Les technologies numériques - Dossier

Les technologies numériques transforment les pratiques RH

Progressivement, les technologies numériques conquièrent le monde du travail. Tour d’horizon des outils les plus signifiants dans le domaine de la gestion d’entreprise et de la gestion RH.

Les dirigeants RH n’ont qu’à bien s’accrocher: il ne devrait pas rester grand-chose de la gestion traditionnelle de l’entreprise et des ressources humaines lorsque le numérique aura atteint son apogée. Pour l’instant, ils n’ont peut-être pas tout à fait pris la mesure du bouleversement qui est en marche. C’est du moins ce que suggèrent certaines recherches, dont celles de Markess International à Paris et Prospective Media à Zurich (dont les propriétaires sont aussi les éditeurs de HR Today).
 
Par exemple, selon le dernier rapport de l’agence zurichoise, les employeurs n’ont pas pleinement réalisé que 67 pour cent de leurs collaborateurs utilisent déjà quotidiennement un appareil portable – généralement le leur – pour accéder aux applications numériques de l’entreprise. Il y aurait un décalage non seulement entre la réalité des employeurs et celle des employés, mais également au sein même des directions, entre les pratiques et les aspirations des managers qui, au fond, ne demanderaient pas mieux que d’introduire davantage de numérique, mais disent manquer de possibilités pour le faire. Plus de la moitié des managers RH disent tout de même avoir inscrit l’automatisation de leurs processus dans la liste de leurs priorités. Et 56 pour cent d’entre eux auraient déjà recours à une solution de type Sofwtare-as-a-Solution (Saas) pour accomplir certaines de leurs tâches – gestion des absences, planification des temps de travail, management de la performance, etc.
 
Les avantages des outils et applications numériques paraissent évidents: ils dématérialisent la paperasse, amplifient la portée de la communication d’entreprise – grâce aux réseaux sociaux – et multiplient les voies du recrutement. D’où supposément un gain de temps, d’argent et de productivité. Pourtant, la transition technologique n’est pas forcément bon marché: «La question des coûts est intéressante, relève Bertrand Audrin, assistant de recherche à l’Université de Fribourg (voir aussi en page 20-21). Aux frais d’implémentation viennent s’ajouter des frais d’abonnement aux services en ligne et des frais de formation pour apprendre aux employés à maîtriser les outils. Des frais qui, au gré des mises à jour, peuvent être récurrents. Le calcul est donc finalement assez complexe.»
 

Le numérique, c’est la santé

«Depuis vingt ans que nous analysons les technologies numériques, il ne nous arrive pas tous les jours d’être surpris. Mais nous l’avons été par le développement des applications et des outils dédiés à l’amélioration du bien-être du personnel», affirme Michel Berry, chercheur en gestion à l’Ecole du management de Paris. Les plates-formes Keas ou ViveCoach, par exemple, permettent de créer une émulation au sein des entreprises, pour adopter une bonne hygiène de vie. «Aux États-Unis, certaines assurances-maladie accordent des réductions de primes si les collaborateurs s’engagent concrètement à modifier leurs comportements en matière de santé en s’équipant de podomètres. La perspective des possibles économies commence à retenir l’attention des comités de direction. Des études ont montré que ces outils et applications permettaient souvent d’atteindre de bons résultats – environ 20 pour cent de moins sur les frais de santé à charge de l’entreprise.» D’après Gartner Inc., 50 pour cent des sociétés américaines seront adeptes d’ici à 2015. Le marché est estimé à plusieurs milliards de dollars.
 

Vive le recrutement mobile!

Selon Prospective Media, le recrutement mobile est en plein essor, sous l’impulsion des candidats à l’embauche. Trois sur quatre misent sur Google pour trouver des informations concernant des employeurs potentiels. Presque autant se servent de leur smartphone pour consulter des offres d’emploi. Et quasiment un sur deux souhaiterait qu’il soit possible de postuler en donnant un lien vers son profil sur un réseau social.
 
Le recrutement proactif peut passer par dooldy.ch, un site ouvert en 2013 qui fonctionne en mode Saas. Moyennant un abonnement annuel, les employeurs peuvent y présenter leurs activités et mettre en avant les avantages offerts aux collaborateurs. «Ce n’est pas un site d’annonces, mais plutôt une vitrine promotionnelle bien organisée, avec des photos et des vidéos, explique Pierre Kaléba, directeur. Accessoirement, c’est aussi un outil de sourcing: le recruteur peut accéder à une base de talents et entrer en contact avec les profils qui l’intéressent.» Depuis peu, la plate-forme se décline sur smart-phone via une application IOS et Androïd.
 
Dans le domaine des sites d’offres d’emploi ou jobboards, l’une des dernières tendances est le paiement à la performance.
 
Co-fondateur de Neuvoo.ch, Maxime Droux croit résolument en ce nouveau système. «Contrairement aux jobboards traditionnels qui, à l’instar de Monster, modèle de référence depuis 1995, publie des annonces payantes, nous faisons office d’agrégateur d’offres d’emploi. Autrement dit, nous indexons toutes celles qui sont postées sur Internet en Suisse. Nous sommes en quelque sorte le Google de l’emploi! Cela explique pourquoi vous trouverez actuellement 13 000 offres d’emploi sur Neuvoo, contre 5000 sur Jobup.
 
Contrairement à la plupart des jobboards qui financent leurs services en constituant des CVthèques payantes pour les employeurs qui veulent les consulter, nous redirigeons automatiquement les internautes intéressés par une offre d’emploi vers son émetteur. Ce dernier peut choisir de payer l’annonce à la performance, c’est-à-dire qu’il paie pour figurer en tête des résultats qui apparaissent lors des recherches effectuées par les internautes, et une taxe lui est ensuite facturée pour chaque clic.» Afin d’aider les annonceurs à optimiser leurs processus de recrutement, Neuvoo leur propose d’évaluer la performance de l’outil en calculant le ratio des embauches par canal de diffusion. A noter enfin que le site enregistre plus de 100 000 visites par mois.
 

Exit l’intranet, place aux RSE

Quant aux réseaux sociaux, leur déploiement est tel que certaines entreprises ne voient plus l’intérêt de maintenir une solution intranet. En 2012, selon un sondage effectué par le cabinet d’études Arctus, 30 pour cent des dirigeants RH ont déclaré avoir déjà implémenté un réseau social d’entreprise (RSE). Principaux socles technologiques utilisés: Sharepoint 2013 et Yammer (Micosoft), Microsoft Office 365, Jalios, IBM Connections et IBM Portail WebShpere, Zyncro, Knowledge Plaza – Sphere, Chatter Salesforce, Zimbra Communities, blueKiwi et Jive.
 
Une étude réalisée par Microsoft et l’Observatoire IDC, et dont les résultats ont été publiés lors des Tech.days 2014, indique que tous ces développements technologiques devraient aboutir à la création de nouveaux métiers, notamment dans la fonction RH. Le site focus.rh.ch en cite plusieurs: data scientist, chief data officer (responsable de la gestion des données), data protection officer (responsable de la sécurité et de la conformité des données) et community manager (responsable de la gestion des communautés en ligne). Gageons que tous ces experts du futur ne seront pas engagés par voie d’annonce dans la presse...
 

Quelques produits leader

Dans le domaine de la gestion de projets: trello/wunderlist (tâches, développement), workflow (prise de notes) et dropbox stockage partagé. Ces outils collaboratifs sont tout à fait aboutis et permettent de diminuer la quantité de mails échangés.

Au niveau des réseaux sociaux d’entreprise (RSE): Yammer, blueKiwi, Chatter Salesforce et Sharepoint 2013. Yammer correspond au volet social de l’offre collaboratrice de Microsoft et possède, selon Markess International, un plus grand potentiel social que Sharepoint 2013, principalement en raison d’une ergonomie simplifiée. Racheté par Atos, blueKiwi propose dans sa dernière version des flux d’activité finement paramétrables et archivables, avec un réseau social type microblogging qui s’ajoute aux communautés historiques. Avec «appexchange», Chatter Salesforce offre un marketplace facilement intégrable sur lequel chaque développeur peut monnayer ses applications.

En ce qui concerne la gestion d’entreprise, citons les logiciels Sage (plus de 60 000 clients en Suisse) et Crésus (25 000). Depuis 2014, le logiciel Crésus Salaires propose la transmission mensuelle des données relatives à l’impôt à la source aux administrations cantonales via la plate-forme swissdec. Leader en Suisse romande, le pack WinBIZ Entreprise PRO est utilisé par quelque 15 000 PME. Tous ces outils sont disponibles en mode Saas ou Cloud et sont multipostes, multi-monnaies et multi-sociétés.

Eclairage technique

Quelle différence entre Saas et Cloud computing?

L’expression «Software as a Service» (Saas) désigne un logiciel que l’on peut utiliser à la demande et en self-service, en l’activant en ligne. Il ne s’agit donc pas d’un logiciel vendu avec une licence et que vous devez installez sur vos propres serveurs. Le service en ligne est payable à l’usage ou au mois. Le concept a été introduit en Suisse à partir des années 2000.
 
Quant au Cloud computing, il désigne la possibilité de louer, auprès d’un fournisseur, un serveur avec une capacité de stockage et de la bande passante en quantité illimitée. Contrairement aux hébergeurs traditionnels, les providers de Cloud mutualisent leurs ressources, ce qui leur permet de vous offrir des capacités illimitées sur ces trois plans. L’expression «Cloud» (nuage) vient du fait que les applications et les données sont en circulation sur internet, sans qu’il soit possible de les localiser – un peu comme l’eau ou l’électricité sur un réseau d’approvisionnement.

 

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Typographe de premier métier, Francesca Sacco a publié son premier article à l’âge de 16 ans pour consacrer toute sa vie au journalisme. Elle obtient son titre professionnel en 1992, après une formation à l’Agence télégraphique suisse, à Berne. Depuis, elle travaille en indépendante pour une dizaine de journaux en Suisse, en France et en Belgique, avec une prédilection pour l’enquête.

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