Dépendances

Comment contourner le déni tout en restant à l’écoute

Avant de pouvoir aider un collaborateur affaibli par une dépendance, plusieurs tabous doivent être brisés. Puis, les managers ont besoin d’être formés aux entretiens en tête à tête particulièrement délicats. Car les traitements thérapeutiques entrepris suite à un positionnement de l’employeur sont les plus efficaces.

Depuis plus de trente ans, bon nombre d’entreprises suisses se préoccupent du problème de la consommation excessive de produits psychotropes et de dépendance chez leurs collaborateurs. La santé de ceux-ci, leur absentéisme notamment, jouent un rôle déterminant dans la gestion du personnel, mais également sur la rentabilité globale de l’entreprise. C’est pourquoi, l’intention de traiter ce problème est de plus en plus présente.

Des mesures de prévention mais aussi d’aide aux employés en difficulté, sont régulièrement mises en place dans les grandes et moyennes entreprises. Elles ont prouvé leur efficacité en Suisse comme à l’étranger. La formation des cadres, managers, responsables de ressources humaines est indispensable pour permettre à ces politiques d’être appliquées.

Une formation nécessaire ou superflue? De nombreuses questions se posent: Quel est mon rôle? Jusqu’où va-t-il? Que puis-je dire? Comment? Ces éléments de base, habituels en gestion de management, deviennent régulièrement paralysants lorsqu’on doit aborder un collaborateur qui consomme de l’alcool ou un autre produit. En effet, de nombreux tabous sont à briser. Par exemple: Qui a bu boira! Si je le confronte il n’acceptera pas l’aide, je devrai le licencier et sa situation se dégradera encore plus… Il ne dysfonctionne pas trop finalement, c’est encore acceptable. Je vais passer pour le méchant, etc…Les premiers objectifs de formation visent donc à donner de la sécurité pour oser mener ces entretiens difficiles, mais aussi donner de l’espoir. Les traitements thérapeutiques entrepris suite à un positionnement de l’employeur, sont ceux qui sont les plus efficaces: 70 pour cent de réussite.

Comment s’y prendre? Il ne va pas s’agir d’amener seulement des informations théoriques mais également de travailler spécifiquement sur le déroulement et le contenu de l’entretien. Il se situe au croisement de l’entretien d’écoute et de motivation propre au domaine social, et de l’entretien de qualification du domaine de l’économie. Les enjeux sont de contourner le déni pour ne pas s’y enliser et en même temps d’être suffisamment à l’écoute de son interlocuteur de sorte qu’il ne se sente pas menacé et qu’il puisse accepter de se mettre face à sa réalité.

A la fin de l’entretien, l’employé concerné doit avoir entendu que le positionnement de l’entreprise ne vise pas la sanction mais bien de l’amener à faire un réel choix entre assumer les conséquences de ses actes ou accepter d’être orienté vers une aide spécialisée.

Pour la personne qui mène l’entretien, la difficulté à laquelle il est confronté est de croire que son collaborateur a la capacité de changer alors même que le constat des faits démontre le contraire.

L’expérience a permis de vérifier que l’amélioration de la qualité des entretiens améliore également l’ensemble de la gestion des dysfonctionnements, qui devient plus performante et cohérente; de la même manière, le nombre de collaborateurs qui acceptent l’aide professionnelle s’accroît.

Depuis de nombreuses années, la Fondation Les Oliviers offre aux entreprises qui le désirent différents programmes de formation, également dans le cadre de cycles de formation de responsables des ressources humaines. Leur déroulement se développe sur deux axes: 

  • Sensibiliser à la consommation de produits psychotropes dans notre société et dans le monde du travail, mettre en évidence les conséquences engendrées par celle-ci.
  • Travailler les entretiens dans la forme et le contenu à partir de situations amenées par les participants ou les formateurs.

Nos interventions se sont également développées dans le cadre de formation continue pour cadres; elles peuvent être également illustrées par des témoignages de personnes qui, ayant été aidées par leur entreprise, sont à même de donner un autre regard sur la personne en difficulté avec sa consommation d’alcool ou d’autres produits. A notre connaissance, il n’y a pas d’autre formation à ce type d’entretien en Suisse romande. Des consultations individuelles sont proposées afin de construire ces entretiens de cas en cas en fonction de la spécificité de l’entreprise et de ses enjeux. Enfin, pour les  personnels de la santé, des formations plus approfondies favorisent les actions de soutien qu’elles auront à mener. De nombreuses formations existent concernant les ressources humaines, mais peu abordent spécifiquement ces questions alors même que les managers qui ont inclu cette approche spécifique dans leur gestion du personnel ont constaté une plus grande efficience du management de l’entreprise.

 

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Catherine Jaquet est responsables des secteurs "Traitements et Formation" à la fondation Les Oliviers au Mont-surLausanne. 

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