclaratif et la réalité.

 

  • Notre relation aux employés: Payroll, gestion administrative, ressources, processus, policies... Que de mots froids, dénués de toute dimension réellement humaine. Soyons clair, notre rôle est d'assurer la performance des organisations. Mais en nous «technicisant», nous avons parfois oublié que notre rôle était aussi d'écouter.

 

  • Notre raison d'être: Pour être reconnus, nous avons accepté un autre sacrifice, certes agréable, mais qui est au cœur de ce débat. Nous avons accepté de remplacer le management, ou du moins de pallier à ses défauts. Plutôt que coach, nous sommes devenus acteurs. Ce rôle est valorisant, il est aussi déresponsabilisant pour le management... Le constat est là. En devenant des «business partners», nous avons aidé les organisations à entrer dans un jeu qui, aujourd'hui, fait beaucoup de perdants. Voici donc venu le temps de faire évoluer ce modèle:

 

  • Repenser la gouvernance d'entreprise: La dernière crise financière a renforcé les dispositifs de contrôle (SOX); celle-ci doit nous permettre de participer à la gouvernance des entreprises en contrôlant mieux les rémunérations mais aussi en utilisant des droits d'alerte RH, sur la base de notre connaissance du tissu humain et des dimensions irrationnelles inhérentes à toute entreprise.

 

  • Affirmer nos valeurs: Nous ne devons pas être qu'une fonction de process. Notre valeur est dans notre capacité à apporter un angle de vision volontairement différent aux dirigeants. Nous devons assumer notre mission de «contre-pouvoir constructif», en amenant une autre forme de réflexion construite sur nos valeurs (performance à dimension humaine, efficacité à moyen et long terme, développement professionnel, responsabilisation du management...) et en challengeant constamment nos partenaires au sein des équipes de management.

 

  • Prendre plus de risques: Pour construire cette nouvelle forme de gouvernance, et la faire respecter, nous devons accepter de prendre des risques. Notre crédibilité passe par notre capacité à oser, à proposer, à échouer et à retenter. Prendre des risques, c'est aussi mesurer si nous sommes acceptés comme une fonction qui parle d'égal à égal avec le management.
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Serge Panczuk est Vice President Human Resources International chez Edwars Lifesciences.

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