Places d’apprentissage: vieux soucis, nouveaux défis
Le baromètre de l’apprentissage suisse annonce une amélioration de la situation en 2006. Les autorités et les entreprises s’engagent pour augmenter le nombre de places d’apprentissage. Mais un travail en amont est nécessaire pour mieux orienter les jeunes et pour les encadrer.
L’inadéquation entre l’offre et la demande de places d’apprentissage en Suisse est toujours béante. Les professionnels des ressources humaines rejoignent les conclusions du baromètre de l’apprentissage communiqué en octobre par l’Office fédéral de la formation professionnelle (OFFT).
Il en ressort que seules 74000 des 77500 places proposées ont été attribuées. 3500 places sont donc restées vacantes. C’est une légère amélioration de l’adéquation par rapport à 2005. Au rang des bonnes nouvelles pour les jeunes, le nombre de places d’apprentissage est en hausse de deux pour cent par rapport à l’évaluation de 2005 (76000).
Mais par rapport à ces 3500 places disponibles, on constate que plus de 10000 jeunes sont toujours sans contrats cette année. Le nombre total de jeunes sans solution a pourtant reculé de 1500 en 2006.
Selon plusieurs responsables d’entreprise (voir notre tableau à la page 7), ce décalage existe car de nombreux jeunes croient que la seule voie vers la réussite passe par une formation scolaire (collège, lycée) plutôt que professionnelle. C’est ce qu’on peut appeler le syndrôme de la France, le pays du «baccalauréat pour tous». En Suisse, plusieurs jeunes sont tentés par la voie scolaire sans même se poser la question des débouchés possibles. D’où une inadéquation entre l’offre et la demande.
Autre constat, l’inadéquation constante en-tre l’offre et la demande a des conséquences directes sur la «file d’ attente» (le nombre cumulé de gens qui n’ont pas trouvé de solutions): après quatre années consécutives de croissance, celle-ci perd 500 personnes pour en réunir 22000. Moins de la moitié de ces personnes (10500) souhaitaient entamer un apprentissage cette année.
Les différents secteurs présentent des résultats très variés: «Au niveau des branches professionnelles, les postes de dessinateurs et des professions techniques de bureau ont été attribués à 99 et 98 pour cent. A l’autre extrémité du classement, on trouve l’industrie du métal, des machines et de la construction, avec des taux d’attribution de 94 et 91 pour cent.»
L’augmentation du nombre de places d’apprentissage, comme nous l’expliquait la directrice de l’Office de la formation professionnelle Ursula Renold dans notre édition de janvier, passe par une prise de conscience des entreprises: la formation est rentable. L’Office fédéral, les cantons, mais aussi de nombreuses entreprises conscientes de l’importance de la relève travaillent au marketing de l’apprentissage
Parallèlement, les entreprises formatrices et les services spécialisés placent beaucoup d’espoir dans le nouveau concept d’apprentissage en réseau. Pour les petites entreprises qui considèrent souvent que la charge administrative, temporelle et financière d’un apprenti comme trop lourde, ce nouveau système d’apprentissage en réseau est une solution d’avenir. Plusieurs petites entreprises se «partagent» un apprenti qui est placé sous la responsabilité d’un employeur pilote. Ce système est pour l’employeur un système souple et l’apprenti a la possibilité de découvrir plusieurs facettes d’un métier.
Le «problème» de l’apprentissage ne se résoudra pourtant pas, aux yeux des spécialistes, sans un travail en amont. Les responsables de l’orientation professionnelle sont pointés du doigt. Une réforme urgente semble nécessaire. Trop nombreux sont les jeunes qui ne savent pas dans quelle direction se lancer. Il y a aussi ceux qui choisissent une voie d’apprentissage et se rendent compte que celle-ci ne les intéresse pas. Plus fondamentalement encore, beaucoup de jeunes ne pensent surtout pas à faire un apprentissage s’ils ont de bons résultats scolaires.
Enfin, dernier point qui se dégage de nombreuses conversations: les formateurs, dans l’apprentissage, doivent être secondés par des spécialistes capables d’aider à résoudre les problèmes sociaux des apprentis. Car ces problèmes peuvent lourdement pénaliser les entreprises formatrices et la motivation des professionnels qui transmettent leurs connaissances.