La banque jaune aux petits soins de son personnel
Dans une société en pleine croissance, la pression sur les collaborateurs est constante: nouvelles technologies, séparation moins distincte entre vie professionnelle et privée, contact avec la clientèle. Pour faire face, Postfinance a développé un programme de prévention de la santé efficace.
En octobre 2004, le monde s’effondre autour d’Elisabeth*. Atteinte d’un cancer, elle annonce à son employeur son retrait provisoire de la vie active. Six mois plus tard, le coup encaissé, elle remet le pied à l’étrier. Mais les forces manquent pour tenir son rythme habituel. Transfert dans un autre service, jugé moins pénible. Une année plus tard, la situation s’enlise. Pour sortir de l’impasse, Elisabeth accepte d’entrer dans un programme de «case management» offert aux collaborateurs de Postfinance.
Ce soutien médical et psychologique fait partie de la responsabilité sociale de la filiale ban-caire du géant jaune. Libre au collaborateur d’y participer ou non. L’offre: une «case manager» prend en charge le dossier jusqu’à la réinsertion du collaborateur. Une fois le secret médical levé, avec l’autorisation de l’employé, le programme prévoit la mise en réseau des médecins (voire de l’Assurance Invalidité), de l’entourage familial et du supérieur direct de l’employé. Très ciblé, ce programme permet de dégager les meilleures solutions – mutation interne, réduction du temps de travail, repos total – pour soutenir le collaborateur dans son combat contre la maladie.
«Dans les moments difficiles, être bien en-touré et bénéficier du soutien de son employeur aide à remonter la pente. Sans parler de l’accroissement de la motivation une fois rétabli», proclame Robert Schäfer, responsable du projet. Mais les effets positifs du «case management» ne s’appliquent pas uniquement à l’univers professionnel. «Un collaborateur en bonne santé physique et psychique profitera également à sa famille et à sa communauté civile. C’est donc bien une situation de «win-win»», poursuit-il.
Autant les problèmes privés (conjugaux ou financiers) que des pépins de santé sont pris en compte. «Mais nous n’attendons pas que les difficultés apparaissent pour réagir. La prévention est la clé», relève Robert Schäfer.
Lancé en 2002, l’analyse des besoins des collaborateurs a été la première étape dans la mise sur pied du programme. Constat: des demandes différenciées et beaucoup de problèmes de santé dits psychosomatiques, liés à la routine des manipulations répétitives du traitement des paiements. L’analyse des questionnaires distribués aux employés montre également une multiplication des petits soucis. «Nous avons donc décidé de prendre des mesures ciblées. Et nous avons impliqué les 400 cadres de la société dans le processus, en leur offrant une courte formation. Proches des collaborateurs, au courant des exigences professionnelles, c’est par eux que le travail de prévention doit se faire», assure Robert Schäfer. Et pour soutenir les cadres dans cette tâche, l’entreprise fait appel à des psychologues du travail.
Sur le terrain, la plupart des difficultés se règlent rapidement. Mais la quantité de cas plus graves a poussé Postfinance à engager trois personnes à plein temps. Ces «case managers» gèrent la coordination de l’entourage autant professionnel que privé du collaborateur en difficulté. «Sans cette coordination, effectuée dans la plus grande confidentialité, c’est très difficile de trouver des solutions pertinentes. Dans les cas de maladies compliquées, c’est rarement un seul problème qu’il faut régler», explique Robert Schäfer.
Conseils pour les GRH? «Dans la phase de lancement, nous avons fait appel à des externes, histoire de vérifier si le programme faisait sens. Et une fois que vous vous engagez dans cette voie, l’implication des cadres est essentielle. C’est aussi une question de culture d’entreprise. Si la ligne ne vous soutient pas, c’est peine perdue», prévient Robert Schäfer. Il insiste également sur la communication: «Comme la sphère privée des collaborateurs est concernée, il y a eu pas mal de résistances au début. Il faut donner un visage humain au programme. La confiance doit être totale.»
Résultats: depuis deux ans, l’absentéisme a baissé de 20 pour cent. Et l’image de la banque jaune en a également profité. «Nous recrutons beaucoup de talents parmi nos concurrents, c’est un argument qui joue en notre faveur», glisse malicieusement Alex Josty, porte-parole. Elisabeth, de son côté, a repris une vie normale depuis quelques mois. Au bénéfice d’une rente AI, elle a réduit son temps de travail et poursuit sa contribution aux bonnes affaires de son employeur.