Un patron intègre donne le congé dans les règles de l’art
Selon plusieurs sondages, 10% des collaborateurs concernés par un licenciement pensent au suicide. La procédure de licenciement doit donc être soignée. Et bien des erreurs peuvent être évitées. Le plus important est de ne pas déstabiliser l’employé qui doit prendre la porte et lui donner les moyens de réorienter sa carrière.
Il existe plein de bonnes raisons pour licencier un collaborateur :
- La suppression d’un poste
- Une prestation insuffisante
- Des problèmes de comportement
- Un déficit de connaissances
- Une mauvaise identification avec l’entreprise ou avec la mission
- Des incompatibilités entre les personnes
- Une mauvaise situation économique
Mais la plupart du temps, un licenciement n’a pas une seule cause mais est le fruit d’une combinaison de plusieurs facteurs. Si la procédure de licenciement est clairement établie et rigoureusement suivie par le cadre qui doit faire ce «sale boulot», le licenciement pourra s’effectuer de manière à ce que le collaborateur concerné puisse encaisser le coup, voire même l’accepter. La recette pour réussir un licenciement de façon humaine, objective et conforme à la législation s’apprend en général dans les cours de management. Mais comment argumenter un licenciement quand le collaborateur travaille depuis de nombreuses années dans la société. Et qui plus est, a toujours bénéficié d’évaluations annuelles favorables? Comment lui expliquer d’une manière plausible que cette fois vous êtes vraiment d’un autre avis?
Durant l’entretien de licenciement, les raisons qui ont poussé l’entreprise à prendre cette décision doivent tout d’abord être clairement explicitées. La question de savoir si le collaborateur désire poursuivre son travail pendant le délai légal ou non doit également être abordée. Certains optent pour une sortie dans les règles et choisissent de travailler jusqu’au jour prévu par le délai de résiliation. D’autres préfèrent quitter l’entreprise sans attendre ce délai. Il n’y a pas de solution juste. C’est aux deux parties de peser le pour et le contre et de prendre une décision en fonction. Annoncer un licenciement fait partie des tâches les plus difficiles. Lors de jeux de rôles que j’organise pour entraîner cette procédure, les cadres les plus routiniers ont montré des signes de faiblesses.
Du côté des collaborateurs, un licenciement est souvent vécu comme la chute dans un gouffre émotionnel. Certains souffrent d’hyperactivité, d’autres de dépressions. La moitié des personnes licenciées en Suisse recourent à des calmants durant ces périodes. Selon plusieurs sondages, environ 10% des collaborateurs concernés par un licenciement pensent au suicide. Dans le hit-parade des facteurs de stress, le licenciement arrive en quatrième position. Après la mort, la séparation du couple et l’atteinte à l’intégrité physique.
La manière dont s’effectue un licenciement a donc une très grande influence sur la poursuite de la carrière du collaborateur. Si l’employé a l’impression d’avoir été mal traité pendant la procédure, ou d’avoir été mis à la porte injustement, il aura tendance à se poser la question: «Pourquoi moi?» Quelqu’un qui a été blessé émotionnellement risque de s’en prendre à l’entreprise, en s’adressant à un avocat et en exigeant des indemnités pour tort moral. A l’inverse, si le licenciement a été clairement argumenté, dans le respect de la personne, le collaborateur parviendra plus facilement à faire le deuil et à se tourner vers l’avenir.
Pendant les semaines qui suivent un licenciement, un collaborateur a besoin de stabilité. Avant d’avoir défini ses compétences et d’avoir défini le poste qu’il doit rechercher, cela ne sert à rien de le lâcher sur le marché du travail. Car celui qui n’a pas encore réussi à digérer émotionnellement son licenciement risque de donner une mauvaise impression aux recruteurs. Et avant d’être en mesure d’expliquer rationnellement pourquoi il est à la recherche d’un nouveau travail, il ne devrait pas accepter d’entretiens. On ne laisse qu’une seule fois une première impression. Et quand celle-ci est mauvaise, il n’y aura pas de deuxième chance.
Lors de licenciements, on oublie souvent que les collègues de l’employé qui a été congédié res-tent dans l’entreprise. Et lorsque ceux-ci apprennent que le processus de licenciement s’est mal passé, leur motivation risque d’en prendre un coup. La période entre l’annonce et le départ effectif du collaborateur nécessite donc une attention particulière de la part des cadres de l’entreprise. Et il ne s’agit pas uniquement de s’assurer que les tâches de la personne licenciée ont été prises en charge par le reste des collaborateurs, mais aussi d’être attentif au changement de la structure sociale de la société, causée par le départ.
Aujourd’hui, les licenciements se multiplient et se déroulent souvent sur une période plus courte. Pourquoi? Par le passé, le contrat symbolique qui liait l’employeur à l’employé assurait à ce dernier du travail et un salaire qui lui permettait de construire sa vie sur le long terme. En échange, l’employé s’engageait plus ou moins à vie pour son entreprise qui devenait en quelque sorte sa deuxième famille. Les deux parties pouvaient donc tabler sur la stabilité et la sécurité de leurs rapports.
Aujourd’hui, la sécurité et la stabilité n’existent plus dans notre économie. A cause des changements structurels incessants, l’employeur est sans cesse à la recherche de nouvelles compétences, de nouvelles valeurs et de nouvelles visions. Cette situation exige donc plus de flexibilité et surtout une meilleure capacité d’adaptation de la part des employés. Mais quand un licenciement s’impose, l’entreprise devrait tout entreprendre pour offrir à son collaborateur les moyens de réorienter sa carrière. Avec par exemple un bon programme d’«outplacement». En échange, l’image de l’entreprise sera renforcée. Et cette image positive ne servira pas seulement à motiver les collaborateurs restés dans le ba-teau. Elle servira aussi à attirer de nouveaux talents. Et donc d’assurer l’avenir de l’entreprise.