Les défis RH les plus dangereux devant une société en démarrage
Les erreurs de recrutement coûtent très cher à une start-up. Sans compter les problèmes relationnels entre associés et membres fondateurs qui minent souvent le lancement d’une PME. La gestion administrative de la société est également délicate. Les conseils du spécialiste de Genilem Cyril Brungger et le témoignage de la start-up NetGuardians.
«L’une des deux principales sources de faillite des start-ups en Suisse provient de problèmes de frictions entre les associés fondateurs», observe Cyril Brungger, gestionnaire chez Genilem, une structure qui accompagne les créateurs d’entreprises innovantes. Au début, la jeune société n’a pas suffisamment de sources de financement pour salarier un ou plusieurs employés.
Le ou les fondateurs doivent tout gérer de A à Z. Lorsqu’une société se développe, elle doit mettre en place des équipes qu’elle doit ensuite motiver, rémunérer et gérer au quotidien. Elle doit aussi mettre en place un service administratif efficace. Une société en démarrage doit surmonter de nombreux défis RH durant ses premières années de vie. Voici un aperçu des plus dangereux.
Engager la mauvaise personne peut s’avérer fatal à une très jeune entreprise. Le recrutement représente une des phases les plus importantes dans la croissance d’une PME, car une équipe bien choisie et qui fonctionne est au cœur de la réussite de toute société.
Dans une petite structure, le recrutement est encore plus crucial car chaque poste de travail a une fonction vitale. Une erreur de casting peut vite coûter très cher lorsque la jeune pousse est en phase de démarrage, voire même mettre en péril sa survie. Elle n’a donc guère le droit à l’erreur quand elle décide d’embaucher. «Lorsqu’un problème surgit avec un nouvel engagement de collaborateur, la start-up peut vite payer jusqu’à trois mois de salaires qui tombent à l’eau ainsi que le temps perdu pendant le processus de sélection», relève Cyril Brungger.
Parmi les start-ups soutenues par Genilem, NetGuardians est un bon exemple qui a réussi ses embauches. Créée en 2007, elle est active dans le domaine de la sécurité informatique qui compte à ce jour une dizaine de collaborateurs. Elle intervient sur un marché de niche, affiche une forte croissance d’activité depuis sa création en 2007, et multiplie les prix et récompenses.
Pour se développer, la toute jeune société a dû constituer une solide équipe de collaborateurs techniques et administratifs. Une action qui représente un véritable défi pour deux jeunes ingénieurs fraîchement diplômés. «Une start-up est avant tout la vision d’une success story. Le défi technologique et le challenge personnel sont en permanence au centre du projet.
Une start-up doit prendre des risques pour saisir sa chance. Et ces risques sont inévitablement partagés avec l’ensemble des collaborateurs. Les recrues des start-up doivent accepter de travailler de longues journées, avec des moyens limités, souvent dans un tout petit bureau, et cela pour un salaire de start-up!», observe dans le journal «Créateurs» Raffael Maio, co-fondateur et vice-président de NetGuardians SA.
Comment motive-t-il ses collaborateurs? «Nous entretenons avant tout une ambiance fortement soudée, notamment par des sorties fréquentes», ajoute encore le vice-président.
Définir les cahiers des charges: un passage stratégique
En général, pendant la phase dite de croissance, la start-up est confrontée au fait qu’elle doit recruter des nouveaux collaborateurs. Le fondateur de la jeune pousse doit alors très vite penser en véritable chef d’entreprise. Désormais, il doit définir son propre cahier des charges et celui de ses futurs employés. Par exemple, être parfaitement au clair sur ce qu’il attend de son futur employé.
«Nous avons rapidement dû faire face à de nouvelles tâches, autres que notre métier d’ingénieurs: encadrement du personnel, travail administratif, gestion des arrivées et des départs», témoigne Raffael Maio. Ce passage stratégique consiste donc à esquisser les principaux chantiers du projet et à lister les tâches avec les compétences spécifiques qu’elles nécessitent.
Une fois ce bilan établi, le nouveau patron peut commencer à réfléchir au profil des personnes qu’il veut engager au tout début de la vie de son entreprise. Il doit aussi être en mesure d’expliquer clairement son business model, ses plans et les problématiques qui le guettent.
«Les créateurs d’entreprises ne peuvent pas encore s’adresser à des agences de recrutement, car elles coûtent trop cher. S’ils mettent une annonce pour un poste, ils risquent d’être submergés d’offres et de ne pas avoir assez de temps pour les traiter de manière professionnelle. N’oublions pas qu’ils ne disposent pas encore d’un service administratif fonctionnel», explique le gestionnaire de Genilem.
Ainsi, pour éviter une surcharge de travail, on observe souvent que le processus de sélection se fait dans un cercle très fermé, soit le réseau soit les proches, et qu’il n’est pas ouvert au public.
Si la société n’a pas les moyens de professionnaliser son recrutement, la solution d’engager des stagiaires universitaires représente une autre alternative. A la sortie de leurs études, les jeunes diplômés effectuent un stage en entreprise pour valoriser leurs compétences. Ils sont rémunérés en général entre 1000 et 2000 francs par mois.
«A la fin de leur stage, ils se voient souvent proposer un poste dans la société. Par rapport à un engagement d’une nouvelle personne, on connaît leur manière de travailler puisqu’ils ont déjà exercé pendant plusieurs mois. Cela diminue les risques d’embaucher un collaborateur inapproprié à la start-up», relève Cyril Brungger.
Dès lors, réussir le recrutement devient une priorité. La démarche doit être objective et non pas reposer sur un simple «feeling». Quand on engage une personne, c’est pour ses compétences, et non par affinité personnelle. Le recrutement n’est pas une science exacte, certes, mais on peut baliser le chemin. Car le secret d’un bon engagement s’appuie sur une définition très précise du profil que l’on recherche.
Simplifier l’administratif et externalisation des tâches
Souvent, le ou les jeunes patrons doivent tout gérer eux-mêmes, car ils ne peuvent pas encore engager dans la phase de démarrage, faute de trésorerie suffisante. Pendant cette période, il s’agit de gagner du temps. «Pour l’administratif, le manager peut s’appuyer sur des logiciels qui vont le décharger pour réaliser sa comptabilité et sa facturation.
Il existe par exemple un logiciel qui traite ces deux domaines et qui permet ainsi de suivre la trésorerie très régulièrement. De cette manière, le dirigeant dispose d’une comptabilité à jour pour travailler», explique le collaborateur de Genilem. Les flux financiers sont de première importance dans la vie de l’entreprise. Pendant les trois premières années de la vie d’une start-up en Suisse, les problèmes de gestion de trésorerie constituent en effet une des deux principales causes de faillite. Ils soulignent ainsi la fragilité de ces dernières qui doivent toujours faire face à leurs fournisseurs.
Concernant les documents et autres contrats de travail, un organisme comme Genilem fournit une base de contrats types qui simplifie le travail d’un jeune patron. Dans le cadre de son activité, ce dernier utilisera des contrats de travail, des contrats de mandats, des contrats d’entreprises ou encore des conventions entre associés et actionnaires.
Outsourcer ses tâches administratives constitue une autre possibilité qui s’offre à une nouvelle société qui n’a pas encore eu le temps de se structurer totalement. Il existe par exemple sur le marché des personnes qui proposent de travailler sur mandat pour une société selon un temps de travail prédéfini.
Elles prennent alors en charge la gestion de la comptabilité, de la facturation, le classement, les devis et les activités de ressources humaines. Ce procédé remplace un engagement d’un collaborateur jusqu’à un poste à temps complet.
En revanche, avant de déléguer certaines tâches propres à sa société et de s’entourer d’une tierce personne pour gérer son activité administrative, il vaut mieux les avoirs pratiquées auparavant afin de bien les mesurer.
Cyril Brungger: «Cette manière d’externaliser l’administration permet de contrôler plus aisément le travail accompli par la personne mandatée à l’extérieur. Et aussi de communiquer avec elle le plus précisément possible.
Nous constatons que cet outsourcing reste marginal dans le monde des start-up, car les patrons peinent à déléguer les activités qui touchent de prêt à l’argent de leur société. Le problème réside dans le fait que cette activité remplit une grande place dans leur emploi du temps.»
L’intervenant