Le licenciement

Le licenciement dans tous ses états

Quel type de licenciement choisir? Faut-il un motif particulier pour résilier le contrat? Y a-t-il des situations dans lesquelles un licenciement ne peut pas être prononcé? Tour d’horizon de la législation qui régit le processus de licenciement en Suisse ou comment éviter qu’une situation d’embauche ne vire au cauchemar...

Par essence et quelle qu’en soit la durée, le contrat de travail est fondé sur la confiance réciproque entre les parties. Toutefois, dans bien des cas, un licenciement est inévitable. Quel type de licenciement choisir? Faut-il un motif particulier pour résilier le contrat? Y a-t-il des situations dans lesquelles un licenciement ne peut pas être prononcé? La conclusion d’un contrat de travail clair, précis, concis et adapté à la situation permet de diminuer les risques de licenciement et favorise le bon déroulement des rapports de travail. 

Liberté contractuelle 

Le licenciement fait partie de la vie économique d’une entreprise. C’est pourquoi le droit du travail est régi par le principe de la liberté contractuelle. Selon ce principe, l’employeur a le droit de mettre fin de manière unilatérale au contrat de travail. En règle générale, aucun motif particulier n’est nécessaire pour résilier un contrat de travail. Seule exception à ce principe, le licenciement abusif. 

Résiliation ordinaire 

Il s’agit de la résiliation du contrat moyennant le respect du délai de congé légal ou contractuel. C’est le mode de résiliation habituel pour licencier un collaborateur qui n’atteint pas ses objectifs ou dont le travail ne donne pas satisfaction. 

Licenciement économique 

Dans le langage courant, le licenciement économique est généralement synonyme de suppression d’emplois, de restructuration, de délocalisation ou de fermeture de l’entreprise. Tout comme la résiliation ordinaire, le licenciement économique s’effectue moyennant le respect du délai de congé. 

Mais attention, licenciement économique rime bien souvent avec licenciement collectif. Par licenciement collectif, on entend les congés donnés par l’employeur à un nombre minimum de travailleurs dans un délai de 30 jours pour des raisons internes à l’entreprise, qui rendent nécessaire la suppression ou la modification de postes de travail. 

Le nombre minimum de collaborateurs licenciés pour qu’il y ait licenciement collectif dépend de la taille de l’entreprise. Avant de procéder à un licenciement collectif, l’employeur doit consulter la représentation des travailleurs ou, à défaut, les travailleurs eux-mêmes. Le non-respect de la procédure de consultation rend tous les congés abusifs. 

Licenciement immédiat 

Malgré un contrat de travail établi dans les règles de l’art, l’employeur n’est jamais à l’abri de voir son comptable voler dans la caisse ou un chauffeur conduire en état d’ébriété. Pour que ce licenciement puisse être prononcé avec effet immédiat pour de justes motifs, il faut que la faute soit suffisamment grave pour que le rapport de confiance soit irrémédiablement détruit. Si le manquement du travailleur est de moindre gravité, la résiliation immédiate ne sera justifiée que si, malgré plusieurs avertissements, la faute a été répétée. 

Licenciement abusif 

Mais attention, lorsqu’il est mis fin à un contrat, le risque de licenciement abusif n’est souvent pas très loin… L’article 336 CO énumère, de manière non exhaustive, les cas les plus fréquents de licenciements abusifs, notamment celui dans lequel le congé est donné pour une raison inhérente à la personnalité de l’autre partie telle que sa nationalité, son orientation sexuelle ou encore ses antécédents judiciaires.

Le congé-représailles constitue également un cas de licenciement abusif. Il en va notamment ainsi du collaborateur licencié parce qu’il requière le paiement de ses heures supplémentaires. L’établissement d’un contrat de travail précis, concis et adapté à la situation aura pour but de limiter au maximum les risques de licenciement abusif dans la mesure où les droits et obligations des parties sont clairement fixés par écrit. 

Choix du contrat 

Tout commence par le choix d’un contrat adapté à la situation : engagement d’un collaborateur pour remplacer une jeune mère durant son congé maternité, d’un ouvrier temporaire ou d’un cadre. Lumière sur les différents types de contrats qui se présentent à l’employeur. 

Contrat de durée indéterminée 

Lorsque l’employeur envisage d’engager un collaborateur sur le long terme, il optera pour un contrat de durée indéterminée. Il s’agit du contrat dont l’échéance n’est pas fixée à l’avance, de sorte qu’il est nécessaire de le résilier pour mettre fin aux rapports de travail. 

Prévoir un temps d’essai peut s’avérer judicieux. Il a pour but de fournir aux parties l’occasion de préparer l’établissement de rapports de travail destinés à durer. Il leur permet d’éprouver leurs relations de confiance, de déterminer si elles se conviennent mutuellement et de réfléchir avant de s’engager pour une plus longue période. 

Dans le cadre d’un contrat de durée indéterminée, le premier mois est présumé temps d’essai. Ce délai peut être prolongé à trois mois par écrit. Si l’une des parties souhaite résilier les rapports de travail durant le temps d’essai, elle doit respecter un délai de sept jours calendaires. Ce délai peut toutefois être contractuellement modifié, voire supprimé

Après le temps d’essai, sauf clause contraire, le délai de congé est d’un mois durant la première année de service, deux mois durant la deuxième puis trois mois dès la dixième. Ces délais peuvent bien entendu être prolongés pour les cadres ou raccourcis pour des employés subalternes. 

Contrat de durée déterminée 

Ce contrat est, comme son nom l’indique, prévu pour une durée déterminée ou déterminable. Il prend fin par le seul écoulement du temps, sans qu’une résiliation ne soit nécessaire et ce même si le collaborateur est en incapacité de travail. Il est possible de fixer dans le contrat un temps d’essai, cependant ce dernier doit être proportionnel à la durée du contrat. Mais attention, si aucun temps d’essai n’est prévu, il n’est pas possible de résilier un contrat de durée déterminée, sauf si l’employeur se trouve en présence d’un motif de licenciement immédiat. 

Contrat de durée maximale 

Un restaurateur a besoin de personnel «jusqu’à la fin de la saison de ski au plus tard» et souhaite pouvoir mettre fin au contrat en cas de manque de neige. Dans ce cas, un contrat de durée maximale est adapté à la situation. 

Ce contrat est considéré comme un contrat de durée déterminée, c’est-à-dire qu’il prend fin de lui-même, sans qu’une résiliation ne soit nécessaire, à l’échéance convenue. Toutefois, avant l’échéance maximale, il déploie certains effets propres au contrat de durée indéterminée. Le temps d’essai est régi par les mêmes règles que le contrat de durée indéterminée. Après la fin du temps d’essai, il est possible de résilier le contrat avant son terme en respectant les délais de congé légaux ou contractuels. 

Contrat de durée minimale 

Si un contrat de travail peut être résilié «pour le 31 décembre au plus tôt», il s’agit d’un contrat de travail de durée minimale. Ce contrat doit être choisi lorsqu’une société veut engager un collaborateur pour une durée indéterminée, mais souhaite prévoir une durée minimale durant laquelle il ne peut pas être mis fin au contrat. 

Ce contrat est considéré comme un contrat de travail de durée indéterminée. Il est nécessaire de le résilier pour que les rapports de travail prennent fin. Cependant, les parties ont décidé de se lier pendant une durée minimale. Ainsi, jusqu’à ce que cette durée soit écoulée, le contrat déploie les effets d’un contrat de travail de durée déterminée et ne peut pas être résilié. Les parties peuvent toutefois prévoir par écrit un temps d’essai proportionné à la durée de la période minimale. 

Clauses sensibles sous la loupe 

Après avoir choisi le type de contrat de travail adapté aux circonstances, l’employeur vouera un soin tout particulier à la rédaction de certaines clauses du contrat afin de protéger les intérêts de sa société. Flash sur ces clauses. 

Heures supplémentaires 

Mal gérées, les heures supplémentaires peuvent vite devenir une foire d’empoigne: heures supplémentaires qui s’accumulent au fil des ans, demande d’indemnisation. Pour éviter de telles issues, une disposition dans le contrat permettra une meilleure gestion du temps de travail. Celle-ci déterminera quel collaborateur a droit ou non à la compensation des heures supplémentaires ainsi que leur mode de compensation. 

Diligence et fidélité 

Pour protéger les intérêts de l’entreprise, le contrat doit impérativement contenir une clause de diligence et fidélité. Cette clause sera axée sur les secrets de fabrication pour le personnel R&D. Par contre, pour un vendeur, elle sera orientée sur les méthodes de vente et la clientèle. 

Prohibition de faire concurrence 

Une clause de prohibition de faire concurrence doit être insérée dans le contrat lorsque le collaborateur a connaissance de la clientèle, des secrets de fabrication ou d’affaires. Un cadre ou un ingénieur peuvent se voir imposer une prohibition de faire concurrence. Par contre, une telle prohibition sera nulle pour un employé de production voire même pour un comptable. 

Propriété intellectuelle 

Les droits de propriété intellectuelle sont l’essence même de l’entreprise. Leur protection est une nécessité. Dans ce but, la cession à l’employeur des droits sur les inventions, designs et logiciels créés par le collaborateur doit être précisée dans le contrat, soit notamment pour les ingénieurs et les informaticiens. 

Bonus 

Bien des entreprises versent à leurs collaborateurs un bonus de fin d’année. Mais attention, un tel bonus versé à bien plaire devient obligatoire lorsqu’il est octroyé trois ans de suite. Pour empêcher la transformation du bonus en salaire, il est important de prévoir par écrit que le bonus est versé à bien plaire et qu’il ne lie en aucun cas l’employeur pour les années à venir. 

En bref 

Le choix d’un contrat de travail adapté à la situation avec des clauses spécifiques liées à la fonction du collaborateur, voilà le point de départ pour qu’une embauche ne vire pas au cauchemar. Lorsqu’une situation de licenciement se présente, l’employeur vouera un soin particulier à examiner quel type de licenciement est adapté à la situation, tout en évitant les situations qui pourraient renvoyer à un congé abusif*. 

*Ouvrage à paraître sur les différents types de résiliation en droit du travail, page 23

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Marianne Favre Moreillon, spécialisée en droit du travail, est Directrice et Fondatrice du cabinet juridique DroitActif à Lausanne. 

Lien: www.droitactif.ch

 
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