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Le véganisme arrive en entreprise

Adieu viande, poisson, œufs et fromage: chaque année en janvier, le défi du «Veganuary» propose de tester pendant trente jours l’alimentation 100% végétale. Quelques entreprises ont suivi.

Inutile de faire durer le suspense: en Suisse, nous n’avons pas trouvé de grande entreprise qui ait embrassé le défi du «Weganuary» au point de changer radicalement la carte des menus de sa cafétéria pendant tout le mois de janvier. En revanche, il y a assurément un bon nombre de personnes déjà converties au régime 100% végétalien qui ont profité de l’occasion pour sortir du placard et parler autour d’elles de l’intérêt du véganisme. Cela dit, il y a tout de même des entreprises suisses qui ont activement participé à l’événement en encourageant leurs collaborateurs à relever le défi et en donnant des conseils utiles au grand public pour emboîter le pas. C’est notamment le cas du WWF.

L’origine de cette initiative est britannique. L’idée consiste à inviter le grand public à manger végétalien pendant un mois complet. L’une des conditions pour prendre part officiellement en tant qu’entreprise est de proposer des produits et des plats 100% véganes pendant tout le mois de janvier. De façon assez prévisible, le secteur de la grande distribution s’associe avec enthousiasme au mouvement, en faisant la promotion de ses gammes estampillées véganes. On observe également un engouement de la part des start-ups actives dans le développement de produits protéinés remplaçant la viande.

Les pays qui affichent le plus fort taux de participation sont les États-Unis, suivis par le Royaume-Uni, l’Inde, l’Allemagne, l’Italie et le Mexique. L’Amérique latine est bien représentée, avec l’Argentine, la Colombie, le Chili, le Brésil, le Venezuela et le Pérou dans le Top 15. La Suisse se place 14e, juste derrière la France. La couverture médiatique s’étend d’année en année, avec en 2023 plus de 130 articles dans la presse hexagonale et 11’ 000 publications #Veganuary sur Facebook. Fait intéressant, 98% des personnes inscrites à titre individuel se disent motivées à continuer sur cette voie et une proportion tout aussi importante d’entreprises recommanderaient volontiers à d’autres de tenter l’aventure. Il est question de «décarboner les assiettes», de «montrer qu'il est possible de manger végétal tout en se faisant plaisir» et de «songer à faire sa transition alimentaire pour le bien de la planète, des animaux, de sa propre santé ou simplement par curiosité», selon divers témoignages.

L’événement s’inscrit dans une tendance mondiale qui a débuté avec la création de la journée sans viande, en 1985, sous l’impulsion de l’organisation écologiste et végétarienne FARM. Fixée aux alentours du 20 mars, elle est relayée par des associations militantes au Brésil, en Belgique, en Allemagne et en Suisse, notamment. Dans l’esprit des gens, elle se mélange parfois avec des initiatives de même inspiration qui tombent à un autre moment dans l’année, comme la Journée mondiale du végétarisme (Swisstainable Veggie Day en Suisse), normalement fêté le 1er octobre. À cette occasion, Suisse Tourisme collabore avec Gastrosuisse et HotellerieSuisse pour «promouvoir une gastronomie durable dans l’esprit de Swisstainable». Restaurateurs, hôteliers et organisations partenaires s’unissent pour porter haut les valeurs de la cuisine végétarienne dans les auberges de tout le pays.

Le mouvement est en marche. En 2021, les entreprises suisses spécialisées dans la recherche de sources de protéines alternatives se sont constituées en association. La Swiss Protein Association s’est fixé pour but d’alerter l’opinion publique sur la nécessité de développer des solutions alimentaires durables. En juin 2022, le groupe de réflexion indépendant Gottlieb Duttweiler a prédit que la population adopterait massivement un régime en viande d’ici 2050. «Nous n’aurons pas d’autre choix», estime-t-il, car les industries concernées représentent une cause importante de pollution et de déforestation. La consommation moyenne de viande par habitant en Suisse est passée de 64,4 kg à 47,3 kg depuis les années 80. «Un jour, la viande issue de la production conventionnelle sera pour nos petits-enfants ce que la cassette audio est aujourd’hui: une relique tombée hors du temps», conclut l’organisation.

Les véganes à la conquête des universités

À l'instar de l’Université de Lucerne, qui propose presque exclusivement des menus véganes et végétariens à ses étudiants, les hautes écoles et les universités suisses ont tendance à bannir la viande de leurs cafétérias.  Côté alémanique, la tendance est déjà bien ancrée. Par exemple, les véganes de l'Université de Zurich disposent de leur propre cantine depuis au moins cinq ans.

Progressivement, la Suisse romande s’aligne. En 2022, après avoir décrété une journée hebdomadaire sans viande, l’Université de Lausanne a décidé d’intégrer encore un peu plus dans les cuisines de ses cafétérias les critères du bien-être animal, de la durabilité et de la saisonnalité des produits.  Ces institutions, qui sont régulièrement évaluées sur la base de leurs progrès en matière d'écologie, entendent montrer l'exemple. L'impact de la restauration collective sur leur bilan carbone varie d'un établissement à l'autre: 22% pour l’EPFL et seulement 5% pour l'Université de Genève. Ces différences peuvent s'expliquer notamment par une différence de typologie des campus (p. ex. emplacement géographique, nombre d'usagers des cafétérias, volume des repas).

commenter 0 commentaires HR Cosmos

Typographe de premier métier, Francesca Sacco a publié son premier article à l’âge de 16 ans pour consacrer toute sa vie au journalisme. Elle obtient son titre professionnel en 1992, après une formation à l’Agence télégraphique suisse, à Berne. Depuis, elle travaille en indépendante pour une dizaine de journaux en Suisse, en France et en Belgique, avec une prédilection pour l’enquête.

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