Recrutement

«Les Romands sont plus ouverts aux compétences et au potentiel»

En Suisse romande, les opportunités de carrière sont souvent présentées sous l’angle du sens, de la culture et de l’impact, tandis qu’en Suisse alémanique, la stabilité et les structures sont mises en avant. Entretien avec Thomas Bossard, chasseur de têtes chez Stellar Executive Search, sur les différences culturelles dans le recrutement.

Quelles différences observez-vous à cet égard entre la Suisse romande et la Suisse alémanique?

Thomas Bossard: Il existe effectivement des différences régionales: en Suisse romande, on observe une plus grande ouverture d’esprit vis-à-vis des compétences et du potentiel – les candidats veulent savoir comment ils peuvent évoluer. En Suisse alémanique, l’accent est davantage mis sur la précision des CV, l’expérience et les certificats. En termes de marque employeur, les messages axés sur le sens, l’objectif, la culture et le style de vie ont plus d’impact en Suisse romande, où le travail fait partie intégrante de l’identité personnelle. En Suisse alémanique, la réputation, la stabilité et la solidité comptent davantage. Pour un Alémanique, l’entreprise doit être fiable.

Et qu’en est-il de la collaboration, de la communication et des processus décisionnels? 

En Suisse romande, les décisions sont souvent plus participatives et personnelles. En Suisse alémanique, elles sont plus structurées et documentées. La communication est différente aussi. Lorsque nous recrutons en Suisse romande pour un client zurichois, nous traduisons les attentes et le positionnement dans le langage du marché local, et inversement pour un client genevois à Zurich.

Qu’en est-il de la mobilité des candidats entre les régions linguistiques?

Nous traitons généralement les mandats au sein du réseau local, mais nous clarifions toujours la question de la mobilité. En Suisse romande, nous rencontrons plus souvent des spécialistes venus de France. En Suisse alémanique, ce sont plutôt des spécialistes venus d’Allemagne. La question des frontaliers est un peu plus marquée en Suisse romande, comme on l’a vu notamment dans les hôpitaux pendant la pandémie de Covid. Au niveau international, nous recrutons de manière ciblée pour des compétences spécifiques, par exemple au Royaume-Uni. À Zurich, certaines banques ont un personnel très international, avec parfois plus de 30 nationalités et environ 20% d’Allemands. Mais le sourcing en Suisse reste toujours important.

Vous avez dit que vous «traduisiez» les attentes entre les régions linguistiques. Pouvez-vous nous en dire plus?

C’est justement sur ces éléments subjectifs qu’un chasseur de têtes peut faire la différence. Nous offrons bien plus qu’un profil de poste classique en expliquant comment fonctionne l’entreprise, quels sont ses objectifs, quel est le rôle du poste dans l’organisation. En Suisse alémanique, je mets davantage l’accent sur la croissance, la stratégie et les structures. En Suisse romande, c’est plutôt l’effet de la personne au sein de l’équipe, son impact, qui est mis en avant. Nous traduisons ces différences. Il ne faut pas oublier que les candidats que nous approchons se trouvent généralement dans leur zone de confort. Ils ont de bons emplois et sont performants. Si je veux les recru-ter, je dois leur offrir une réelle valeur ajoutée pour qu’ils m’accordent leur temps et leur confiance. Notre expertise sectorielle nous aide dans cette démarche: je peux présenter une entreprise de manière très détaillée, je connais ses structures, ses modèles, ses attentes et je peux ainsi instaurer un climat de confiance.

Combien de temps les personnes placées restent-elles aujourd’hui à leur poste? Y a-t-il également des différences à ce niveau?

Autrefois, on restait dix ou vingt ans au même poste, aujourd’hui les cycles sont nettement plus courts. Mais il existe des différences: en Suisse alémanique, on est plus pragmatique, on analyse les structures, on prend des décisions avec plus de prudence. En Suisse romande, on saisit plus rapidement les opportunités, on est plus ouvert à la nouveauté.

Vos conclusions sur ces différences culturelles entre Suisse romande et Suisse alémanique?

Les différences sont réelles, mais pas aussi importantes qu’on le prétend. Souvent, les différences entre les secteurs sont plus importantes qu’entre les régions. Il est essentiel de connaître les nuances et de les prendre au sérieux. Au final, ce ne sont pas les différences qui comptent, mais les ponts. Chez Stellar, nous nous considérons donc comme des bâtisseurs de ponts: nous relions les personnes, les marchés, les cultures, la confiance et les structures. Lorsque tout cela est réuni, les résultats sont au rendez-vous.


Thomas Brossard est associé fondateur du cabinet de recrutement Stellar Executive Search. stellar-executive.ch

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Daniel Thüler est le rédacteur en chef de la version germanophone de HR Today. 

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