
Généralement, notre premier réflexe, lorsque nous nous sentons mal au boulot, consiste à critiquer notre hiérarchie, la direction puis l’entreprise tout entière. Nous nous plaignons, sommes déprimés, accusons l’environnement puis nous séparons. Retrouvons un job. Sommes euphorique. Puis, quelques années après, revivons le même scénario.
Nous le savons tous: aucun salarié jamais n’a pu se motiver lui-même – ni être motivé – par la seule perspective d’enrichir un actionnaire lointain, anonyme, aussi distant qu’in-engagé, parcellaire propriétaire de l’entreprise qui l’emploie. Qu’il s’agisse d’un petit rentier bedonnant, soignant son embonpoint en sirotant de la bière sur les plages de Floride, ou bien d’un spéculateur avide et prédateur, qui, sur les places boursières, ne gagne de l’argent que lorsque d’autres en perdent, cet actionnaire-là n’a aucun affectio societatis et guère que des dollars dans les yeux.
– «C’est l’enfer, mais je me suis fixé de tenir encore 2 ans.»
– «Oui, t’as raison, accroche-toi.»
En attendant mon rendez-vous, je surprends cette conversation qui, il y a deux ans encore, m’aurait semblé normale mais qui tout à coup me paraît surréaliste. Subitement, l’envie de sauter à la gorge de celui qui acquiesce me prend.