Conseils pratiques

Comment attirer les jeunes talents

Les entreprises ont dû s’adapter pour attirer et retenir les jeunes diplômés. Un séminaire organisé par le centre de carrière de l’EPFL s’est penché sur les attentes de la génération Y. Conseils et témoignages de spécialistes.

Le recrutement des jeunes talents est devenu une priorité pour les employeurs. Qu’est-ce qui les motive dans le présent et pour l’avenir et comment toucher ce segment de population? Pour répondre à ces questions, l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) a présenté en novembre 2011 au Rolex Learning Center de l’EPFL, en partenariat avec HR Today, un séminaire sur le recrutement et la rétention des jeunes talents au sein des entreprises.

Au cours de la matinée, des orateurs spécialisés d’horizons différents ont proposé quelques clés pour attirer les jeunes talents. Ils veulent un travail stimulant et varié Les attentes professionnelles des jeunes diplômés sont bien connues du centre de carrière de l’EPFL, qui effectue près de 700 entretiens par an.

Sur ce total, près des deux tiers ont trait à l’insertion dans la vie professionnelle des étudiants en fin de cycle. «Pour commencer, il faut connaître le fonctionnement de l’esprit des diplômés d’aujourd’hui», explique Philippe Ory, Directeur du centre de carrière de l’EPFL. Selon les observations du centre, la préoccupation principale des jeunes reste l’employabilité.

Le prestige de l’employeur, les possibilités d’acquérir une expérience internationale et la formation continue en emploi restent des critères de choix. Comme tout le monde, les diplômés se fixent des objectifs avant de faire un choix: ils cherchent surtout à trouver un travail stimulant et varié au quotidien. Un travail qui leur permet aussi d’évoluer dans un environnement positif, notamment dans les relations
entre collègues, sur le plan humain et matériel.

Ils souhaitent aussi avoir l’opportunité de développer leur potentiel en continu. Par ailleurs, la notion d’équilibre entre vie professionnelle et privée est devenue une priorité pour cette génération qui ne sacrifie plus ce paramètre pour un bon job.

«Aujourd’hui, nous constatons que l’attractivité d’un bon salaire n’est pas un objectif prioritaire dans le choix d’un premier travail. En Europe, Google, par exemple constitue l’employeur le plus attractif notamment pour les jeunes ingénieurs, car elle répond à leurs attentes», confie encore Philippe Ory.

Ainsi, à l’instar de la société Google, pour mieux comprendre le marché des jeunes diplômés, il faut s’intéresser à ce qu’ils font. Plus précisément, ils sont caractérisés par une volonté de construire leur CV, le goût des voyages, les cultures décontractées, et un accès rapide à l’information.

Ils vont postuler avant tout auprès d’une entreprise prestigieuse qui offre des formations continues, des postes avec un intérêt intellectuel, ainsi qu’un environnement de travail agréable. «Les jeunes diplômés de la génération Y sont sensibles à l’attention qu’on leur porte.

Par exemple, un programme d’accueil permettant une intégration rapide dans l’entreprise suscite d’emblée leur intérêt», explique encore le directeur du centre carrière. Dans une phase de recrutement, ils vont analyser en premier les activités, les possibilités de mobilités à l’interne et enfin la mission propre de l’entreprise.

Un aimant à talent

Dès lors, que peut faire une société pour attirer et aussi retenir les jeunes talents qu’elle engage? «Vos employés construisent votre entreprise. Aujourd’hui, 80 pour cent de la valeur qui la constitue n’est pas tangible et provient des clients et des employés alors qu’en 1980, seuls 10 pour cent l’étaient.

Si on analyse les sociétés qui composent l’indice S&P 500, on observe que les choses se sont inversées», constate Job Mensink, le fondateur de brandgiving. Le spécialiste aide depuis plusieurs années les entreprises à développer leur marque employeur et leurs stratégies d’acquisition des talents.

Il estime qu’une entreprise doit devenir «un aimant à talents si elle veut les employer». Car la chaîne de valeur des profits rappelle aussi l’importance des collaborateurs dans le succès de leur société. L’employé va prendre soin des clients dès qu’il est engagé. Les clients vont consommer et acheter plus s’ils sont contents du service fourni.

Ainsi, l’entreprise va multiplier ses bénéfices et ses actionnaires leurs profits. Il est donc primordial d’engager les bonnes ressources au départ de la chaîne. Il s’agit de construire un vrai programme pour attirer ces talents sur le marché de l’emploi.

«Les sociétés qui ont construit une marque réussissent beaucoup mieux. Les méthodes de recrutement traditionnelles comme les agences de placement qui peuvent favoriser un candidat pour toucher leur rémunération ou les techniques d’annonces destinées au grand public ne sont pas les plus performantes désormais», explique encore Job Mensink.

Pour recruter les meilleurs, il faut avoir des propositions attractives auprès du candidat potentiel. «L’entreprise doit pouvoir susciter une certaine émotion chez le postulant. Elle doit lui raconter une histoire qui provient de son ADN et qui corresponde avec celui du futur employeur pour que leurs valeurs respectives s’accordent. Sinon, les deux ne vont pas s’entendre et le recruté risque de quitter son poste dans l’année, ce qui engendre des frais considérables pour les employeurs», relève le fondateur de brandgiving.

Un programme structuré

Pour créer son programme d’aimant à talent, l’entreprise doit se demander comment elle peut attirer les meilleurs et comment surtout elle peut les rendre heureux. Ainsi, elle doit définir un cadre qui répond à ces trois questions: pourquoi, comment et de quoi s’agit-il?

Il s’agit ainsi d’être clair sur certaines notions et d’aller au-delà des simples slogans qui accompagnent une marque. Pour commencer, elle doit raconter son histoire en abordant sa mission prioritaire et expliquer ce qu’elle fait, qui sont ses clients. Ensuite, elle doit présenter ses valeurs et sa culture et enfin ses offres en matière de carrière, aussi bien au niveau des activités que des formations, de la
mobilité.

Lorsque le programme est clair, il doit être communiqué à tous les services, du top management aux ressources humaines, à la production. «Créer une véritable proposition pour les jeunes talents ne se fait pas en un jour. Il faut compter entre 8 et 12 mois pour la mettre en place», dit Job Mensink.

Ces propos rejoignent les idées de Marnick Vandeborek, consultant en marque employeur, pour le Groupe RCA en Belgique, qui relève que la génération des jeunes diplômés est une sorte de génération qui questionne beaucoup. Avant de s’engager pour une société, les jeunes vont poser une question: pourquoi devrais-je venir travailler pour vous et qu’est-ce qui vous différencie des autres.

«Les entreprises doivent présenter leur valeur ajoutée. Les jeunes diplômés veulent une expérience et une marque employeur à laquelle ils peuvent s’identifier. Et non l’inverse. L’employeur doit recruter en fonction de sa culture interne.»

Le consultant cite l’exemple d’Adidas qui a posé d’emblée son critère: «Si vous n’aimez pas le sport, vous ne devriez pas postuler chez nous. Nous recherchons de la passion, sinon vous ne pouvez pas être sur terrain». Un programme qui a le mérite d’être clair! 

Des objectifs différents entre pays prospères et régions émergentes

Pour ces observations, le centre de carrière de l’EPFL s’est appuyé sur une autre enquête sur les étudiants réalisée par Universum en 2011*. Cette dernière s’est penchée sur les objectifs professionnels des jeunes d’aujourd’hui. Le bon équilibre entre vie privée et vie professionnelle ressort en premier avec un taux de 56 pour cent, bien avant l’objectif de trouver un job intéressant.

Bien sûr, il existe des différences culturelles et ce résultat concerne plutôt les pays prospères. En revanche, dans les régions émergentes du monde, les jeunes veulent avant tout devenir des experts dirigeants et des leaders dans leur branche. Dans l’enquête d’Universum, la possibilité de relever des défis intellectuels ou compétitifs arrive en  seconde position (47 pour cent), suivi de la possibilité d’être entreprenant, novateur ou créatif (30 pour cent).

* Universum Student Survey 2011 Trendence Graduate Barometer 2011

 

Les intervenants

Philippe Ory est le Directeur du centre de carrière de l’EPFL.

Job Mensink est le fondateur de brandgiving, une société qui aide les entreprises à développer leur marque employeur et leurs stratégies d’acquisition des talents.

 

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Patricia Meunier est journaliste indépendante en Suisse romande. Elle collabore avec HR Today depuis 2010.

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