«Travailler dans les ressources humaines n'est pas de tout repos»
Khadija Levain-Chavanon est la fondatrice de Manaar Consulting et co-fondatrice d'Emogems. Après une carrière de plus de 20 ans dans les ressources humaines, dans des entreprises internationales en Suisse et à l'étranger, elle est aujourd'hui coach certifiée, coach d'équipe et experte en intelligence émotionnelle. Elle présente ici deux outils pour réguler les émotions dans une équipe RH.
Khadija Levain-Chavanon animera un webinaire sur la régulation des émotions pour les membres d’HR Today le 29 octobre 2024.
«À la suite de ma formation en intelligence émotionnelle, j’ai eu une prise de conscience, ou plutôt dirais-je, une révélation: j’ai compris que je ne pouvais plus accompagner mon équipe sans prendre en compte leurs émotions, celles qui les animaient à l’arrivée au bureau ainsi que celles qui les transportaient de manière futile ou agressive au quotidien. Travailler dans les ressources humaines n’est pas de tout repos car nous accompagnons l’humain et parfois, ce que nous pensons bien faire peut-être préjudiciable et ce, à notre insu car nous manquons une compétence, un art de vivre essentiel qui est, à mon sens, l’intelligence émotionnelle.
Cet éveil m’a incité à organiser un workshop, pour mon équipe, sur cette thématique; l’objectif étant de les initier à cette belle compétence et de leur en partager les bienfaits. J’ai également décidé de créer un «mood board» qui serait non seulement un outil d’entrée à nos réunions quotidiennes mais aussi un outil «de suivi». Ce mood board était un simple tableau blanc sur lequel était entreposé différents «magnets» de leurs avatars personnalisés, d’émotions primaires, de météos et de besoins. Chaque réunion du matin était précédée d’un temps de pause afin de se connecter à son corps et à tour de rôle, je demandais à chacune d’entre elles de me citer en premier lieu «sa météo intérieure», l’émotion ressentie dans le ici et maintenant ainsi que les sensations physiques associées dans le corps et nous finalisions avec le besoin. Chacune venait ensuite entreposer ses différents magnets à côté de son avatar. S’agissant des besoins, soit elles y répondaient par elles-mêmes si elles en avaient les capacités, le temps et/ou les moyens ou soit nous faisions appel à l’intelligence collective de l’équipe pour y répondre. L’intention positive de réponse à ce besoin était de mettre l’équipe dans de bonnes dispositions pour démarrer la journée. Il arrivait également et parfois que choisir et nommer la météo intérieure, l’émotion ou le besoin étaient compliqué pour certaines et je les guidais par des questions exploratrices.
Ce mood board était un outil vivant car les émotions évoluant au cours de la journée, l’équipe était libre de se déplacer et de changer la météo intérieure, l’émotion et le besoin du moment. Si l’émotion était très forte, il y avait également un buzzer pour que l’équipe disponible soit à l’écoute et fasse le même exercice du matin.
Tous les matins, nous pratiquions cet exercice personnel au sein d’une belle énergie collective et de confiance. L’exercice n’était pas simple pour l’une d’entre elles et il nous a permis de comprendre qu’elle était dans l’illettrisme émotionnel. Cette pratique quotidienne qui s’est avérée difficile en premier lieu s’est finalisée par un beau cadeau d’exploration et de connaissance de soi.
Cet outil a vraiment permis à l’équipe de partager leur authenticité et de s’autoriser à être vulnérable; ce qui a permis finalement de monter en puissance la performance collective et de renforcer la confiance au sein de l’équipe.
Enfin, un des derniers outils partagés avec l’équipe fut de créer un moment «STOP» lorsque l’émotion était trop forte. L’émotion qui revenait le plus souvent était la colère. Elle était parfois exacerbée. Je leur avais montré ce qui m’était fort utile dans ces moment-là, c’était de créer un point d’ancrage qui était un fort pincement entre le pouce et l’index; l’idée étant que le cerveau porte son attention sur la douleur créée de manière intentionnelle. Ce temps de distraction permettait ensuite d’effectuer des exercices de respiration afin de retrouver son calme et de partager, avec l’équipe, son émotion, sa météo et son besoin.»