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«Une culture d’apprentissage et de partage de l’information favorise l’intégration»

Iolanda Cassar, assistante RH au sein d’une organisation internationale, a reçu le prix Interiman/Humanys 2015 pour son mémoire intitulé: «The perceived role of socialization agents in newcomers learning during organizational socialization», un travail réalisé dans le cadre du MAS Management, Ressources Humaines et Carrières, des Universités de Genève, Lausanne, Neuchâtel et Fribourg.
Vous montrez le rôle déterminant joué par les agents de socialisation pendant les premiers mois d’un collaborateur dans une nouvelle organisation. Qui sont ces agents de socialisation? 
Il s’agit des personnes au sein de l’organisation qui contribuent à l’apprentissage des nouveaux arrivants au cours de leur socialisation, et avec lesquels ils sont en contact quotidien. Ce sont des superviseurs, des subordonnés, des collaborateurs ou des collègues.
 
Votre étude montre que la période d’«onboarding» est complexe à cause des acteurs concernés mais aussi des dynamiques organisationnelles et des interactions entre ces acteurs. Pouvez-vous nous éclairer? 
Ces interactions sont conditionnées par des comportements (par les agents) dénotant une sécurité psychologique (ne jugeant pas et soutenant la personne) ou des comportements entraînant une dévalorisation sociale (caractérisés par une attitude empêchant la nouvelle recrue d’accéder aux informations cruciales et/ou d’apporter sa pierre à l’édifice). En dépassant les préoccupations de jugement, les nouveaux collaborateurs qui bénéficient d’un climat assurant une sécurité psychologique sont confortés dans une démarche d’apprentissage qui facilite leur intégration et ce, grâce au soutien d’un superviseur qui peut jouer le rôle de «coach» ou de collègue. En revanche, la dévalorisation sociale de la part des agents a pour conséquence le désengagement progressif du processus d’apprentissage et de l’organisation par le nouveau collaborateur. 
 
Quels sont «les mécanismes et les opportunités qui facilitent cet apprentissage pendant la socialisation»? 
L’étude a démontré que les comportements d’apprentissage étaient davantage facilités quand les agents de socialisation avaient de l’expertise, étaient disponibles, partageaient l’information, étaient tolérants aux erreurs, et associés aux activités de travail. Le contexte organisationnel qui facilite l’apprentissage était celui qui fournit des programmes de formations au bon moment et qui offre aux nouveaux collaborateurs le temps et les conditions nécessaires pour leur apprentissage. En substance, c’est un contexte misant sur la promotion d’une culture d’apprentissage et de partage de l’information où la sécurité psychologique prédomine. De surcroît, cette dernière a des conséquences sur la construction du réseau des référents et sur l’acceptation sociale des nouveaux collaborateurs au sein de leurs nouveaux groupes. 
 
Qu’entendez-vous par «sécurité psychologique» et comment peut-on la stimuler? 
Selon Edmondson (1999) dans Psychological safety and learning behavior in work teams, la sécurité psychologique s’apparente à «la croyance d’être protégé en cas de prise de risque interpersonnelle». Le fait de se sentir rassuré en ce qui concerne les risques liés à l’image de soi faciliterait des comportements d’apprentissage, tels que poser des questions, chercher de l’information et du feedback, rapporter une erreur ou proposer une nouvelle idée. 
 
La sécurité psychologique peut être stimulée par plusieurs biais. Edmondson (2002) dans Managing the risk of learning: Psychological safety in work teams en cite quelques-uns, comme le type de gestion ou la clarté des objectifs de travail pour les équipes. Le comportement et le style de gestion des «teams leaders» jouent un rôle essentiel dans la formation et donc, sur l’influence et la présence de la sécurité psychologique au sein des équipes. Les comportements autocratiques et l’inaccessibilité peuvent nuire à cette présence. Les collègues jouent également un rôle important en soutenant les nouveaux collaborateurs et en réduisant les tensions, le sentiment de solitude, et l’isolement ainsi que le stress qui résulte de la prise d’un nouveau poste. 
 
En termes RH, il est bien entendu nécessaire d’investir aussi bien dans les programmes de formations formels pour les nouveaux arrivants qu’en matière de compétences d’accompagnement des agents de socialisation pour assurer le bon fonctionnement de l’entreprise. 
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Marc Benninger est le rédacteur en chef de la version française de HR Today depuis 2006.

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