Maladie, certificat médical et protection contre les congés
Une maladie se prouve par la production d'un certificat médical. Les situations où l'employeur est en droit de douter de son bien-fondé sont malheureusement fréquentes. La mise en cause du certificat est soumise à des conditions restrictives.
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Un employé malade a droit aux prestations de l’assurance perte de gain, ou à défaut, au versement de son salaire pour une durée déterminée. Il bénéficie également d’une période de protection contre les congés donnés en temps inopportun. En contrepartie, le travailleur doit fournir la preuve de son incapacité de travail au moyen d’un certificat médical. Il est usuel que l’employeur en demande sa production dès le 2e ou 3e jour d’absence.
Doutes sur le certificat médical
Le certificat médical ne constitue pas un moyen de preuve absolu mais bénéficie d’une présomption d’exactitude. L’employeur doit avoir des doutes concrets et sérieux pour pouvoir le remettre en cause. Ce sont souvent les circonstances qui entourent l’incapacité de travail qui suscitent de tels doutes. Tel est notamment le cas lorsque l’employé présente un certificat médical immédiatement après avoir reçu son congé ou un avertissement ou encore après s’être vu refuser une période de vacances. Il en va de même des absences régulières juste avant ou après les week-ends, jours fériés et vacances.
L’employeur peut avoir des doutes sérieux sur le bien-fondé d’un certificat médical quand l’employé a un comportement contradictoire avec ce qui a été constaté par le médecin. Il en va ainsi du collaborateur qui poste, sur les réseaux sociaux, des photos de sa soirée arrosée en boîte de nuit ou de sa journée à ski alors qu’il souffre prétendument d’une angine. Le certificat peut être mis en doute si un travailleur répare son toit, alors qu’il est en arrêt de travail en raison de douleurs au genou. Les doutes sont encore légitimes lorsque l’employé produit, pour la même incapacité, une succession de certificats médicaux établis, à chaque fois, par un médecin différent, pratique appelée «doc shopping» ou encore en cas de certificat médical rétroactif.
Médecin-conseil
L’employeur, qui remet en cause le bien-fondé du certificat médical, doit immédiatement en informer l’employé et exiger qu’il se soumette à un examen de contrôle auprès d’un médecin-conseil, aux frais de l’entreprise. Le but de ce second avis médical est de confirmer ou d’infirmer l’incapacité de travail. Le refus du collaborateur de se rendre à la convocation pourra être interprété comme un aveu du caractère non sérieux du certificat produit.
Le médecin-conseil est soumis au secret médical. Lorsque l’entreprise demande un examen de contrôle, il n’est habilité qu’à confirmer ou infirmer l’existence d’une incapacité, le taux de celle-ci et son origine, soit maladie ou accident.
L’employeur veillera à mentionner, dans son règlement d’entreprise, le droit de requérir à un certificat médical dès le 1er jour d’absence ainsi que la possibilité de recourir à un médecin-conseil de son choix en cas de doute. Lorsque l’incapacité de travail se révèle infondée ou non prouvée, l’employeur peut, à certaines conditions, ne pas être tenu de verser le salaire, voire réclamer le remboursement du salaire versé sans cause.
Employé qui ignore sa maladie
Il arrive parfois que l’employé soit atteint dans sa santé sans en avoir connaissance. Voyons l’exemple d’un travailleur qui produit un certificat médical rétroactif, plusieurs mois après son licenciement, attestant qu’il était atteint d’une leucémie au moment de la réception de la résiliation. L’employeur a soutenu que le licenciement était valable car l’employé était capable de travailler au moment de la résiliation. Le Tribunal fédéral (TF) a considéré que la protection contre les congés, en temps inopportun, devait être appliquée dans la mesure où un engagement, par un nouvel employeur, était hautement invraisemblable. La protection ne dépend, par conséquent, pas de la connaissance effective de l’incapacité de travail.
Maladie insignifiante
Il arrive qu’un travailleur décide de continuer à travailler malgré une incapacité de travail dûment constatée par un médecin. Selon le TF, l’employé ne perd pas pour autant sa protection contre les congés. Une atteinte à la santé insignifiante, qui ne compromet pas l’engagement par un nouvel employeur, constitue la seule exception. Il en va ainsi d’une employée qui travaillait malgré une angine le jour de son licenciement.
Maladie de courte durée
Le but de la protection contre les congés en temps inopportun est d’accorder un délai de congé complet au travailleur pour ses recherches d’emploi. La protection s’applique également lorsque l’incapacité est de courte durée. Le TF a considéré qu’une employée malade les 24 et 25 décembre avait droit à la prolongation du délai de congé. Compte tenu des nouveaux moyens de communication, elle pouvait constituer des dossiers de candidature quand bien même ces jours étaient fériés.
Certificat attestant un mobbing
Lorsqu’un collaborateur s’estime victime d’atteintes à sa personnalité, de mobbing ou de harcèlement sexuel, il doit en apporter la preuve. Dans ce contexte, il arrive que le médecin indique que l’atteinte à la santé de son patient est liée à un mobbing professionnel ou que le collaborateur est apte à travailler, sauf pour son employeur actuel. De telles affirmations n’ont pas une valeur probante suffisante lorsqu’elles sont fondées sur les seules déclarations du travailleur. Le médecin – qui ne peut que constater des symptômes – n’a pas de connaissance personnelle, ni complète de l’environnement de travail et des circonstances. Il ne connaît pas la position de l’employeur ou des collègues de son patient. Il n’est pas en mesure de certifier que l’incapacité résulte réellement des conditions de travail.
Certificat médical rétroactif
En pratique, il est fréquent qu’un collaborateur attende d’avoir été licencié pour se rendre chez son médecin, qui atteste par certificat médical, d’une incapacité de travailler rétroactive au jour du licenciement. Un tel certificat ne peut être admis que si la rétroactivité ne dépasse pas quelques jours et qu’il s’appuie sur des symptômes objectivement constatables, comme une cheville foulée lors d’une randonnée en montagne. Par contre, les certificats médicaux qui se fondent uniquement sur les déclarations subjectives du patient ont une forme probante faible, voire nulle.
Travailler durant une période de maladie
Lorsque le collaborateur bénéficie d’un certificat médical, il reste tenu par son devoir de diligence et de fidélité de la même manière que lorsqu’il fournit sa prestation de travail. Cette obligation implique qu’il doive tout mettre en œuvre pour recouvrer sa pleine capacité de travail, le plus rapidement possible. Il doit s’abstenir de toute activité incompatible avec son certificat médical et son état de santé.
Le travail rémunéré durant une prétendue incapacité de travail constitue une violation grave du devoir de diligence et de fidélité. Cette violation comporte une circonstance aggravante qui réside dans le fait que l’employé se prétende malade pour travailler pour le compte d’un tiers.
Selon le TF, un licenciement immédiat peut en principe être justifié lorsque l’activité pour le compte d’un tiers est dûment établie et répétée. Dans ce cas, peu importe que cette activité ait lieu pour le compte du mari de la travailleuse ou soit non-rémunérée.
Une secrétaire s’est retrouvée en incapacité totale de travailler. Durant sa maladie, elle a travaillé plusieurs heures par jour dans l’entreprise de son mari, où elle répondait au téléphone, accueillait les clients, effectuait des tâches administratives. Son employeur l’a licenciée avec effet immédiat. Selon le TF, l’employée a irrémédiablement rompu le rapport de confiance avec son patron. Il importait peu que l’employée n’ait pas travaillé à plein temps dans l’entreprise de son mari. Le licenciement immédiat sans avertissement préalable était justifié.