Rémunérations

Un triple espoir à l'occasion de l'Equal Pay Day

Cette année, l’Equal Pay Day tombe le 20 février. Il reflète la différence salariale de 14.4% qui persiste entre les femmes et les hommes dans le secteur privé en Suisse. Un triple espoir est néanmoins permis en marge de l'édition 2021.

La journée de l’égalité salariale (Equal Pay Day ) est organisée par l’association Business and Professionnel Women (BPW). Elle correspond au jour de l’année jusqu’auquel une femme doit travailler en moyenne pour obtenir le même salaire annuel qu’un homme qui aurait travaillé jusqu’au 31 décembre de l’année précédente.

Organisée depuis 2009 dans notre pays, l’Equal Pay Day revêt une résonnance particulière en 2021 pour au moins trois raisons. Tout d’abord, on commémore les 40 ans de l’inscription dans la Constitution fédérale du principe de l’égalité entre les sexes , en particulier celui selon lequel l’homme et la femme ont droit à un salaire égal pour un travail de valeur égale. Ensuite, les entreprises de plus de 100 personnes devront avoir réalisé leur analyse interne de l’égalité salariale d’ici la fin du mois de juin, conformément à la modification de la loi fédérale sur l’égalité (LEg) entrée en vigueur en juillet 2020. Enfin, le Bureau fédéral de l’égalité propose depuis le début de cette année un nouveau module de l’instrument Logib destiné aux entreprises de moins de 50 personnes.

Cette année est donc marquée par l’espoir que la réduction des inégalités salariales s’accélère grâce notamment à l’entrée en vigueur des nouvelles bases légales et que la journée de l’égalité salariale se tienne à l’avenir beaucoup plut tôt dans l’année. Les effets des nouvelles bases légales sur les différences salariales ne pourront toutefois pas être mesurés sur le plan statistique avant que les scientifiques ne traitent les données de l’Enquête suisse sur la structure des salaires de 2022. Par ailleurs, les autorités fédérales devront évaluer l’efficacité de ces nouvelles exigences légales, mais seulement après que la deuxième analyse aura été effectuée, soit au minimum dans quatre ans mais au plus tard dans neuf ans (cf. art. 17b LEg).

Sans attendre les conclusions de ces études, il est possible de formuler certaines hypothèses. Dans le cadre des contrôles de l’égalité salariale qui sont menés dans les marchés publics de la Confédération avec l’instrument Logib, environ 55% des entreprises ont une différence salariale sexospécifique significativement supérieure à 0% sur le plan statistique. En d’autres termes, il existe, dans ces entreprises et selon Logib, un écart salarial inexpliqué au sens strict entre les femmes et les hommes qui est démontré sur le plan statistique. Si cette tendance est généralisable en dehors des contrôles, on peut donc s’attendre à ce que la majorité des entreprises visées par la modification de la LEg cherchent à améliorer leur résultat après leur première analyse, même si elles respectent le seuil de tolérance de l’instrument Logib qui est fixé à 5%.

Dès lors, on peut aussi s’attendre à une réduction des inégalités salariales telles que mesurées par la statistique nationale suite à la modification de la LEg. Néanmoins, ces inégalités persisteront dans tous les cas au niveau de l’ensemble de l’économie puisque cette modification de la LEg ne concerne que 0.9% des entreprises. Par ailleurs, la part inexpliquée de la différence salariale est plus importante dans les petites entreprises que dans les grandes. C’est pourquoi la mise à disposition par le Bureau fédéral de l’égalité du module de l’instrument Logib destiné aux entreprises de moins de 50 personnes tombe à point nommé.

Les conditions sont donc réunies pour être raisonnablement optimiste cette année en matière d’accélération de la réduction des inégalités salariales entre les femmes et les hommes. Ce même si on est encore loin d’imaginer célébrer l’Equal Pay Day en même temps que le nouvel an.

 

commenter 0 commentaires HR Cosmos
SB

Après avoir réalisé une thèse de doctorat liée à la discrimination au travail, Steve Binggeli a travaillé plus de six ans dans les bureaux de l’égalité de la Confédération et du canton de Vaud. Aujourd'hui, il est membre du Comité de Direction du Service du Personnel de la Ville de Lausanne, responsable de la rémunération et de l’analytique RH. Il préside aussi le conseil de la fondation Pacte qui a pour mission de promouvoir l’égalité des chances et la mixité en entreprise

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