L'âge n’est pas si décisif que l’on veut bien nous faire croire
L’âge n’a rien à voir avec l’employabilité. C’est en partant de ce principe que Michael Kres et son entreprise Promove TM soutiennent des chercheurs d’emploi de la génération 50+. Et ce qui au premier abord paraît paradoxal, ils le prouvent par la croissance régulière de leur entreprise de consulting.
N’allez pas chercher derrière l’intérêt de Michael Kres pour l’employabilité de la «Génération 50+» des raisons statistiques ou une quelconque réflexion stratégique. Au contraire, l’explication est toute personnelle: «Quand, à 58 ans, mon oncle a perdu sa place, j’ai compris à quel point ce genre de situation était délicate. A partir d’un certain âge, les structures d’engagement traditionnelles vous laissent tomber», explique ce licencié de la Haute école de commerce de Saint-Gall. Avec un ami, il décide en 1998 de fonder une société pour offrir aux «quincas» une plate-forme d’emploi. Ils effectuent plus de 2500 interviews en entreprise pour évaluer leurs besoins. Les médias s’intéressent également à leur projet.
Le hic c’est qu’ils n’obtiennent quasiment aucun résultat concret. Pour Michael Kres et son ancien partenaire, les débuts ressemblent donc au quotidien des seniors qu’ils essaient de soutenir: beaucoup d’efforts pour des résultats bien décevants. Pas du genre à baisser les bras, ils veulent en savoir plus. Pourquoi un tel écart entre l’intérêt annoncé par les entreprises et leur réelle capacité d’embauche?
Aujourd’hui, Michael Kres est persuadé d’avoir trouvé la réponse: «Nous avons découvert que les attentes des chercheurs d’emplois et ceux des employeurs ne correspondaient pas du tout. Les demandeurs d’emploi essayaient par tous les moyens de faire valoriser leur expérience. Au lieu de mettre en avant ce qu’ils pourraient apporter aux entreprises.» Pour remédier à ce décalage, Michael Kres s’entoure de Daniel Held, partenaire de la société d’informatique Qualintra SA et du professeur de statistique et de psychologie, Jérôme Rossier, de l’Université de Lausanne. Après cette période de consultation, la société de Michael Kres redéfinit la notion d’employabilité en partant des constats suivants:
- Les entreprises ne sont plus en mesure de définir des programmes d’engagement sur le long terme.
- La sécurité de l’emploi n’est donc plus garantie.
Et pour les demandeurs d’emplois, cela implique que:
- la carrière au sens classique du terme (c.-à-d. avec un plan de carrière prédéfini) a perdu sa raison d’être au profit des carrières dites «protéiformes», avec peu de structure, peu de points de repères mais beaucoup de place pour la propre initiative.
- aujourd’hui, la réussite d’une carrière est tombée entre les mains des employés.
Ces nouvelles réalités du marché du travail impliquent un changement fondamental dans la manière de recruter des entreprises. Aujourd’hui, la création de nouveaux postes dépend avant tout d’un besoin. Que ce soit l’accomplissement d’une mission ou la recherche d’une solution pour des problèmes concrets. Selon Michael Kres, c’est seulement dans ces cas de figure que l’entreprise commence à penser au budget, à définir le poste et enfin à publier une annonce. Ces emplois, liés à des projets, sont en général de courte durée, ou sans garantie pour l’avenir.
Conséquences pour les chercheurs d’emplois: ils doivent aujourd’hui apprendre à «vendre» activement leurs compétences et leurs capacités à résoudre des problèmes spécifiques. Pour illustrer son propos, Michael Kres s’appuie volontiers sur l’image des trois cercles pouvoir-vouloir-intérêt: « Il faut se concentrer sur l’intersection de ces trois indices. Et de là, inévitablement, le domaine du possible s’élargira.»
Depuis que la société Promove applique cette méthode, leur taux de réussite a considérablement augmenté. Ils ont en même fait un outil, baptisé «ProPosition». En 2001, le Service public de l’emploi du canton de Genève a été le premier à s’en servir. Et depuis, plusieurs cantons leur ont emboîté le pas. Sans parler des milliers d’individus qui ont testé leur employabilité grâce à «ProPosition».
Mais cette nouvelle approche de la recherche d’emploi pour la «génération 50+» doit aussi concerner les responsables RH, explique Michael Kres. Et son expérience dans ce domaine est plutôt mitigée: «Il existe encore beaucoup de départements RH qui barrent la route à cette catégorie de chercheurs d’emplois sans arguments pertinents. Mais à l’avenir, prévient-il, les responsables RH devront impérativement calquer leur politique d’engagement sur les besoins de leur entreprise. Plutôt que de subir la loi des préjugés, encore bien trop courants dans le milieu.»